Infectious Grooves - The Plague That Makes Your Booty Move... It's The Infectious Grooves
Chronique
Infectious Grooves The Plague That Makes Your Booty Move... It's The Infectious Grooves
Je sais que l’on ne dirait pas comme ça mais l’été est pourtant bel et bien entamé et cela depuis quelques jours maintenant. Voilà donc l’occasion de changer quelque peu ses listes d’écoutes et d’y glisser des choses un peu plus légères et ensoleillées. Bon, en ce qui me concerne, on ne peut pas dire que cela change quoique ce soit même s’il est vrai qu’avec l’arrivée des beaux jours (que l’on attend encore) mes envies de Punk Rock, de Grunge, de Rock Alternatif ou de Funk Rock/Metal sont bien souvent un poil plus prononcées qu’à l’accoutumé.
Tout ça pour vous dire qu’on va aujourd’hui changer de registre avec la première chronique sur Thrashocore des excellents Infectious Grooves. Comme vous n’avez pas tous eu la chance de grandir dans les années 90, peut-être que certains d’entre vous ne connaissent pas cette formation californienne originaire de Venice Beach et dont les premiers balbutiements remontent aux milieux des années 80 (on trouve en effet un titre des Californiens sur une compilation datant de 1986). Formé autour de Mike Muir et Robert Trujillo de Suicidal Tendencies, le groupe est également composé des guitaristes Adam Siegel (Excel, l’un des pères fondateurs du Thrash / Crossover) et Dean Pleasants (Ugly Kid Joe, Suicidal Tendencies...), des batteurs Stephen Perkins (Jane’s Addiction, Porno For Pyros...) et Scott Crago (Bryan Adams, Sheryl Crow, Stevie Wonder, Chris Isaak...), du claviériste Dave Dunn ainsi que tout un tas d’autres musiciens venus prêter main forte le temps d’un ou deux morceaux (Rocky George, David Kushner, Christian Gaiters, Phil Kettner). Un casting aussi surprenant qu’alléchant pour un premier album baptisé The Plague That Makes Your Booty Move... It's The Infectious Grooves sorti en octobre 1991 (entre deux albums de Suicidal Tendencies) sur Epic Records.
Alors évidemment, avec Mike Muir et Robert Trujillo embarqués tous les deux dans cette aventure parallèle, on va retrouver ici un petit peu de ce qui fait le charme des excellents Suicidal Tendencies. C’est vrai notamment pour cette inclinaison Thrash / Crossover sous-jacente sur laquelle vont s’articuler la plupart des morceaux proposés ici ("Punk It Up", "Therapy", "I'm Gonna Be My King", "Infectious Grooves", "Monster Skank"...) ainsi que pour certaines touches mélodiques qui puent le Rocky George et le Mike Clark à plein nez (comme c’est le cas par exemple sur "I’m Gonna Be My King"). C’est vrai également pour le chant sur-vitaminé d’un Mike Muir toujours en très grande forme qui va insuffler à sa manière cette énergie débridée et communicative, ce grain de folie et ces pointes d’humour désopilantes. C’est vrai enfin pour cette basse délicieuse aux rondeurs sexy et chaloupées dont Trujillo va nous régaler (et cela d’entrée de jeu sur l’incroyable "Punk It Up" !) tout au long de ces quarante-quatre minutes particulièrement fraîches et funky.
