Quand on sort avec les moyens du bord un premier album de la trempe de
Chemical Exposure, on est en droit de s’attendre à voir débarquer quelques labels intéressés à l’idée de vous ajouter à leurs rosters. Ayant réussi à se tailler une solide réputation grâce à ce premier album particulièrement impressionnant, notamment pour la véhémence de son propos et l’extrême urgence qui s’en dégage, il faudra pourtant que Sadus attende la sortie de sa troisième démo intitulée
The Wake Of Severity pour se voir enfin proposer un contrat avec R/C Records, sous-division de Roadracer Records, elle-même sous-division de Roadrunner Records. Un deal évidemment bien mérité qui va permettre aux Californiens de gagner en exposition et en popularité dans un genre ayant pourtant déjà entamé sa lente déliquescence.
Sortie à la fin de l’été 1990,
Swallowed In Black va effectivement mettre Sadus sous les feux de la rampe grâce à une formule qui n’a pas changé d’un iota (même si elle s’est peut-être sensiblement affinée) ainsi qu’à un artwork signé Alvin Petty (on lui doit notamment les illustrations du single "Creeping Death" de Metallica ou l’album
No Escape de Hexx) qui, gamin, m’avait particulièrement plu.
Après un premier essai vraisemblablement concluant, Sadus va donc reprendre le chemin des Fantasy Studios de Berkeley pour travailler à nouveau sous la houlette de Michael Rosen, un producteur bien connu des thrashers de la Bay Area pour ses collaborations avec Death Angel, Flotsam And Jetsam, Testament ou bien encore Forbidden. Le résultat, s’il n’est pas foncièrement différent de ce que l’on peut trouver sur
Illusions (une production explosive et sans artifice où brille notamment une basse particulièrement expressive), montre tout de même quelques évolutions significatives. Moins foutraque, un poil plus contenue et mesurée (sans pour autant perdre de ce panache qui caractérise le Thrash de Sadus) et finalement mieux équilibrée, la production de monsieur Rosen conserve effectivement certaines spécificités du passé (notamment cette intensité débordante) sans pour autant sacrifier ni à l’efficacité ni à l’urgence générale qui faisait de son prédécesseur un premier album des plus redoutables.
A l’image de cette production sensiblement plus "aboutie" et "professionnelle", Sadus va faire preuve de la même rigueur en termes d’écriture et de composition. Là où son prédécesseur "souffrait" d’un certain manque de compréhension, en grande partie à cause de riffs et d’idées relativement compliquées à assimiler, on sent sur ce
Swallowed In Black que des efforts ont été fait afin de corriger ce point et ainsi rendre l’écoute plus mémorable. Dès lors, même si ces onze nouvelles compositions demeurent toujours relativement difficiles à appréhender (n’espérez pas en faire le tour en une seule écoute), il semble désormais plus facile de s’accrocher à un riff ou à une séquence, chose qui était alors quasiment impossible sur son prédécesseur. Paradoxalement, le groupe commence également à montrer de plus grandes velléités techniques qui vont se manifester ici à travers un jeu encore plus affûté que par le passé (cette basse toujours aussi délicieuse et presque décourageante qui ne cesse de frétiller, ces "stop & go", ralentissements et autres changements de rythmes impromptus taillés pour se rompre les cervicales, ces riffs nerveux et particulièrement rapides tricotés avec brio et dextérité par le duo Darren Travis/Rob Moore, ces solos chaotico-mélodiques furieux...). Tout un tas de petites évolutions/progressions qui vont se traduire dans les faits par des morceaux plus longs. Là où
Illusions approchait de la demi-heure du haut de ses dix titres,
Swallowed In Black frise quant à lui les trois quart d’heure avec seulement un titre supplémentaire. Un constat sans appel pour groupe toujours peu enclin à se perdre en tergiversassions inutiles...
Car comme on l’a vu, c’est toujours tête baissée et pied au plancher que Sadus mène ses attaques. Et si le groupe n’est pas avare en séquences plus modérées, c’est simplement pour mieux souligner son propos et offrir à l’auditeur l’opportunité de reprendre son souffle. Sorti la même année que les redoutables
Spectrum Of Death et
Tortured Existence,
Swallowed In Black perpétue cette tradition de l’agression constante débutée avec
Illusions. La seule différence, est qu’elle est ici servie avec quelques atours plus soignés grâce à une maîtrise perfectionnée. Pour le reste, on retrouve le Sadus impitoyable des débuts, celui qui cogne dur et n’a de cesse de cavaler dans tous les sens en criant à tue-tête de cette voix arrachée et vindicative. Une leçon de violence en onze punitions auditives menées avec un talent et une insolence certaine.
Ayant affiné leur style et leur jeu, les Californiens accouchent ici d’un deuxième album naturellement plus abouti que son prédécesseur. S’il conserve cependant tout ce qui faisait le sel de ce dernier (efficacité, intensité, explosivité...), il en corrige son principal défaut (ce souci de compréhension lié à des riffs et des structures quelque peu hermétiques) tout en y apportant une dimension encore plus impactante (cette production davantage soignée, ces compositions plus fouillées et techniques ainsi que ces riffs et structures plus évidentes). Rien d’étonnant alors à ce que
Swallowed In Black soit considéré par beaucoup comme le meilleur album de Sadus et plus globalement comme l’un des albums de Thrash (presque Death) les plus virulents et agressifs du genre.
5 COMMENTAIRE(S)
28/02/2020 07:34
Merci
27/02/2020 14:38
26/02/2020 21:28
26/02/2020 14:00
26/02/2020 11:51