Revoilà les Polonais d'Embrional qui avaient rendu une copie intéressante en 2012 avec leur premier full-length
Absolutely Anti-Human Behaviors. Du death metal polonais mais pas que qui nous montrait un groupe pas si bas du front que l'on aurait pu le penser grâce une musique à la fois brutale et ambiancée qui jouait beaucoup sur les dissonances. Le groupe pêchait toutefois par des morceaux pas tout le temps passionnants, un manque d'intensité certes dû au choix de travailler les atmosphères mais qui aurait pu se montrer plus couillu, ainsi qu'une production un peu trop légère. Le potentiel, néanmoins, était bien présent. Embrional pouvait faire mieux. D'où l'intérêt de ce deuxième album sorti fin février, toujours chez Old Temple (Deception, Ebola, Pandemonium...). Ont-ils su repartir sur les bonnes bases de
Absolutely Anti-Human Behaviors et réparer ses égarements pour faire de
The Devil Inside plus qu'un disque sympathique aux bonnes idées pas toujours bien exploitées?
La différence de qualité entre
Absolutely Anti-Human Behaviors et
The Devil Inside ne se révèle pas si importante mais on note bien une progression de la part des Slaves. Ce que le combo perd par contre, c'est l'effet de surprise. Là où pas grand monde ne connaissait Embrional à la sortie de son premier album, il était ici plus attendu. À l'image de l'excellente pochette horrifique dans le même ton que la précédente, mêlant noir et blanc dans le dessin avec le rouge sang du logo et du titre, pas de grande évolution sur ce
The Devil Inside. Seul la dernière piste "Whores, Drugs And Brain Dead", qui porte d'ailleurs très bien son titre, surprend par son aspect plus simple, direct, thrashy, old-school et déjanté, avec toutefois toujours ce côté psychopathe en moins sournois, notamment par ce chant moins growlé, plus camé. Un final en forme d'exutoire assez jouissif. Pour le reste, le quatuor poursuit dans la même voie, avec cependant un peu plus de talent et moins d'influences Morbid Angel au profit d'Immolation. On navigue entre les séquences habituelles bourrines où les tremolos evil règnent sur fond de blast-beats et autres rythmiques rapides, avec cette fois une production plus adaptée quoique le son de batterie se fait un peu trop étouffé, et des passages plus modérés à base de dissonances, plus un peu d'arpèges parfois ou de solos chaotico-mélodiques savoureux, tout aussi sombres mais plus torturés. Rien de nouveau ni de génial mais Embrional fait bien les choses dans les deux cas. "Funeral March" en est sans doute l'exemple le plus convaincant. Le manque d'intensité continue (le groupe n'appuie sur l'accélérateur que par à-coups), toujours présent et un peu dommageable (j'aimerais que ça blaste plus!), se révèle toutefois moins handicapant car les ambiances s'avèrent bien gérées et plus prenantes. C'est sombre, tourmenté, vicieux. On sent d'ailleurs aussi ce vice, ce côté sadique dans le bon riffing des séquences véloces ainsi que dans le chant fort à propos. Le Malin n'est jamais loin, comme lorsque ces rires de déments retentissent sur "Evil's Mucus" ou "(Behind) The Mask Of Sanity". On se retrouve dès lors plongé dans l'univers on ne peut mieux illustré par la cover de Mariusz Krajewski.
Rien à redire sur l'atmosphère travaillée de ce
The Devil Inside et ce contraste bien amené entre folies faussement calmes et explosions de violence. Les morceaux sont plus inspirés et prenants que ceux de
Absolutely Anti-Human Behaviors, d'où une note supérieure. Légèrement supérieure. Embrional n'a en effet pas tout réglé et pas mal de petites choses m'empêchent encore d'apprécier pleinement la musique des Polonais. À nouveau, tout n'est pas toujours excellent, des longueurs se font sentir. Avec près de trois quarts d'heure, il y avait sans doute moyen de raccourcir pour davantage d'efficacité. D'autant que le groupe a tendance à tenir trop longtemps certains motifs. Mêmes bons, ceux-ci finissent par lasser quand ils tournent pendant plus d'une minute. Vous me direz que c'est pour accentuer le côté hypnotique et vous aurez sans doute raison. Mais ça m'emmerde malgré tout en rendant les titres monotones malgré la diversité de jeu. Et même si le riffing est très satisfaisant dans l'ensemble, que les mélodies et les solos se montrent intéressants, inspirés, cela manque de vrais passages mémorables qui nous font sourire bêtement. Il manque encore quelque chose à Embrional pour franchir un pallier plus important. C'est quoi aussi cette petite manie de saccader de temps en temps, comme vers la fin de "Funeral March" (seule faute de goût d'un des meilleurs titres), le début de "In Darkness", "910" à la troisième minute ou "Callousness" à 1'50? Ok, ça reste rare et pas déplaisant parce qu'il se passe toujours quelque chose par-dessus ou que le riff en lui-même demeure correcte mais on pourrait s'en passer!
Si je râle sur certaines choses finalement pas très importantes ramenées à un ensemble de qualité, c'est parce que je sens qu'Embrional peut faire encore mieux. En attendant, si le groupe y arrive un jour, on peut tout à fait se contenter de ce
The Devil Inside qui confirme le potentiel présenté sur
Absolutely Anti-Human Behaviors. Après tout, Embrional fait sans doute partie des formations polonaises les plus intéressantes à l'heure actuelle. Tout en restant attachée aux valeurs du death metal national (Satan, blasts, technicité...), la formation s'en écarte aussi grâce à une volonté de ne pas faire que bourrer bêtement, en modulant son jeu et affinant une ambiance immersive evil, tourmentée et vicieuse à laquelle nous convient dissonances menaçantes, chant sadique et riffs noirs. C'est-y pas déjà bien alléchant, ça?!
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