L’histoire veut qu’en 2017, Ryan Fairfield, tête pensante de Hallowed Butchery, rencontre un certain Jonathan Curless, chef de la secte « The Church of the Final Pilgrimage ». Une rencontre que le créateur de
Funeral Rites for the Living, en panne d’inspiration après ce premier album – plus de dix ans sépare cette œuvre de celle nous intéressant aujourd’hui –, raconte comme un évènement marquant sur
le bandcamp du projet. En effet, le chef du culte l’invite alors à rejoindre son groupe, trente personnes vivant en autarcie dans la ruralité du Maine, état des Etats-Unis. Ryan Fairfield y passera deux semaines, partageant leurs rites et leur vie quotidienne avant de s’enfuir avec une copie de leur bible, servant de base pour cet album.
Mais que vénère cette secte, à qui souhaite rendre justice Hallowed Butchery ? La mort. La mort comme seule vérité et seul Dieu. La mort comme une entité bienfaitrice car elle apporte la paix. La mort qui fait vivre par les sacrifices qu’on lui rend et que l’on consomme. La mort que l’on ne doit pas craindre mais accueillir. Cela est rendu clair par les fichiers donnés en supplément du téléchargement de l’album (dont une édition CD – et, espérons-le, vinyle – est prévue l’année prochaine) mais également par ce que contiennent les trente-huit minutes de
Deathsongs From the Hymnal of the Church of the Final Pilgrimage. Une base – peu importe qu’elle soit vraie ou imaginaire – qui transporte le style particulier du Ricain vers des sphères que même l’étrange
Funeral Rites for the Living n’avait jamais atteintes jusque-là et où les comparaisons patinent. Swans, Neurosis, Author and Punisher et Evoken réalisant ensemble une bande-originale pour le pendant crépusculaire de
Midsommar, film d’horreur folklorique de Ari Aster ? Musique de muscles, de sang, de concret qui pourtant se déploie vers un mysticisme d’autant plus glauque qu’il présente la fin comme une attente ? Sans ironie ou intellectualisme, Ryan Fairfield accouche – le mot est approprié, tant l’album paraît être né dans la gestation et la douleur – d’une musique aussi doom qu’industrielle, une folk enjôleuse et sombre s’invitant par instants, à la grâce continue mettant ses plus beaux habits funèbres pour prêcher avec autorité.
C’est bien cela qui rend le fond de
Deathsongs From the Hymnal of the Church of the Final Pilgrimage aussi prenant, et non prétentieux comme cela aurait pu l’être : la forme est décidée à lui rendre honneur, dans un mélange de styles et d’influences fonctionnant parfaitement les uns avec les autres car liés par une même volonté de transmettre l’expérience vécue. Le doom extrême de « Ever Gloom » se mue ainsi naturellement en une complainte nocturne, l’industriel pulsant de sang de « The Altruist » s’élève en une acclamation carnassière de la mort, la claustrophobe « Internment » assujettit l’esprit jusqu’à l’horrible chant d’amour de « On the Altar », déifiant une fin qui ne saurait venir trop tôt... Oui, tout cela pourrait vite devenir ridicule, et pourtant, à aucun moment nous doutons de la véracité des sentiments exprimés ici, de cette conviction qui est transmise avec tout le talent dont est capable Ryan Fairfield.
Deathsongs From the Hymnal of the Church of the Final Pilgrimage fait peur, comme on a pu avoir peur lors de certains disques qui frôlaient l’absurde mais s’enfonçaient surtout dans une radicalité morbide finissant par nous faire sienne. Il fait peur de sincérité et fait peur car il fascine. L’expérience en elle-même est courte, contient quelques passages maladroits (les instants acoustiques de « Flesh Borer » ou encore le début de « On the Altar ») et cependant laisse une empreinte forte sur l’esprit, comme une envie d’y retourner constamment, attiré par cette chose qui se terre, que l’on voit venir en plein jour et qui nous veut du mal. Une chose que l’on ne peut s’empêcher de regarder, ressentant ce que l’on appelle communément, comme une énigme, « Le frisson ».
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