Iperyt et moi, c'est une passion torride, sans aucune cervelle. Composée d'éminences grises de la scène polonaise (Infernal War, Decline, Morowe), la formation s'est faite spécialiste du crime auditif, de la gratuité pure et simple, celle-là même qui vous botte un cul et part sans se retourner.
"Totalitarian Love Pulse", cri d'amour à la grosse industrie et cri de haine bestiale à la face du monde moderne, m'avait déjà correctement secoué les puces : Onze titres sans temps mort, l'ensemble se vautrant dans un Black Metal Industriel à la croisée du Speedcore et du Cybergrind, efficace et clinique en diable, et sans la moindre once d'intelligence : le
berzerker ultime, quoi.
Et puis il y a eu
"No State of Grace", encore plus rapide, plus vide, plus long que son grand frère - il fallait le faire. Efficacité polonaise oblige, l'ensemble était couronné d'une pochette laide comme jamais, probablement torchée par un stagiaire en deux-deux. Du mauvais goût qui se savoure honteusement, presque planqué, de peur de se faire prendre le doigt encore planté dans le pot de confiture. Pensez bien que l'annonce de
"The Patchwork Gehinnom", l'année dernière, avait aiguisé mon appétit, fiévreux que j'étais de repasser sous les chenilles du PL-01. Annonce couronnée de deux gages de qualité : une sortie chez Pagan Records, historique écurie du pays, et un mixage confié à Nihil, chanteur et tête pensante des fantastiques Furia.
My body is ready.
Depuis la sortie du disque, je vois, un peu partout, les retours mitigés de mes collègues. Pas assez rapide, pas assez méchant, trop fouillé, trop bordélique, trop bruyant... Les superlatifs sont nombreux, quasi-systématiquement péjoratifs, et j'avoue ne pas bien comprendre. Nom de nom, ne constatez vous pas qu'Iperyt développe, sur ce disque, ce qui lui a toujours manqué pour devenir plus qu'un simple plaisir coupable ? Ne parvenez vous pas à sentir cette ambiance de fin du monde imminente, cette odeur de rouille, de sang, planquée derrière les nappes de bruit et la boîte à rythme plus grasse que jamais ? Cet hybride bâtard, boiteux, qui pioche aussi bien du côté de The Amenta que Mysticum, est, à mon sens, la copie finale rendue possible par deux excellents brouillons, qui font accéder Iperyt au statut d'élève brillant.
Sans jamais abandonner sa vélocité, son gage d'efficacité, le groupe apporte de la matière à ses compositions, y infusant des nappes Noise et Indus qui garnissent des titres coups de poing. C'est moins gratuit, certes, mais toujours aussi jouissif. De l'entrée en matière "Phantom Black Dogs" et sa boîte à rythme métallique qui alterne le blast-beat tête baissée et le mid-tempo ravageur en fin de morceau, jusqu'aux percussions presque tribales d'un "From Nowhere to Nowhere", Iperyt étoffe son jeu. Ne laisse pas non plus de côté les titres "hymne" aux cadences plus lentes mais bien plus propices aux déboîtements de nuques ("What Man Creates", "These Walls (Have Seen)"), qui rappellent à notre bon souvenir les images de
free party démoniaque créées par ses aînés (notamment le fameux " Abuse You Fucking Christ ", irrésistiblement débile). Quid du chant ? A l'image du dernier album d'Infernal War,
"Axiom", la participation de Warcrimer se fait plus naturelle, timbre beuglard qui peine à se faire entendre derrière le bruit des machines plutôt que voix inhumaine masquée sous des dizaines de filtres. Rebutant ? C'est peut-être bien le but recherché - la seule trace d'humanité de la musique d'Iperyt se retrouve écrasée par les pédales d'effet des guitares, le fuzz quasi permanent, et cette boîte à rythme sans aucune chaleur.
Une impression renforcée par la production signée par Nihil, un son presque brouillon, même si l'on sent le détail apporté aux arrangements qui percent parfois le maelstrom (la sirène Techno de "Mindtaker", qui fait immanquablement tiquer). C'est gras, boueux, loin de la caisse claire sèche de
"Totalitarian Love Pulse", il vous faudra plonger les mains dans le moteur pour pouvoir les dénicher. Ce qui rend
"The Patchwork Gehinnom" finalement assez exigeant, là ou ses grands frères se savouraient sans trop forcer : juste à tendre la joue et attendre le poing lancé à grande vitesse.
Vous l'aurez compris, le déluge qu'est
"The Patchwork Gehinnom", sans être plus intelligent, se fait immensément plus menaçant qu'auparavant - certains titres n'auraient d'ailleurs pas fait tâche dans l'un de ces films d'anticipation post-apocalyptiques flingués qui inondent les bacs des
Cash Converters. Un beau pot-pourri de riffs, de rythmiques saccadées et de samples balancés à la tronche de l'auditeur, qui pourtant, reste étonnamment cohérent, aussi bien en tant qu'album que dans la discographie du combo. Bref, un obus façonné pour détruire et intimider, et une excellente surprise pour ceux qui s'attendaient à retrouver Iperyt là ou nous l'avions laissé.
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