Oui je sais, encore une chronique de doom metal où je présente le disque comme une « lettre d’amour », une « définition », usant de lexiques de béat, accumulant les adjectifs les plus marqués par la solennité, la ferveur, la passion... Est-ce de ma faute si le doom metal a cette capacité, celle de laisser pantois quand un de ses adeptes le porte en étendard d’une manière particulièrement belle ? Si le style possède une formule si travaillée et si simple, si riche et si directe, qu’il semble parfois ne pas sortir d’artistes et leurs compositions, mais choisir ses représentants et s’exprimer à travers eux ?
C’est en tout cas ces impressions que me donne Purification. Ce groupe de Portland, déboulé de nulle part mais ayant sorti des albums avec un rythme effréné en deux ans, semble en effet marqué par un doom canonique, volontairement daté, préexistant à lui et dont pourtant il parvient à tirer une « substantifique moelle ». Il faut dire qu’en se réclamant dès ses débuts de Saint Vitus et Reverend Bizarre, la bande ne s’inscrit pas dans une volonté de renouveler le genre (qui n’a pas besoin de l’être, donc tout le monde est content). Énième révérence, mais qui travaille à la perfection son geste : voici ce que transmet
Dwell in the House of the Lord Forever, allant puiser, en plus des références déjà évoquées, dans la sensibilité d’un Warning et la félicité d’un Revelation.
Autant dire que la pâmoison est totale. Il suffit d’écouter « Our Mother Superior », son entame qui attaque directement le cœur, pour constater que Purification cherche à se servir des nombreuses figures tutélaires qu’il convoque pour transmettre un amour du doom touchant à une certaine foi. Ce qui peut paraître amusant pour une formation s’annonçant antireligieuse et malgré tout habitée sur ces quarante-et-une minutes : chaque riff, chaque mélodie, transpirent d’une conviction laissant hébété, l’intransigeance avec laquelle tout cela est joué développant une force émotionnelle peu commune. Élément le plus probant, des trémolos rauques et nasillards dans la voix, Marshall William Purify s’attarde sur la peinture de sentiments noirs mêlés d’allégresse, sorte de Maldoror à la fois fier et triste de sa condition (cf. les envolées de « Second Coming » ou la mise à nu « Rainbow Warrior »).
Pour autant,
Dwell in the House of the Lord Forever, en dépit de sa musique surannée portant une veste à patch que l’érudit pourra se plaire à déchiffrer, pratique son doom metal avec une certaine fraîcheur, un élan qui rend l’exercice particulièrement salvateur. A croire que Purification cherche ici à mériter son nom, tant la pureté de son style devient un acte purificatoire. Il y a cette fierté déjà citée, transmise par ce chant à la fois langoureux et autoritaire, mais aussi des instants où tout transpire une certaine beauté fanée, loin de toute sensiblerie et malgré tout émouvante, tel le début de « Drömboken ».
Quelque part, au-delà des origines et des influences, Purification me rappelle
The Wizar’d en ce qu’il interprète un genre codifié avec une certaine liberté, l’étrange respect d’un malpoli glorifiant tout en tutoyant un doom metal redevenant magiquement aussi véhément qu’exultant, jouissif malgré le cœur lourd. Certes, on pourra déplorer ici un temps court, particulièrement quand deux reprises (de Bleak House et David Benson, tous deux inconnus au bataillon chez moi) sont présentes. Mais devant la cohérence presque narrative avec laquelle se déploie l’œuvre, devant ces chapitres contenant chacun leurs moments d’exploit jusqu’à un final qui conclue parfaitement l’ensemble (« Sailing to Byzantium: III », sorte d’au revoir à la fois fédérateur et mélancolique), ces accusations portent bien peu de choses en elles.
Il est rare de rencontrer un nouveau groupe de doom aussi éclatant et prometteur que Purification. Le genre a beau s’être développé et revenir en force ces derniers temps – les nombreuses sorties de ce début d’année le montrent –, peu de formations font preuve d’un même talent pour reprendre un flambeau que l’on pourrait croire en fin de mèche. Il me tarde de voir ce que les Ricains nous réservent pour la suite, tant
Dwell in the House of the Lord Forever est un coup de cœur comme on en rencontre peu. Le doom a bien choisi son nouveau porteur de flamme !
Par gulo gulo
Par AxGxB
Par Jean-Clint
Par Raziel
Par Sosthène
Par Keyser
Par Keyser
Par Lestat
Par Lestat
Par Sosthène
Par Sosthène
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par AxGxB
Par Deathrash
Par Sikoo