Wederganger - Halfvergaan Ontwaakt
Chronique
Wederganger Halfvergaan Ontwaakt
Parmi les sorties de 2015, voici un disque sur lequel il me semblait difficile de faire l’impasse. Il s’agit du premier album des Néerlandais de Wederganger. Si comme moi, vous ne pratiquez pas une once de néerlandais, sachez que ce nom fait référence aux morts-vivants, ceux qui se relèvent et marchent après la mort. Et si ce thème a déjà été abordé à maintes et maintes reprises par le passé (notamment dans le Death Metal), il est pourtant l’un des principaux sujets abordés ici par la jeune formation néerlandaise au même titre que la mythologie allemande ou le folklore de la région dont elle est issue (la Gueldre).
Etabli sur la base d’un trio, le groupe voit le jour à Arnhem en 2012. Formation quelque peu atypique, Wederganger compte dans ses rangs deux chanteurs et un guitariste. Les autres instruments sont assurés par des musiciens de session. Après une démo deux titres parue en 2014, le groupe poursuit l’année suivante avec la sortie sur Ván Records de ce premier album dont il est question aujourd’hui. Gage de qualité évident (Urfaust, Almyrkvi, The Ruins Of Beverast, Fyrnask...), je passe pourtant complètement à côté de ce disque jusqu’à ce que ma curiosité, piquée au vif par cet excellent logo ainsi que cet artwork signé Karmazid, finisse par me rattraper il y a de cela quelques semaines seulement.
Tout d’abord, et comme on pouvait s’y attendre avec le label allemand, l’objet est des plus plaisants. L’album se présente ainsi sous la forme d’un épais digipack à deux volets à l’intérieur duquel on trouve le CD disposé dans un fourreau noir ainsi qu’un livret, collé au second volet et dans lequel figure les paroles du groupe (en néerlandais) ainsi que quelques chouettes illustrations signées par Karmazid. A l’extérieur, l’artwork et le logo sont frappés dans un lettrage argenté. Un bel objet qui invite naturellement à l’écoute.
D’un point de vue strictement musical, l’album est aussi plaisant que ce digipack qui lui sert d’écrin. Car même si Wederganger ne révolutionnera pas le petit monde du Black Metal, Halfvergaan Ontwaakt met en avant un groupe à la personnalité très forte qui n’a pas peur de sortir des sentiers battus et de proposer quelque chose d’assez original et suffisamment marqué en termes d’identité pour se distinguer du reste de la masse.
A la manière d’un Urfaust, il y a chez Wederganger ce côté ritualiste et obsessionnel qui prend forme ici à travers de longues séquences mid-tempo souvent assez répétitives ("Dwaallichtbezwering", "Dodendans", la première minute de "Wera-Wulfa" répétée par la suite, "Vlammenvonnis" et ses sonorités apaisées...), un riffing mélodique très personnel (ces petits leads ultra entêtant sur "Dwaallichtbezwering", ceux plus discrets mais aussi plus froids de " Dodendans"...) ainsi que l’utilisation d’une voix claire/mélodique aux tonalités quasi-religieuses voir prophétiques. Alors certes, le rythme n’est pas forcément toujours des plus soutenus mais ces passages, en plus de trancher très nettement avec les quelques accélérations qui ponctuent tout de même chaque composition (ou presque), viennent surtout apporter une atmosphère très personnelle à l’ensemble. Ainsi, le groupe raconte à chaque fois une histoire, celle d’un autre-temps (à l’image de cet interlude piano-bar horrifico-gothique du siècle dernier ("Schimmenspel"), et cela s’entend dans la façon qu’il a de mettre sa pensée en musique.
A l’inverse, Wederganger sait également prendre le contre-pied de ces moments hypnotiques avec des passages souvent plus courts mais menés avec une énergie et une rage incroyable ("Dwaallichtbezwering" à 2:15, "Gelserde Drek" à 2:34, "Vlammenvonnis" à 3:58, la conclusion de "Dodendans"). A ce titre, la dernière minute de "Wera-Wulfa" est tout simplement excellente. Après une séquence aussi subtile qu’hypnotique, Wederganger va prendre l’auditeur par surprise à grand coup de blasts ininterrompus et d’échanges vocaux partagés entre cette voix Black arrachée et ultra vindicative et ce chant mélodique beaucoup plus théâtral. C’est d’ailleurs grâce à cette dualité vocale et à ce choix de chanter en néerlandais que le groupe tire en partie son épingle du jeu. Car si la voix abrasive et sombre, malgré la haine et la rage qu’elle véhicule, n’a rien de très originale, l’usage de cette deuxième voix bien plus mélodique mais aussi plus grandiloquente (dans le bon sens du terme) et imposante (car ce côté profond et assez guttural) ajoute indubitablement du caractère et de la personnalité au Black Metal de Wederganger.
Si le Black Metal avait existé à la fin du 19ème siècle ou au début du 20ème, Wederganger aurait sûrement été l’un de ses meilleurs représentants. Il y a en effet un je ne sais quoi dans l’usage qui est fait de la voix mélodique (usée ici avec parcimonie) qui vient rappeler cette époque sophistiquée où être mal fagoté était encore synonyme de porter un costard trois pièces. Avec Halfvergaan Ontwaakt, Wederganger réalise une entrée en matière particulièrement convaincante qui saura très certainement séduire les amateurs de Black Metal quelque peu atypique et davantage portés sur l’atmosphère et les mid-tempos plutôt que sur les brûlots menés pied au plancher du début à la fin. La suite a d’ailleurs déjà été concrétisée avec la sortie d’un split deux titres en compagnie de ses compatriotes de Laster. Comme quoi, on peut encore se faire surprendre en 2016 avec un disque de Black Metal.
| AxGxB 25 Juillet 2016 - 1424 lectures |
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