Wrong - Wrong
Chronique
Wrong Wrong
Il y a ces groupes qui galèrent, ceux qui enchaînent les sorties misérables à un rythme chaotique, peinent à faire trois concerts à l’année et surtout n’intéressent strictement aucun label, même ceux les moins recommandables. Et puis il y a ces groupes à qui tout réussit…
Formé à Miami en 2014 sur les cendres du groupe Capsule, Wrong compte dans ses rangs des anciens membres de Torche et Kylesa. Evidemment, partant d’un tel postulat, on se dit - à juste titre d’ailleurs - que certains groupes sont déjà mieux lotis que d’autres. Très vite, Wrong accouche d’un premier EP intitulé Stop Giving. D’abord disponible sous forme dématérialisée (courant 2014), celui-ci est finalement édité en vinyle en fin d’année dernière via le label Robotic Empire (Daughters, Torche, Thou, Red Sparowes...). Entre temps, le groupe débute l’enregistrement d’un premier album éponyme et signe notamment un deal avec l’un des gros patrons du milieu, Relapse Records. De quoi rendre jaloux bien des galériens.
D’autant plus que Wrong à tout bon. Fort de musiciens expérimentés, le groupe maîtrise son sujet dès ce premier EP musclé qui vient jouer en toute décomplexion avec ce sentiment de nostalgie qui nous poursuit nous, ces trentenaires ayant construit une partie de notre culture musicale sur la base d’émissions TV (Best Of Trash, Headbangers Balls...), de films (The Crow, Judgment Night...) et autres vidéos de skate ayant fait la gloire de ces fameuses années 90. Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître…
C’est ainsi du côté de New-York que les Floridiens ont jeté leur dévolu avec un intérêt tout particulier porté à la Noise vicieuse et urbaine d’Unsane ("More Like", "Boil"...) et surtout Helmet qui, à l’écoute de ce premier album, apparaît sans discussion possible comme l’influence la plus évidente. Décomplexé, je vous le disais. Ainsi, les petits gars de Wrong ne se cachent pas et y vont franco dans ce qui s’apparente à un hommage pleinement assumé à Page Hamilton et à son groupe rendu célèbre par les excellents Meantime et Betty. Il n’y a bien que la production beaucoup plus ronflante signée des Pinecrust studios (Torche, Madball...) pour nous rappeler que la musique de Wrong n’est pas issue de ces années 90. Pour le reste, le voyage dans le temps est assuré. Pas besoin de Delorean.
Ainsi, la formule est simple mais respectée ici à la règle. Wrong construit sa Noise sur la base de titres relativement courts ne dépassant qu’à une seule exception près les quatre minutes ("High Chair" en guise de conclusion plus modérée). Pour le reste, les Américains taillent dans le gras avec une aisance tout à fait insolente. Certes, on repassera pour ce qui est de l’originalité mais alors niveau efficacité brute, Wrong n’a rien à envier à ses maîtres à penser. Outre ces riffs nerveux et abrasifs qui ont marqué de leurs empruntes la carrière de ces deux groupes new-yorkais évoqués un peu plus haut, on retrouve chez Wrong ce même sens bien particulier de la mélodie rugueuse. Comme chez Helmet, cela se traduit par ces espèces de soli plus ou moins dissonants et plus ou moins diffus ("Turn In" à 2:10, "Humdrum" à 0:51, "Stasis" à 1:50, "Mucilage" à 0:36, "Boil" à 1:53 et ainsi de suite) qui trouvent généralement place derrière un riff principal souvent répété à outrance (heureusement les morceaux sont courts) mais également à travers des titres tout simplement plus "faciles" à l’image des sympathiques (mais tout de même moins percutants) "Entourage" ou "High Chair". De la même manière, cette rythmique bien marquée/hachurée/saccadée/répétée fait également référence à ce même savoir-faire. Ainsi associée à ces lignes de basse tout en vivacité et en rondeur, la Noise de Wrong fait instantanément mouche grâce à un groove et une énergie implacable et à la fois irrésistible. Et non, ce n’est pas la nostalgie de ces années perdues qui me fait aujourd’hui m’exprimer avec autant d’enthousiasme. C’est tout simplement le fait que ce premier album des Américains n’est ni plus ni moins qu’une petite pépite de Noise alliant la lourdeur d’une production moderne à la nervosité de compositions tournée au vitriol. Un album qui fait énormément de bien après les déceptions engendrées par les derniers albums en date de Pigs (un peu) ou Unsane (beaucoup).
Tous ceux qui, dans les années 90/2000, n’ont juré que par le label Amphetamine Reptile, tous ceux qui se sont passés en boucle le clip de "Milquetoast" sur les images du film The Crow ou ont eu un mal de chien rien qu’en visionnant celui de "Scrape" d’Unsane diffusés à l’époque tous les deux sur M6, tous ceux qui s’enthousiasment à l’écoute des albums de Pigs, tous ces gens-là ne peuvent décemment pas passer à côté d’une telle sortie. Il y en aura bien quelques-uns pour venir pleurer sur le fait que Wrong ne fait que reprendre à sa solde ce qui a déjà été fait par d’autre. Et bien tant pis pour eux, ils passeront à côté de l’un des meilleurs albums du genre sorti cette année. Pour ma part, je dis bien joué messieurs.
| AxGxB 13 Avril 2016 - 813 lectures |
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