Je n’apprends rien à personne, en tout cas pas aux amateurs de la formation qui l’ont probablement eux-même déjà constaté depuis belle lurette, mais les débuts de Marduk sont ici très mal documentés. Hormis la chronique de l’album
Those Of The Unlight parue sur Osmose Productions en 1993 (chronique qui au passage mériterait grandement d’être revue et corrigée), on ne trouve absolument rien de la discographie des Suédois jusqu’à
Panzer Division Marduk. Si ce manquement n’est la faute de personne, il était quand même temps que l’un d’entre nous s’y colle et tente de faire la lumière sur cette partie de la discographie de Marduk qui a grandement marqué le Black Metal des années 90.
Originaire de Norrköping, le groupe suédois voit le jour en 1990 sous l’impulsion du guitariste Patrik Niclas Morgan Håkansson. Celui-ci est rapidement rejoint par Andreas Axelsson de Edge Of Sanity, Dan Everth Magnus Andersson d’Allegiance, Joakim Götberg de Darkified et enfin Åke Rickard Kalm au curriculum-vitae beaucoup moins ronflant. Après quelques mois nécessaires à la composition de ses premiers morceaux, la jeune formation qui tire son nom d’une divinité babylonienne sort en juin 1991 sa toute première démo dont le titre d’une sobriété toute juvénile (
Fuck Me Jesus) continue encore aujourd’hui de hanter les oreilles les plus chastes (même s’il est à noter que l’artwork était alors bien moins subversif que celui de la réédition proposée quelques années plus tard par Osmose Productions). Évidemment loin d’être passée totalement inaperçue, cette première démo va offrir à Marduk l’opportunité de signer un contrat avec le jeune label No Fashion Records pour la sortie en décembre 1992 de son premier album intitulé
Dark Endless.
Disque évidemment un petit peu à part dans la discographie des Suédois,
Dark Endless se distingue en premier lieu par son artwork mystérieux et captivant réalisé par Daniel Vala, artiste particulièrement discret (seulement quelques illustrations à son actif recensées sur Metal Archives depuis 1992) mais également musicien chez les vétérans d’Obscurity. Il signe ici une oeuvre surréaliste qui tranche de manière assez significative avec ces imageries médiévales, blasphématoires, sexuelles et militaires auxquelles va choisir d’adhérer Marduk par la suite. Mais surtout
Dark Endless est un album marqué par une véritable ambivalence, celle d’un groupe très jeune qui, quelque part entre Death Metal et Black Metal, cherche encore son chemin. En effet, à l’image d’un Darkthrone, d’un Immortal (avec Amputation) ou d’un Enslaved (avec Phobia), les débuts de Marduk ne sont pas à placer dans la case "Black Metal" pur jus mais plutôt du côté d’un Black / Death sauvage faisant écho à celui d’autres formations suédoises un peu plus anciennes telles que Grotesque, Morbid ou Treblinka.
Passé ainsi cette introduction angoissante mais aussi passablement irritante notamment à cause de ces cordes désaccordées et grinçantes qui viennent nous hérisser le poil et vous faire grincer des dents, on va retrouver chez Marduk une intensité et une urgence relativement similaires à celles de ces quelques compatriotes évoqués un petit peu plus haut ainsi qu’une furieuse envie de cracher là aussi sur le christianisme et tout ce que cette religion représente. Mais si les accélérations thrashisantes menées tête dans le guidon (les premières secondes de "Still Fucking Dead (Here's No Peace)", "Within The Abyss" à 0:33 et 1:14, "The Funeral Seemed To Be Endless" à 0:59, "Departure From The Mortals" à 0:59 et 1:21...) et les séquences plus soutenues ("Still Fucking Dead (Here's No Peace)" à 1:03, l’entame en fanfare de "The Sun Turns Black As Night", "Within The Abyss" à 2:02, "The Funeral Seemed To Be Endless" à 0:05, "The Black" à 0:34...) ne manquent pas tout au long de ces trente petites minutes, on note quand même chez le groupe de Patrik Niclas Morgan Håkansson un goût déjà particulièrement prononcé pour les passages mid-tempo plus modérés ("The Sun Turns Black As Night" à 0:44, "Within The Abyss" à 0:43 et 1:24, "The Funeral Seemed To Be Endless" à 1:45, "Dark Endless" jusqu’à 1:29, la première et dernière partie de « Holy Inquisition »). Une manière pour Marduk de cultiver une atmosphère beaucoup plus pesante tout en conservant cette aura menaçante et profondément blasphématoire mais également de varier les plaisirs afin d’éviter une certaine redondance dans son propos.
Bien évidement
Dark Endless n’est pas non plus exempt de défauts. Groupe encore jeune évoluant qui plus est entre deux eaux, Marduk propose tout au long de son premier album une formule certes efficace mais parfois encore un peu verte. En effet, outre la simplicité ou le caractère parfois un petit peu redondant de certaines séquences, on note également quelques riffs et passages parfois un petit peu moins convaincants. Rien qui ne fasse grincer des dents ni ne donne envie de remiser cet album aux oubliettes mais forcément certains passages trahissent le relatif manque d’expérience des jeunes Suédois (le riff principal de "Still Fucking Dead (Here's No Peace)" ou bien encore ce break entamé à 0:47, la mélodie un peu simplette dispensée sur le break de "The Sun Turns Black As Night" à 0:46, l’accélération guillerette sur "The Funeral Seemed To Be Endless" à 0:58, le riff très simple entamé sur "Holy Inquisition" à 2:48...).
Malgré ces quelques griefs,
Dark Endless reste un premier jet particulièrement solide pour l’époque. Certes, Marduk à encore un petit peu le cul entre deux chaises, certes quelques passages ont aujourd’hui pris un peu de plomb dans l’aile et trahissent en effet le jeune âge de la formation et son relatif manque d’expérience (car ça joue quand même déjà très bien pour l’époque), certes tout n’y est pas parfait. Pour autant, l’intensité, la rage et le relief dispensés ici par Marduk suffisent à compenser ces quelques défauts et à faire de ce premier album une réussite des plus encourageantes pour la suite. Une suite qui, on le sait, va marquer au fer rouge la scène Black Metal dans son ensemble et faire de Marduk l’un des groupes les plus emblématiques du genre et cela encore aujourd’hui près de trente ans après la sortie de ce premier essai.
Par gulo gulo
Par AxGxB
Par Jean-Clint
Par Raziel
Par Sosthène
Par Keyser
Par Keyser
Par Lestat
Par Lestat
Par Sosthène
Par Sosthène
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par AxGxB
Par Deathrash
Par Sikoo