Mais si les deux groupes partagent en effet une base commune ou en tout cas certaines sensibilités, Infectious Grooves va néanmoins prendre un malin plaisir à explorer d’autres horizons et cela avec une légèreté, une fraicheur et une dérision qui symbolisent une certaine idée de la Californie à la fin des années 80 et au début des années 90 et de Venice Beach plus particulièrement. Aussi, à cette base Thrash / Crossover plus ou moins évidente selon les morceaux, le groupe va y ajouter de sérieuses influences Funk grâce à une section rythmique particulièrement carrée et habile qui derrière tout ce fun, ces blagues pourries et grivoises et cette insouciance cache malgré tout des bêtes de musiciens. Monsieur Robert Trujillo en premier lieu dont les talents n’ont jamais autant été mis en avant qu’ici même. Chaque morceau est ainsi l’occasion pour le musicien de laisser libre court à ce groove insolent et absolument irrésistible qui a dû donner des complexes à pas mal d’apprenti bassistes à travers le monde. Comment rester insensible face à ce jeu aussi dynamique et expressif qui par ses rondeurs et ses notes sautillantes et insaisissables nous invitent irrémédiablement à danser et nous déhancher ? Évidemment, celui-ci n’est pas le seul à briller tout au long de ce premier album et nous pourrions évoquer également les talents de Dean Pleasants et de sa guitare qui cocotte comme dans celle d’un boulard des années 70 (sans parler de cette pédale wah wah), les riffs simples et pourtant si efficaces et tranchants d’Adam Siegel qui n’a rien perdu de son savoir-faire, Stephen Perkins et Scott Crago, batteurs d’une sobriété impeccable et au groove inée, Dave Dunn dont les mélodies synthétiques transpirent à mort les années 80 (notamment sur "Stop Funk'n With My Head", "You Lie...And Yo Breath Stank")...
Outre cette symbiose quasi-parfaite entre musiciens tous plus talentueux les uns que les autres, ce qui frappe également à l’écoute de The Plague That Makes Your Booty Move... It's The Infectious Grooves c’est cet esprit de liberté (coucou le featuring d’Ozzy Osbourne sur l’imparable "Therapy") et ce plaisir immense qui transparaît à chaque morceau. Si accoucher de telles compositions n’a pas forcément du être très aisé, on sent pourtant que les gars ont pris un immense plaisir à jouer ensemble, à mélanger tous ces genres (Punk, Hardcore, Thrash, Funk, Blues, Heavy Metal...) et ces sonorités (nappes de synthétiseurs, cuivres en fanfare, percussions en folie...) dans un joyeux méli-mélo chargé auquel on adhère pourtant sans rechigner. Enfin, je ne pourrais pas décemment conclure cette chronique sans évoquer le personnage d’Aladdin Sarsippius Sulemenagic Jackson III, amphibien fantasque sorti de l’imaginaire des membres d’Infectious Grooves qui va prendre vie ici le temps de quelques titres servant d’interludes ("I Look Funny?", "Closed Session", "Turn Your Head", "Thanx But No Thanx") qui, peu importe le nombre d’écoutes que j’ai aujourd’hui au compteur, réussissent à chaque fois à m’esquisser un franc sourire (notamment les deux premiers que je trouve vraiment drôles). Bref, s’il en fallait une, voilà une raison supplémentaire de fondre devant cet album incroyablement fun et léger mais surtout terriblement attachant et addictif qui, s’il transpire les années 90 à plein tubes, n’a cependant pas pris une ride.
Probablement moins plébiscité qu’un Groove Family Cyco / Snapped Lika Mutha ayant fait grand bruit lors de sa sortie trois ans plus tard, The Plague That Makes Your Booty Move... It's The Infectious Grooves n’en reste pas moins un incontournable de la discographie des Californiens. Un disque bourré d’énergie et d’ondes positives qui donne le sourire dès les premiers instants et sur lequel on prend évidemment beaucoup de plaisir à revenir. Certes, il y a un côté résolument foutraque et chargé dans cette formule qui fait se télescoper avec brio tout un tas de genres et de sonorités dans une fusion aussi complexe que fluide. Pour autant, il me paraît difficile de ne pas tomber sous le charme de ces clowns talentueux qui ne se prennent pas une seule seconde au sérieux et qui pourtant accouchent ici de compositions aussi redoutables que funky. Bref avec les beaux jours qui arrivent (si si), voilà l’occasion idéale de ressortir ce genre d’album et de se laisser aller à un brin de nostalgie. Et pour ceux d’entre vous qui n’ont pas peur du terme "fusion" et qui n’auraient jamais posé leurs oreilles sur cet album, rendez-vous service et jetez-vous de bon coeur dans cet album fun, efficace et particulièrement rafraichissant.
| AxGxB 7 Juillet 2021 - 1766 lectures |
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