Draugsól - Volaða Land
Chronique
Draugsól Volaða Land
L’Islande est un pays à la fois étonnant et fascinant malgré sa faible population et son éloignement géographique, car après une quasi-banqueroute en 2008 il a réussi à se redresser tout seul tout en maintenant sa spécificité et en voyant ses habitants s’illustrer dans de nombreux domaines littéraires et sportifs. Depuis de nombreuses années on ne compte plus les polars au succès international signés Arnaldur Indriðason, Árni Þórarinsson, et Jón Hallur Stefánsson, ainsi que résultats de leurs équipes de football, basket et handball régulièrement présentes dans les différents championnats d’Europe voir même mondiaux pour cette dernière discipline. Si tout cela participe au rayonnement de l’ancienne colonie Danoise, il y’a un autre domaine où ses habitants se surpassent c’est dans celui de la musique, car depuis la fin des années 80 et le succès de THE SUGARCUBES celle-ci se distingue par sa touche typiquement locale dans tous les styles possibles. Si Björk et son ancien groupe ont ouvert la voie elle a été depuis rejointe par SIGUR ROS, Emilíana Torrini, Ásgeir, ou récemment KALEO, ainsi que par une nuée incroyable de formations metalliques. Si SOLSTAFIR a été pendant longtemps sa tête de gondole, on a vu apparaître ces derniers temps une scène noire particulièrement intéressante, personnelle, prenante et addictive, où la furie sonore inspirée des volcans se mélange à merveille avec le côté neigeux des glaciers et le vent omniprésent comme chez NAÐRA, MISÞYRMING, SVARTIDAUÐI, et SINMARA dont les opus respectifs ont été unanimement salués. Pourtant alors qu’on pourrait penser que le filon serait en train de se tarir voilà que déboule de la capitale la plus septentrionale au monde ce trio (ou quintet si l’on compte les deux membres de session) qui va faire parler de lui autant que ces compatriotes précités, tout en continuant dans la voie tracée par ses prédécesseurs et en y apportant une personnalité différente.
Car durant un peu plus d’une demi-heure le combo va nous emmener vers des sphères plus Progressives et Atmosphériques, n’hésitant pas à lorgner du côté d’ENSLAVED pour le côté plus éthéré, même si ça va tabasser sec la majorité du temps. Après une introduction où larsens et tribalité se mélangent place à « Formæling » qui pendant presque neuf minutes va alterner entre blasts déchaînés et passages plus techniques sur les parties lentes, dont le tout est mis en avant via un batteur dont le jeu tout en cassures surprend au départ (ainsi que par un solo très aérien qui amène de la mélodie) dans ce mur sonore qui peut paraître impénétrable. Cela peut paraître le cas au début mais au fur et à mesure on se laisse happer par cette ambiance brumeuse, venteuse et chaotique voulue par les gars, et qui se révèle être une véritable ode à leur île de naissance. Ce premier excellent morceau d’une grande noirceur n’est jamais dur à digérer malgré sa longueur, tant les ponts entre les différents moments sont parfaitement bien en place et ne tombent jamais à plat, même si lors de la première écoute on pourrait croire que l’ensemble est bancal tant il change souvent, à l’instar encore une fois encore du climat de leur pays, de sa nature et de son imprévisibilité. Le même schéma est repris sur « Bót Eður Viðsjá Við Illu Aðkasti » qui outre une durée similaire se fait tout aussi glacial et massif, pourtant les Scandinaves vont pousser l’expérience plus loin en y ajoutant plus de mélodie, notamment via un break morbide où la guitare se fait plus plaintive et mélancolique, comme pour mieux souligner le feu et la glace, le calme et le renouveau après une forte éruption volcanique.
Après tout ce déchaînement des éléments de longue durée le ciel se dégage quand arrive « Spáfarir Og Útisetur », puisqu’ici le soleil semble vouloir reprendre possession des lieux et la lumière se fait plus importante, notamment grâce à un début acoustique doux et féérique, mais l’orage n’est jamais bien loin car l’électricité fait vite son retour en proposant des montées de rythmes et du mid-tempo écrasant où le chant se fait encore plus possédé et écorché, comme pour dire que l’amélioration sera de courte durée et que les ténèbres ne sont jamais très loin. « Váboðans Vals » s’inscrit lui-aussi dans la lignée de son prédécesseur, en y ajoutant un soupçon de diversité supplémentaire et un solo tout en finesse et magnifiquement exécuté, où là-encore on reste scotché par l’inventivité et la technique de ses créateurs. Histoire de terminer en beauté, quoi de mieux que d’aller se balader sur le glacier Vatnajökull, cela semble être le mot d’ordre de « Holdleysa » tant ici la glace est présente via ses riffs cassants et son atmosphère proche de la tempête. Puis plus on avance dans la nuit ténébreuse et plus on se rapproche du site volcanique de Dimmuborgir (qui selon la légende est une porte d’entrée vers les enfers), mais pour brouiller les pistes une voix presque religieuse s’invite en arrière-plan comme pour indiquer à l’auditeur de fuir l’endroit et de ne pas céder à la tentation du mal, car des notes de guitare sèche résonnent dans le brouillard afin d’indiquer que le retour du jour et du soleil ne sont jamais très loin. Avec cette ultime compo on atteint le sommet et point culminant de ce disque (comme celui de l’île nommé le Hvannadalshnjúkur et ses 2109 mètres), qui se révèle être comme une ascension montagneuse où la beauté se fait de plus en plus intense où l’on passe par tous les états, et où tous les sens sont mis à contribution.
C’est exactement cela que nous font vivre ses trois Islandais inconnus au bataillon jusqu’à présent (et qui ne vont logiquement plus le rester longtemps), car avec une qualité d’écriture et une tessiture musicale assez incroyable (mise en avant par un côté très brut où la réverb’ est mise à contribution) et surtout sans claviers, on retrouve ce qui fait le charme et le talent des aînés de ce pays qui ne cesse plus d’étonner. Avec cette énorme surprise et cette bande-son parfaite pour voyager à pied ou en 4x4 dans les hautes terres (Hálendið), DRAUGSOL se révèle impressionnant de maîtrise et de maturité avec cette galette qui passe à toute allure et demandera un grand nombre d’écoutes attentives pour en saisir toute la subtilité, ainsi que chaque détail qui se cache un peu partout … ce qui atténuera la déception relative qu’elle soit un peu trop courte au niveau de sa durée générale, mais c’est ce qui fait paradoxalement sa réussite vu qu’il n’y a aucune faiblesse à signaler, de la première à la dernière seconde.
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