Dysylumn - Conceptarium
Chronique
Dysylumn Conceptarium
Formé en 2010 par Sébastien Besson (ex-Antropofago), Dysylumn va peu à peu prendre forme avec notamment l'aide de Robin Lefaure pour les compositions de batterie. Mais c'est surtout la venue d'Olivier Kaah derrière les fûts, fin 2010, qui va donner corps à cette formation et mettre un coup d'accélérateur. D'où la sortie 3 ans plus tard d'un EP éponyme comportant deux titres – ici remaniés – qui donnait un petit aperçu sur les aspirations du duo. Délivrant une musique très atmosphérique influencée à la fois par le black et le death avec quelques touches progressives, l'ensemble était malheureusement grévé par une production trop faible, ne rendant pas grâce aux compostions, un côté assez linéaire ainsi qu'un jeu de batterie pas assez carré. Néanmoins un certain potentiel se dégageait de ces morceaux et de l'ambiance créée par le duo. J'étais donc curieuse de voir leur évolution en écoutant Conceptarium – premier long format – toujours attirée par le visuel très spatial développé par le groupe, avec un artwork réalisé par Tankkore Kreation.
Et dès les premiers titres, l'étonnement fait place pour ne jamais véritablement s'estomper et même s'accroître au fil des minutes. En effet, Dysylumn délaisse quelque peu les sonorités black au profit du death ici, exit donc les vocaux arrachés ainsi que l'aspect « balade interstellaire » auquel vous avez habitué le groupe sur leur EP. L'ensemble se fait plus menaçant et écrasant, notamment sur la première partie de l'album. Le duo prend clairement des risques pour son premier long format avec un côté progressif plus présent ainsi qu'une grosse louchée de technicité. Impossible, à l'écoute de ces compositions, de ne pas penser à Augury et son Concealed – première réalisation avec vocaux féminins que j'ai pu apprécier. Il m'aura donc fallu un peu de temps avant de bien intégrer ce Conceptarium, grandement déconcertée par les sonorités délivrées. Cependant passée la surprise et une fois avoir bien digéré cette œuvre après quelques écoutes, des évidences se font. Les musiciens ont clairement augmenté leur niveau de jeu. Un fait particulièrement notable concernant le batteur Olivier Kaah qui maîtrise beaucoup mieux son instrument et durcit ses frappes. De même la production est cette fois-ci plus massive, vous soufflant d'entrée avec « Vide Spatial » avant de vous faire ployer sur « Cauchemar ».
Certes cela manque quelque peu de dynamisme mais Dysylumn semble vouloir créer des ambiances cauchemardesques et poisseuses digne d'un De Masticatione Mortuorum in Tumulis de Ævangelist. Des touches sombres et occultes viennent d'ailleurs se greffer aux atmosphères cosmiques créant une véritable claustrophobie spatiale. Car la sensation d’étouffement se fait grandement sentir du titre introductif jusqu'à « Esclave Céleste », la formation ne desserrant jamais l'étau et la voix de Sébastien parvenant en échos des tréfonds du cosmos (renvoyant à Paysage D'Hiver ou encore Darkspace). Les nombreux effets et réverbérations ne feront aussi qu'accentuer cette impression, donnant à l'ensemble un aspect puissant mais irréel durant toute la durée de l'album. Néanmoins le côté horrifique va se diluer au gré du temps, le groupe passant de compositions très opaques à d'autres plus variées et mélodiques. Un changement perceptible dès la paire « Conceptarium » qui, remaniée, s'offre une seconde jeunesse, faisant le pont ici entre mort programmée et renaissance miraculeuse. Que ce soit par des lignes de chant plus aériennes – « Conceptarium pt. II » –, des riffs plus lumineux, notamment sur la très belle « Réveil », mais aussi l'ambiance prenant un tour plus éthéré (« Voyage Astral »), le duo amorce une descente toute en finesse.
Dysylumn arrive à capter votre attention de bout en bout en dépit de quelques faiblesses notables telles que des lignes de guitares un peu redondantes (particulièrement dans la première partie de Conceptarium), un « Vide Spatial » peinant à démarrer ou encore une conclusion qui aurait mérité quelques coupes. En effet, la dualité du chant français/anglais, le jeu des deux musiciens montant d'un cran, l'évolution musicale aussi étonnante que risquée ou encore la très bonne construction de l'ensemble font que vous ne pouvez que saluer le travail de la formation. Un premier album des plus encourageants vous offrant un aller simple vers des espaces insondables et mystérieux où vous serez seul face à vos peurs ainsi que vos incertitudes. Une œuvre à la fois sinistre, effrayante et touchante qui invite à l'introspection.
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