A quelques exceptions près, j’ai tendance à critiquer l’immobilisme chez un groupe, en particulier quand son style de départ ne me donne pas forcément envie de l’entendre encore et encore. Je pense à ces projets dont les albums font dire « J’en ai déjà un comme ça », phrase qui souvent se termine par « ...inutile d’en avoir un autre ».
Mais bien qu’il tombe dans cette catégorie,
Realm of Ash and Blood m’embête. Il m’embête car l’envie d’inviter à l’écouter est la plus forte. Le groupe n’a clairement pas varié d’un iota son style depuis son précédent longue-durée,
No King Reigns Eternal paru en 2016. Au point d’avoir été tenté de faire un copier-coller de ma chronique de l’époque ! Toujours inscrit dans un doom / death metal finlandais bien dans les clous, les descriptifs que j’avais employé à l’époque parlant de Krypts, de Hooded Menace, de grognements putrides ou encore « de riffs faisant hocher la tête et leads gardant toujours une part mélodique dans leur envie de personnifier le chaos » restent d’actualité pour la formation. Un changement de label (passant du réputé Doomentia au tout aussi estimable 20 Buck Spin), une illustration plus colorée signée Adam Burke ainsi qu’un changement de guitariste (Aleksi Luukka remplaçant Sami Iivonen) sont ici les seuls véritables chamboulements dans la carrière des Finlandais.
Pourtant, l’efficacité dont fait preuve Solothus sur
Realm of Ash and Blood est si redoutable que l’on se prend rapidement au jeu. Bourré d’instants où la tête ne peut que bouger (argh, cette accélération jouissive sur « The Watcher »), il réserve également son lot de moments poignants (l’interlude « Last Breath » ; les passages atmosphériques de « Father of Sickness » et « A Rain of Ash »), le tout pratiqué avec une maîtrise qui ne s’affiche pas outre-mesure, modeste et tranquillement implacable (« The Gallows’ Promise », où les belles lignes de guitares se déroulent sans appuyer, comme un trésor à trouver pour qui osera le chercher). La forme reste ici au service du fond, les Finlandais demeurant fidèles à l’ambiance austère et rustre, très dark fantasy, qu’ils aiment transmettre depuis leur démo
Ritual of the Horned Skull. Des odeurs pestilentielles de magie noire, des visions de combats barbares, qu’ils partagent parfaitement le long de ces quarante-trois minutes.
Un vrai cas de conscience, donc. Certainement, les amateurs du genre auront toutes les raisons du monde de se jeter sur cet album, trouvant même ici ou là quelques nuances (provenant essentiellement d’une production un poil plus claire et ample qu’auparavant, gagnant en lisibilité ce qu’elle perd en lourdeur). Enfin, si quelques flottements se font sentir (« Below Black Waters », titre moins inspiré que ses frères), la barre est si bien tenue durant presque trois quarts d’heure qu’il est impossible de trouver le temps long en la compagnie de ce disque. Pour ma part, si la crudité de la démo
Ritual of the Horned Skull et l’accomplissement
No King Reigns Eternal conservent mes faveurs, j’avoue m’être fait prendre par surprise par
Realm of Ash and Blood. Solothus, tout compte fait, n’a pas nécessairement besoin de changer.
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