Uerberos - Stand over Your Grave
Chronique
Uerberos Stand over Your Grave
Tu aimes le metal plus intellectuel que la moyenne ? Les envolées techniques, mélodiques et progressives ? Les thématiques recherchées ? Tu en as marre du metal extrême classique qui ressasse sans cesse les mêmes poncifs ? Eh bien casse-toi et rentre chez ta mère parce qu'il n'y a rien de tout ça ici. Ici on va causer gros death metal bien cliché qui tâche et revenir sur le deuxième album de Uerberos paru l'année dernière chez Godz ov War Productions, Stand over Your Grave.
Uerberos, qui n'est pas un groupe espagnol comme son nom pourrait le faire croire mais polonais, avait déjà fait forte impression sur son premier long-format Tormented by Faith paru en 2017 via Immortal Souls Productions. Un très bon galop d'essai d'autant plus méritant qu'il sortait de nulle part, le groupe n'ayant jamais rien produit auparavant et aucun de ses membres n'évoluant dans d'autres entités plus connues. C'est enrichi d'un deuxième guitariste, Piotr Chodorowski qui a fait partie de Infatuation of Death, autre secret bien gardé de la scène DM de Pologne, que le désormais quintette revient trois ans plus tard avec ce Stand over Your Grave à la pochette vraiment très moche. Mais qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse. Et pour bourrer, ça bourre ! Pas d'évolution majeure à signaler dans le style des Slaves sur ce deuxième méfait. Uerberos pratique un death metal plutôt moderne, brutal et millimétré typiquement polonais à la production ultra musclée sans toutefois sonner trop artificielle. On pense évidemment au Behemoth des années 2000 (l'époque lointaine où la bande à Nergal valait encore le coup) mais aussi à des choses bien féroces comme Nile ou encore Temple. La première chose qui frappe, c'est la puissance dégagée par la formation. Aussi subtile qu'un panzer dans une cour d'école d'enfants handicapés. Par le biais de ce son monumental et aussi du style de jeu qui fait la part belle aux blast-beats. Urberos blaste en effet les trois quarts du temps pour mon plus grand plaisir. Les blasts sonnent peut-être un peu trop machinaux mais c'est le style polonais et c'est tellement jouissif !
Un bon gros défouloir, voilà ce que nous propose le combo de Żory. D'autant plus efficace que derrière le mur de blasts, il y a du vrai bon riffing. Toujours dans le classique, beaucoup de tremolos rapides plus ou moins sombres, mais c'est du très très costaud, l'inspiration élevée comme le niveau technique au poil. Ce n'est pas comme d'autres qui blastent dans le vent. Et qu'est-ce que fait Uerberos les 25% du temps où il ne blaste pas ? Eh bien il continue d'envoyer la purée mais soit sur des rythmiques plus thrashies soit par des grosses salves de double à fond les ballons qui apportent un petit côté groovy pas déplaisant. On notera tout de même quelques ralentissements plus prononcés, très épars cela dit. Certains ne se jouent d'ailleurs qu'aux guitares pendant que la batterie continue de mitrailler, offrant un contraste qui fait son effet. L'apport de nombreuses dissonances, dont pourtant je ne raffole pas habituellement, s'avère aussi bienvenu car elles sont utilisées dans le sens du jeu, bien incorporées, rien à voir avec une certaine partie de la scène qui met l'accent dessus.
L'aspect rouleau-compresseur connaît toutefois ses limites. Urberos a beau varier un minimum, il faut avouer que l'on ressent malgré tout une certaine répétitivité. L'absence de solos qui auraient pu apporter un plus ou le chant growlé puissant qui fait le boulot mais reste assez monotone n'aident pas à diversifier davantage le propos. Les démarrages des neuf morceaux se révèlent sensiblement identiques, il n'y a que sur "To Make You Suffer!" où le début se montre beaucoup plus lent qu'à l'accoutumée avec une bonne grosse basse, le groupe attendant presque une minute entière avant de sortir les blasts. Cela a dû les démanger sérieusement ! Sur moins de quarante minutes, cela ne porte cependant pas trop à conséquence. Il faudra simplement éviter d'écouter l'opus trop souvent sous peine d'indigestion. Non, la seule véritable faute de goût, ce sont ces trois-quatre séquences saccadées à la double ("Beautiful Crimson of Your Blood" à 2'04 et 4'25, "To Make You Suffer!" à 1'45 et 3'44, "Emperor" à 1'02). Si on ne peut leur retirer leur efficacité et le fait qu'elles trouveront certainement leur public, l'aspect moderne dans le mauvais sens du terme et trop facile ainsi que ma répulsion pour ce genre de bassesse dans le death metal font que ces passages dénotent clairement. Pas terribles non plus ces spoken words à 2'12 sur le morceau-titre "Stand over Your Grave".
Ces quelques accrocs ne s'avèrent heureusement que de simples anicroches et n'empêchent pas d'apprécier grandement l'œuvre dans son ensemble. Et malgré la linéarité de la chose, inévitable quand on prend le parti de l'intransigeance musicale, ce Stand over Your Grave s'avère ce que j'ai entendu de mieux l'année dernière en matière de death metal en provenance de Pologne avec les albums de Conquest Icon et Azarath. Quelle branlée, quelle déculottée tout de même ! Cette production surpuissante, ces blast-beats impitoyables qui n'en finissent pas, ce riffing infernal, cette ambiance sombre et implacable, ce "Levitation" d'entrée qui met tout de suite les points sur les i, c'est vraiment jubilatoire ! Trente-neuf minutes à la gloire du blast et d'une vision radicale du death metal dans la grande tradition polonaise qui montre encore la richesse de cette scène malheureusement trop souvent mise dans l'ombre d'un Behemoth pourtant plus devenu un produit marketing qu'autre chose. Uerberos confirme donc haut la main le potentiel présenté sur Tormented by Faith et s'impose désormais comme l'un des porte-drapeaux du death metal de l'Est.
| Keyser 11 Septembre 2021 - 988 lectures |
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