Seth - La Morsure du Christ
Chronique
Seth La Morsure du Christ
Revenue aux affaires il y’a huit ans avec
« The Howling Spirit » (qui a énormément divisé et qui ne tenait pas la comparaison par rapport à ses excellents prédécesseurs), la formation toujours menée par les inamovibles Heimoth et Alsvid est de retour aujourd’hui avec son sixième album en un peu plus de vingt-cinq années d’une carrière riche et fructueuse. D’ailleurs pour fêter ce quart de siècle d‘existence celle-ci avait eu l’excellente idée de remonter sur scène et d’offrir une série de concerts tournant intégralement autour du mythique « Les Blessures de l’Âme » publié vingt ans auparavant, et qui avait marqué les esprits en installant immédiatement ses auteurs dans le haut du panier de la scène Black française. Devant le succès de ses dates (immortalisées par un enregistrement live) et visiblement requinqués par l’accueil du public comme de la critique les gars ont décidé d’offrir un retour aux sources à leurs fans de la première heure, avec un disque qui se présente autant musicalement que conceptuellement comme une suite non-officielle à ce mythique opus. S’il ne reste du précédent long-format que le binôme originel celui-ci a été complété depuis par des vieux briscards renommés où l’on trouve dorénavant Saint Vincent (BLACKLODGE, VORKREIST) au micro, Drakhian (ex-LOUDBLAST) à la guitare, Pierre Le Pape (EMBRYONIC CELLS, MELTED SPACE) aux claviers et le dernier arrivé en date Esx Vnr (VORKREIST, ex-MERRIMACK et GLORIOR BELLI) à la basse - intégré juste après cette mini-tournée. Bref sur le papier tout cela a fière allure et le moins que l’on puisse dire c’est que l’attente engendrée en valait la peine, car sans tomber dans la redite de ce chef-d’œuvre le sextet livre un complément parfait à ce dernier sans le dénaturer mais en lui amenant un soupçon de modernité.
Mais ce qui frappe dès le départ c’est la pochette absolument sublime signée Leoncio Harmr, celui-ci a retravaillé une photo authentique de l’incendie de Notre-Dame-de-Paris en lui donnant un ton encore plus inquiétant et diabolique, un rendu qui sera en raccord avec la qualité des textes (principalement en alexandrin) et la prestation vocale impeccable du chanteur qui a totalement fait oublier Vicomte Vampyr Arkames. On avait vu effectivement lors des prestations de 2018 de sa capacité à s’approprier les paroles et à y amener sa propre touche sans les dénaturer, tant la tessiture proposée se révèle être relativement proche de l’originale, ce qui donne un mimétisme encore plus saisissant à ce disque. Celui-ci va d’ailleurs happer l’auditeur dès son démarrage tant « La Morsure du Christ » va donner le ton général et proposer directement tout le panel du combo, dont on voit la très grande forme vu qu’il va balancer en continu nombre de variations rythmiques à la fois ultra-rapides et lentes, d’où émerge un vrai côté épique et guerrier porté par un clavier tout en sobriété et typiquement 90’s. Ne perdant jamais son dynamisme en chemin ni son attractivité ce premier morceau va être dans la droite ligne des suivants qui seront tout aussi addictifs et à la fois brutaux, religieux et propices au headbanging. On retrouve facilement ce sens du riff propre à son guitariste principal ainsi que les patterns de son frappeur qui incorpore comme d’habitudes de nombreux breaks et cassures pour mieux repartir et relancer la machine par la suite… et ce même quand l’écriture se fait relativement plus directe, à l’instar des excellentissimes « Métal Noir » et « Sacrifice de Sang ». Laissant ici plus de place aux longues plages instrumentales pour pouvoir totalement s’exprimer on perçoit également des nappes de synthé plus sombres et inquiétantes pour la première, et une certaine tribalité sur la seconde, les deux voyant en revanche tout le panel rythmique être de sortie et avoir en leur sein là-encore ces ambiances guerrières et nostalgiques.
D’ailleurs plus on va avancer dans l’écoute et plus on va s’apercevoir de la montée en puissance des atmosphères et du divin, il n’y a qu’à écouter le radical « Ex-Cathédrale » (aux textes particulièrement fouillés) pour en être convaincu, tant ça démarre sur les chapeaux de roue via une vitesse quasi-continue avant de voir le tempo ralentir sacrément pour laisser place à une messe où les chœurs sont de rigueur, et amener ainsi de la douceur et l’espoir en le renouveau de notre monument national. Poursuivant dans la foulée sur cette même voie « Hymne Au Vampire (Acte III) » atteint ici des sommets d’accroche et de densité s’ouvrant et se finissant sur une atmosphère occulte où les chants de cérémonie rajoutent à l’obscurité ambiante (d’où émerge des notes acoustiques apaisantes), le centre de la compo étant lui parsemé de moments menés à fond la caisse comme au ralenti, où l’on remue continuellement la tête et où l’envie de prendre les armes comme de participer à la reconstruction de l’édifice parisien est présente en permanence. En effet avec « Les Océans du Vide » outre l’alternance classique électrique les arpèges doux de guitare sont là-encore présents et sont exacerbés par une certaine ambiance moyenâgeuse (où l’on pourrait presque entendre les bâtisseurs de l’époque en plein travail), point encore marqué sur la conclusion « Le Triomphe de Lucifer ». Si l’on pourrait croire vu le nom que le diable a gagné en faisant brûler l’édifice cela n’est pas le cas tant celle-ci a résisté aux flammes comme au temps qui passe, et ici la musique y est plus oppressante via de l’orgue angoissant et des voix religieuses en arrière-plan qui nous envoient en plein recueillement, calés entre des déferlantes de haine où la machine s’emballe histoire de jeter les dernières forces dans la bataille, et conclure ainsi une galette presque aussi majeure que sa glorieuse aînée.
Aura t’elle la même carrière que celle-ci ? Il n’en est pas certain mais l’avenir le dira, en attendant on ne peut que s’incliner devant l’énorme travail accompli par l’entité qui frappe un énorme coup cette année avec cette réalisation incisive et attractive qui se placera à coup sûr dans le haut du panier hexagonal de 2021. Cohérente et sans baisse de régime elle réussit le tour de force de n’être jamais kitch tout en étant hyper élaborée mais sans s’étirer inutilement en longueur, et cela sans doute via l’expérience accumulée par chacun des mecs dans leurs différents vécus musicaux. Jouant habilement sur l’ancien comme sur le moderne SETH quoi qu’en disent les mauvaises langues est incontestablement une des pépites du Black hexagonal, sachant se faire oublier pour mieux revenir par la suite et ce depuis plus de deux décennies, en évoluant musicalement à chaque nouvelle sortie tout en n’hésitant pas à se remettre régulièrement en question… et ce malgré les changements incessants de personnel qui auraient pu lui couper les pattes, même s’il n’en est rien vu qu’il en sort renforcé et plus intéressant que jamais.
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