Obsequiae - Aria of Vernal Tombs
Chronique
Obsequiae Aria of Vernal Tombs
Depuis la parution, en 2011, de leur premier très bon album Suspended in the Brume of Eos, Obsequiae s'est fait discret. Il faut dire que Tanner Anderson ne chôme pas, occupé entre autre par Celestiial – aux côtés du bassiste Jason Walton – ou son futur projet de musique médiévale. De plus, la formation a évolué durant ces quatre années d'absence, avec des changements de line-up et de label. Une signature chez 20 Buck Spin – label US éclectique mais très pointu, comptant dans ses rangs Cauldron Black Ram, Samothrace ou encore Vastum – qui a permis une plus grande visibilité, grâce notamment à une promotion digne de ce nom, pour un retour en fanfare effectué cette année sous la forme d'un trio. En effet, exit l'ex-Autumnal Winds et membre fondateur du groupe Neidhart von Reuental ! Pour la réalisation d'Aria of Vernal Tombs, Tanner Anderson s'est entouré de musiciens aguerris, partageant le même amour pour le folk et l'histoire, Andrew Della Cagna (Unwilling Flesh, Nechochwen) et le harpiste espagnol Vicente La Camera Mariño.
Un choix qui ne doit rien au hasard et dont en découle une tessiture musicale bien différente sur cette seconde œuvre. Car malgré la pâte bien reconnaissable de Obsequiae, avec ses mélodies imparables ainsi que la part importante du médiéval mais aussi des mythologies européennes, les expérimentations et prises de risque sont notables. Que ce soit dans les compositions, le chant ou encore les ambiances, les influences black metal typé suédois sont nettement moins marquées. Le death mélodique, le heavy et la folk médiévale qui étaient déjà présents dans Suspended in the Brume of Eos, revêtent une importance particulière ici. D'ailleurs, la première écoute m'a quelque peu déstabilisé tant par la luminosité automnale que par la sensualité dégagées, avec une introduction instrumentale « Ay que por muy gran fremosura » à la fois vibrante et délicate qui pose les bases d'entrée de jeu. Effectivement nombreuses sont les interludes majestueuses, délivrées par Vicente, qui viennent aérer l'album et lui conférer une aura singulière, comme hors du temps. Des mélodies parfois novatrices et soyeuses ou moyenâgeuses et mélancoliques, remontant aux 12ème et 13ème siècles. Des effets qui donnent véritablement corps au propos, faisant traits avec certaines atmosphères et certains riffs pagan renvoyant à Skydancer de Dark Tranquility notamment.
Le groupe met en musique la mort du Printemps – cf. Murmuüre avec son album éponyme – par un savant mélange de musique ancienne et sacrée avec des sonorités modernes et profanes. T. Anderson semble suivre les pas de la formation française Malicorne, de façon plus mesurée, souhaitant donner un second souffle à la musique médiévale, la démocratiser. Une influence omniprésente mais assez légère sur Aria of Vernal Tombs, où seule la harpe se détache en filigrane, avec des paroles plus abstraites abordant le paganisme (« Until All Ages Fall »), la mythologie celtique brittonique (« Pools of a Vernal Paradise ») ou bien la mythologie grecque (« In the Absence of Light »). En résulte un lyrisme aux tonalités flamboyantes qui apporte à l'ensemble une puissance accrue et des effluves épiques en abondance. Obsequiae fait tinter les cloches, sur « Autumnal Pyre », tel un coup de feu indiquant le départ d'une course effrénée vers le passé, où vous survolez d'immenses forêts brûlées par le soleil d'Automne, suivez les cours d'eaux aux éclats dorés, découvrez des vestiges anciens où la nature a repris ces droits, à l'image de l'abbaye de Valle Crucis – aux Pays de Galles – ornant la pochette de l'album.
Et le trio met parfaitement ces paysages ainsi que les émotions ressenties en musique. Une ode à un passé idyllique et magnifié portée par une production à la fois massive mais organique, permettant une lisibilité parfaite de chaque instrument. Une épopée défilant à vive allure et dont l'intensité ne faiblit jamais malgré les variations de rythme . Une alternance entre passages tirant vers le death mélodique – imprégné, en particulier, par Dawn période 92-94 – avec un A. Della Cagna déployant un jeu musclé mais tout en subtilité, soutenant une cadence élevée où viennent se greffer d'incroyables lignes de guitares semblant faire un duel (comme sur « Pool of a Vernal Paradise », à partir de 3:41) et parties orientées black metal médiéval, plutôt mid tempo, qui sont ponctuées de chants cérémoniels touchants (« Auntumnal Pyre »), d'accélérations et d'envolées fabuleuses (« Until All Ages Fall »). En cela, Aria of Vernal Tombs offre un contraste remarquable ainsi qu'une riche palette d'émotions par ses interludes épurées d'une douce mélancolie entrecoupant des titres monumentaux où déferlent avec force des riffs harmonieux et enchanteurs.
Un pouvoir de séduction rare rehaussé par une influence heavy bien sentie – renvoyant à Ludicra – qui donne une couleur plus vive aux compositions. En effet, la belle dualité entre guitare rythmique et guitare lead vous transcende sur des titres tels que « Autumnal Pyre » ou « Anlace and Heart », avec des riffs fabuleux n'en finissant jamais. Vous êtes pris dans cette atmosphère tant mystique que païenne, se faisant par moment plus langoureuse – « In the Absence of Light » –, développée par le groupe durant 44 minutes qui en paraissent, au final, moitié moins. Car en dépit d'un mélange hétéroclite et d'une technicité notable mais aussi un travail d'orfèvre effectué jusqu'au moindre détail – le solo de fin sur « In the Absence of Light » joué par Gary Vu, entre autres – Aria of Vernal Tombs est étonnamment fluide, se dévoilant au fil des écoutes. Il se vit comme une expérience durant laquelle Obsequiae vous invite à communier avec la nature et les anciens dieux.
T. Anderson atteint son but sur ce second album, réussissant à marier avec subtilité et équité toutes ses influences musicales et extra-musicales. Un rendu très riche qui, s'il déroute un peu au premier abord, est une franche réussite, sachant toucher juste. La formation continue donc de s'affranchir des limites afin de créer des œuvres toujours plus racées et originales. Ce parti pris est beaucoup plus marqué que sur Suspended in the Brume of Eos et risque de décevoir. Les un(e)s trouveront le résultat moins immédiat et agressif, plus lisse, d'autres encore se plaindront des interludes trop longues à leur goût,... Personnellement, Aria of Vernal Tombs est un petit bijou dont je ne me lasse pas.
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