Abhorrent - Intransigence
Chronique
Abhorrent Intransigence
L’année 2015 n’aura pas été l’une des plus marquantes en matière de (Brutal) Death Metal Technique. Une tendance à la baisse qui ne fait que se confirmer chaque année après une certaine déferlante pourtant constatée au début des années 2000. Alors que nombreux sont ceux qui attendent fébrilement le retour d’Obscura annoncé pour début 2016, d’autres ont décidé qu’il était grand temps de passer à l’action.
C’est le cas des Américains d’Abhorrent qui n’avaient plus donné signe de vie depuis leur formation en 2007 et la sortie de leur première démo. Originaire de San Antonio au Texas, le groupe se forme autour de Lyle Cooper (ex-The Faceless, Absvrdist) et Marlon Friday (Absvrdist). Il faudra attendre 2014 pour que le groupe se décide enfin à passer à la vitesse supérieure avec l’arrivée au chant de Nick Brown (Absvrdist) et d’un certain Erlend Caspersen (Spawn Of Possession, ex-Deeds Of Flesh, ex-Blood Red Throne) à la basse. De quoi attiser ma curiosité d’autant que leur premier album intitulé Intransigence est sorti sur l’excellent Willowtip Records.
Affichant un peu moins de quarante minutes au compteur, ce premier album d’Abhorrent se révèle particulièrement digeste. D’autant que sur les dix titres proposés par le groupe, deux sont des instrumentaux ("Passage" servant d’introduction et "Clarity Of Will" d’interlude). Une immersion rendue également plus aisée grâce à une technique qui jamais ne prend le pas sur l’efficacité, évitant ainsi l’écueil de ces séquences parfois beaucoup trop démonstratives durant lesquelles l’auditeur finit inéluctablement par se perdre et s’ennuyer. Non, Abhorrent va à l’essentiel (rarement plus de cinq minutes par titre) tout en offrant des morceaux relativement riches et complexes. Un foisonnement de riffs et de structures plus ou moins alambiqués, agencés intelligemment (c’est-à-dire avec beaucoup de cohérence) et permettant ainsi aux compositions d’Abhorrent de faire mouche dès les premières écoutes. Et comme les Américains (plus un Norvégien) ne sont pas de ceux qui en font trop, chaque titre se déroule ainsi avec beaucoup de fluidité et de dynamisme pour faire de ce premier album un disque plutôt éloigné de l’exigence de certains de ses contemporains (Spawn Of Possession en tête).
Se faisant, Abhorrent n’espère pas révolutionner le petit monde du (Brutal) Death Metal Technique mais plutôt montrer que celui-ci est toujours actif et relativement bien portant malgré le nombre toujours aussi ridicule de sorties intéressantes à voir le jour chaque année. Et tant pis pour l’originalité, la fraîcheur et la prise de risque car ce n’est pas ce que propose Intransigence. Non, la recette déployée par l’entité américano-norvégienne reprend dans son cahier des charges l’essentiel de ce que l’on est en droit d’attendre d’un album de cette trempe. De ces blasts soutenus et épileptiques à ces patterns de guitares multiformes en passant par ces lignes de basse expressives et pleines de groove sans oublier ces riffs et ces atmosphères mélodiques, ce growl profond et nerveux ou bien encore ces multiples changements de rythmes, tout y est pour contenter l’amateur d’un genre souvent jugé excessif et imbuvable, froid et mécanique. Pourtant, ce n’est pas vraiment ce qui caractérise Intransigence qui malgré un cahier des charges respecté, se plaît à offrir à ses auditeurs des passages également plus aérés comme par exemple sur le très bon "Ifrit", un titre tout en nuances dont les deux breaks et le solo final viennent apporter un bol d’air frais dans ce Death Metal complexe et tendu tout comme cette mise en avant d’Erlend Caspersen et de son instrument sur "A Lightness Of Mind". On pourrait également évoquer cette accalmie apaisante qu’est l’interlude "Clarity Of Will", l’introduction acoustique sur "Larva" ou bien ces deux dernières minutes presque contemplatives qui viennent clôturer « Parasite » et ainsi mettre un terme à ce premier album... Bref, Abhorrent à plus d’une corde à son arc et fait preuve de plus de subtilités et de nuances qu’il n’y paraît.
A noter que les Texans ont également fait appel à quelques camarades pour des collaborations souvent discrètes mais pas déplaisantes (à défaut d’être mémorables). Trevor Strnad (The Black Dahlia Murder) et Matthew Chalk (Mephistopheles, ex- Psycroptic, ex-Spawn Of Possession) viennent ainsi pousser la chansonnette respectivement sur "The Elegance Of Asymmetry" et "A Lightness Of Mind" alors que Malcolm Pugh (Inferi, Diskreet) et Antonio Ascencio (Serocs) sont quant à eux tous les deux venus gratter quelques riffs sur "Ifrit" et "Ill-Conceived".
Vous l’aurez probablement déjà compris mais Abhorrent n’est pas le groupe qui viendra révolutionner le petit monde du (Brutal) Death Metal Technique. Toujours est-il qu’après huit ans passés à peaufiner les moindres détails de son premier album, le groupe fait en cette année 2015 un retour convaincant à défaut de marquer durablement les esprits. Car si l’exécution du groupe ne souffre d’aucun défaut particulier, la musique d’Abhorrent s’inscrit dans des schémas déjà préétablis qui n’ont rien de nouveaux ni même d’audacieux malgré des bases extrêmement solides et convaincantes. Cela ne doit donc surtout pas vous empêcher de jeter une oreille à Intransigence si, comme beaucoup, vous jugez cette année 2015 particulièrement pauvre en matière de Death Metal Technique. Le groupe a du potentiel qui ne demande qu’à être exploité et peaufiné. A bon entendeur...
| AxGxB 31 Décembre 2015 - 913 lectures |
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