Non, ils ne se sont pas loupés. Il y avait pourtant tout pour que Purification transforme son charme de flambeur en feu de paille, décline aussi rapidement qu’il est monté avec
Perfect Doctrine et surtout
Dwell in the House of the Lord Forever. Illustration jolie mais assez commune, sortie rapide – six mois après son prédécesseur ! –, caractère définitif de
Dwell in the House of the Lord Forever et son doom ultime, traditionnel et émotionnel dont une redite n’aurait été que rabâchage… Honnêtement, je voyais l’accident industriel arriver à grand pas.
Il faut croire que je ne mérite pas d’écouter ce groupe béni des dieux du doom, auxquels Purification rend une nouvelle fois hommage.
The Exterminating Angel est bien une nouvelle claque de la part de cette formation toujours aussi fraîche, insolente et talentueuse. Et c’est un bonheur qui se renouvelle dès la première rencontre avec ces nouvelles quarante-six minutes !
Mais comment font-ils, pour être aussi constants et aventureux sur un temps aussi court ? Clairement, c’est bien l’épatement qui domine, les Ricains ayant encore développé leur son, déjà si particulier malgré ses allures traditionnelles. De lettre d’amour au genre avec
Dwell in the House of the Lord Forever, le projet est passé à une déclaration enfiévrée de passion avec
The Exterminating Angel. Dès « Unholy Resurrection », on est pris dans ce climat tendre (servi par une production plus ronde qu’auparavant), ce psychédélisme chaleureux avec lequel Purification agrémente son doom. Des atmosphères recueillies et cependant étrangement positives, éperdues d’amour – le maître-mot ici – qui déclame la venue prochaine de Satan comme porteur d’une félicité universelle. Pureté de l’exercice, conviction de chaque instant : c’est bien ce qui rend cette musique si prenante, si crédible dans sa foi en un ange déchu qui viendra nous auréoler de sa lumière, offrant liberté et allégresse. On en sortirait presque une référence au
Maranatha de Funeral Mist devant tant de dévotion !
Une exaltation que Purification – qui mérite ici plus que jamais son nom, tant cet album exorcise – transmet avec la maestria qu’il a déjà montré auparavant. Les descriptions des plaisirs rares, de la solennité heureuse, de la beauté délicate et sensuelle auxquels on a droit grâce au trio ne seront rien par rapport à une simple écoute de « On Earth As It Is », sa guitare qui cajole, sa voix qui s’embellit et s’emballe, son apogée où tout s’élève et rêve. Le hold-up se poursuit et la bande à Marshall William Purify finit par voler jusqu’à nos cœurs ! Aussi ridicule que cela puisse être à lire, c’est bien par une séduction constante que
The Exterminating Angel parvient à convaincre, notamment dans ce chant à la fois plein de révérences envers les références et irrévérencieux jusqu’à devenir licencieux, faune et satyre à la fois.
Pourtant, il faut bien le dire : malgré de nombreux moments d’éclats – un feu d’artifice même, les passages touchant justes et droits étant en nombre sur
The Exterminating Angel –, Purification souffre par endroits de quelques maladresses, minimes mais plaçant ce disque légèrement en-deçà de son prédécesseur. Ce dernier étant un futur classique en puissance, on excusera les quelques moments de baisse de son successeur, un titre folk un poil trop long (« Sublime Thrones In Kaaba »), une deuxième partie du morceau-titre s’étiolant jusqu’à nous laisser dans l’attente. Quelques creux, que le grand final « Dreamtiger » et « The Way Of All Flesh » – deux titres ne faisant qu’un par cette lead magnifique – font rapidement oublier, ébahi que je suis par le génie de ces Ricains ayant sorti trois excellents albums en moins de deux ans.
Que dire d’autres, sinon que l’impression laissée par
Dwell in the House of the Lord Forever est encore de mise pour
The Exterminating Angel ? Purification est en train de construire, dans l’ombre (mais pour encore combien de temps ?), une discographie aussi foisonnante que constante, maniant habilement les codes d’un doom metal intransigeant pour lui donner toute la grâce dont il est capable. Tragique, altier, vengeur, frimeur, poétique… Purification est tout cela, la gaucherie qu’il peut avoir parfois ne faisant qu’augmenter son charme. Ah ! La suite, sans doute déjà dans les tuyaux comme on peut l’espérer avec ces stakhanovistes, ne saurait arriver trop vite !
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