Bell Witch - Mirror Reaper
Chronique
Bell Witch Mirror Reaper
Mieux vaut tard que jamais. En même temps, si la vitesse et la précipitation devaient prendre le pas sur l’émotion, le funeral doom ne serait plus ce qu’il prétend être. De fait, Mirror Reaper, le dernier effort de 2017 des ricains de Bell Witch déboule dans ce contexte. Le temps écoulé entre la sortie de l’album et la chronique ne s’explique pas que par des logiques procrastinatrices ; les presque 1 h 30 minutes de l’album, pour 2 titres…, ne se laissent guère apprivoiser tant l’on se retrouve, finalement, en présence de presque deux albums en un, même si une véritable cohérence existe entre les deux faces, notamment parce que les titres s’enchaînent naturellement, sans temps mort.
Mirror Reaper (As Above), le premier morceau de près de 50 minutes, délivre un funeral doom classique mais très bien fait, très prenant, qui joue constamment sur l’équilibre entre passage lourd et oppressant et lead et ponts plus aériens. De fait, le combo ricain s’inscrit dans la même démarche que sur Longing et Four Phantoms. A l’identique, ce premier titre – comme le suivant – articule l’essentiel de son propos autour d’une basse tellurique qui avance lentement, comme reptant, dont les quelques notes de batterie et les quelques phrasés de clavier viennent simplement souligner la densité, via une petite touche mélodique par ci, via un arrangement discret par là. La voix, typique du style, finit d’apporter la profondeur abyssale aux morceaux. On se surprend à penser au grand Mournful Congregation, notamment sur les phrasés les plus porteurs d’emphase, sur les passages où le clavier distille un arrière-plan sonore discret mais presque cristallin et enveloppant. Les mélodies aériennes, souvent lumineuses, rappellent encore Shape of Despair par instant, notamment dans le contraste puissant entre ces mêmes mélodies, fragiles et éphémères, et le chant, ultra guttural et profond. La contemplation y est omniprésente.
Mais la force ultime – ou sa faiblesse intrinsèque selon les goûts – de cet album, c’est d’avoir poussé le concept du miroir jusqu’à jouer le second titre à rebours du premier. En repartant de la fin pour remonter à l’intro, sous divers arrangements habiles qui masquent tout effet de répétition. Mirror Reaper (So Below) est ainsi le reflet du miroir, le double maléfique de Mirror Reaper (As Above). La basse 6 cordes rugit davantage ; la batterie égrène ses notes désespérées avec encore plus de lenteur ; la voix s’enfonce dans la brume opaque. Pas un instrument de plus, pas ou presque plus de mélodie. Une immense incantation de 35 minutes. Une longue procession funéraire. Un dernier voyage au cœur des limbes, comme pour accompagner Adrian Guerra, l’une des têtes pensantes du combo américain, décédé brutalement avant l’enregistrement. Fragile et profonde, aérienne et souterraine à la fois, cette dernière piste referme le sarcophage musical sur un funeral doom d’une grande beauté, très pur, débarrassé de tous ses oripeaux.
Cet album est une épreuve qui n’est pas accessible à tous. Il faut le dire clairement. Mais pour ceux qui feront le voyage, qui se laisseront embarquer sur les eaux noires de Mirror Reaper, la traversée aura des airs d’absolu.
| Raziel 17 Avril 2021 - 1910 lectures |
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