Engage - Demo 2005
Chronique
Engage Demo 2005 (Démo)
Depuis le milieu des années 90 jusqu'à la fin des années 2000, le power metal a connu ses plus belles heures - il faut dire que les genres qui dominaient jusqu'à là ne brillaient plus autant et s'effaçaient progressivement au profit d'autres plus extrêmes ou alternatifs. La première moitié des années 2000 représente certainement le point d'orgue de cette période avec, dans les grandes puissances, Manticora, Stormwarrior, Power Quest, Edguy ou Artension. Comme dans les autres genres, ces meneurs de scène (dont je n'en ai cité qu'une maigre poignée) ont motivé d'autres formations plus modestes à s'essayer à ce genre qui mélangeait héritage heavy metal anglais et américain avec héritage allemand mélodique (avec, comme principale cible, la scène de Hambourg, où l'on retrouve Helloween, Gamma Ray, Iron Savior et compagnie). C'est dans ce contexte que naît l'éphémère formation Engage, en 2004, aux Etats-Unis, et plus précisément en Virginie, Etat à la scène très hétérogène où, dans les rangs du power metal, on comptait déjà les grands Twisted Tower Dire qui sévissaient depuis dix ans.
Engage n'a jamais sorti le moindre album ou EP : le quatuor s'est contenté de deux demos, en 2005 et en 2007, avant de tirer sa révérence par manque d'intérêt pour le genre et pour les thématiques high fantasy. Mais quelles demos ! Dans une Amérique où seules quelques légendes heavy/power continuent à faire parler d'eux mordicus (Manilla Road, Jag Panzer) et où les autres viennent tout juste de s’essouffler, Engage se hasarde à jouer la carte du power à l'européenne, misant tout sur la vitesse et sur les mélodies, annonçant ainsi le magistral Enter Deception de Cellador, venu un an plus tard. Ainsi, la majorité des morceaux de cette demo affichent au compteur un tempo élevé ainsi qu'une batterie fonctionnant presque toujours en double-pédale. Pendant trente-quatre minutes, c'est la déferlante de riffs en tremolo, de soli, de chant aigu, bref, de toute la panoplie du bon petit amateur de power metal.
Comme tout autre groupe officiant dans ce genre fonctionnant avant-tout sur la science du riff, Engage nous délivre donc sa fougue de jeunesse sur la plupart des titres au travers de riffs efficaces et ne trahissant aucun manque d'inspiration. On pensera à l'excellent main riff de "Pain and Glory" ainsi que son lead de transition, au refrain de "My Conquer" au main riff de "Enslaved" et de "Fury", qui me fait d'ailleurs furieusement penser à celui de "Magic Potion" des Allemands de Wizard, dont leur Head of the Deceiver était sorti quatre ans auparavant - la production plutôt cheap y est également pour quelque chose. Les soli terriblement techniques ne sont pas en reste et je peux même aller jusqu'à dire qu'ils sont les véritables atouts de ce groupe, étant donné qu'ils sont tous adroitement composés et parfaitement exécutés sans aller non plus jusqu'à l'épilepsie d'un Dragonforce naissant. On retiendra surtout ceux de "Pain and Glory", "My Conquer", "Epic", "Fury" et surtout "Canon in D". Bon, ici, c'est de la triche : le groupe s'aventure sur le terrain de la musique classique en reprenant Pachelbel, ce qui permet surtout aux guitaristes de se la péter en montrant que oui, ils savent bien manier leur instrument. Mais cette reprise trahit également un débordement d'influences sur le power néoclassique, que l'on peut également sentir sur le main riff de "Live Your Life".
Le groupe ne blinde pas non plus tout le temps comme un touriste sur une autoroute allemande, il rend hommage à ses racines américaines bien plus heavy avec le premier riff de "Enslaved" dans une tonalité plutôt heavy/doom et avec le break de ce même morceau, qui renvoie davantage ici aux méfaits de la grande scène anglaise des années 80. "Epic" s'inscrit également dans cette état d'esprit mid-tempo, pas foncièrement intéressante mais qui calme bien le jeu avant de repartir à toute berzingue avec "Fury", juste après. Enfin, le groupe lorgne également sur la scène power mélodique scandinave avec le début de "My Conquer" qui fait furieusement penser à un vieux Sonata Arctica avec son lead mélodique mid-tempo par-dessus une rythmique heavy plutôt pépère. Seul bémol de cette demo : le chant n'est guère à la hauteur. Chad Brown parvient certes à atteindre les notes hautes plus d'une fois et propose de beaux refrains, comme sur "Pain and Glory", mais globalement il ne se distingue pas plus que ça, d'autant que les limites techniques du chanteur/bassiste - dont le second instrument est également inexistant - se font ressentir à de multiples reprises.
Toujours est-il que, pour la première demo d'un jeune groupe téméraire sorti un peu de nulle part, Engage frappe fort avec ses airs on-ne-peut-plus quelconque mais qui pourtant recèle un power metal furieux et très inspiré, révélateur de la prolifération du genre à cette époque. Ce n'est clairement pas une démo sur laquelle il faut faire son pèlerinage, le genre était rapidement limité et exécuté dans toutes ses règles les plus conventionnelles, mais il vaut clairement le détour pour les fans du genre, histoire d'approfondir un peu sa culture en la matière.
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