Non content d'avoir chamboulé une bonne partie des sorties Black Metal de l'année 2016, et votre serviteur au passage, voila qu'Iskandr remet le couvert, toujours sans prévenir, pour "Zon". Court EP d'une petite vingtaine de minutes qui se veut à la fois être un appendice au fantastique
"Heilig Land", chroniqué dans ces pages, et un aperçu du futur du one-man band de Nijmegen. Et il fallait se lever tôt pour espérer mettre la main sur une copie physique : désireuse de cultiver l'anonymat et l'aura de mystère entourant le projet, l'écurie Haeresis Noviomagi aura pressé 55 exemplaires de la présente cassette, sold-out en quelques heures. Un vrai trésor caché, n'est-ce pas ? Fort dommage que les pépites noires les plus convaincantes de cette année soient aussi confidentielles...
Quoiqu'il en soit, celui qui aura apprécié l'univers aussi hermétique que religieux du premier méfait d'O. goûtera sans peine ces deux nouveaux titres, puisqu'ils reprennent la même formule : des compositions longues, dépouillées, dotées d'une production juste ce qu'il faut d'âpre pour distiller cette atmosphère de marche pénitente entre les ruines. L'ambiance est tellement brumeuse qu'on se demanderait presque où se cache l'astre qui donne son nom à l'EP. "De Hitte" agit en écho direct de "Wolfskuil", s'ouvrant sur une guitare lointaine, presque lumineuse, enchainant sur un blast aussi carré qu'efficace. Les couches de cordes se superposent, cimentées par cette basse au son chaud, montant et descendant les tons, alors que le frontman s'égosille sans discontinuer, sa voix déchirée finissant d'opacifier le titre. L'effet "rituel" atteint son pic en milieu de titre, par ces percussions saccadées sur les toms, cet organe qui se répand en un sabir aussi incompréhensible que sentencieux. "De Beelden", lui, est nettement plus calme, plus contemplatif. Plus triste, aussi, la voix d'écorché prenant presque le pas sur l'instrumentation, plus effacée qu'auparavant. Les guitares et la basse se calquent sur la rythmique lourde des fûts, le charley malmené figurant le brouillard qui nous enveloppe. L'atmosphère funèbre se mue pourtant, dès la seconde moitié du titre, en quelque chose de presque plus léger : la guitare se perd dans les aigus, suivie par la batterie qui alterne entre les cymbales et la ride, perçante comme jamais. Le titre se termine sur une basse sonnant froidement les temps, avec la régularité d'un clocher de village.
"Zon" fonctionne, tout comme son aîné. O. exécute son Black Metal de la même façon, entre parties brutes et errances plus mélancoliques. Les sentiments procurés à l'auditeur restent également les mêmes : pour peu que l'on soit réceptif à ce type d’œuvre, propice à l'introspection, aucune difficulté à s'imprégner du ton de l'objet - et d'y retourner plusieurs fois, la courte durée possédant un irrésistible goût de
"Reviens-y". Deux titres tout aussi convaincant que le premier long-format d'Iskandr, et qui auraient pu, sans aucun mal, se greffer à ce dernier. Bref, le one-man band des Pays-Bas aura accouché de deux objets aussi travaillés que prenants, qui, tout deux, figureront en bonne place lorsque viendra l'heure du bilan. Rien que la performance mérite d'être saluée !
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