Pure, là où Godflesh commence ? C’est généralement ce que je pense de ce disque, bien différent de ses prédécesseurs.
Streetcleaner a mis fin aux tortueuses années 80, entamées par les muscles cyniques des Swans et terminées par les bombes de ce premier album de Justin et sa bande (ici accompagné de l’éternel Ben Green mais aussi de Robert Hampson, supplantant Paul Neville au rôle de deuxième guitariste). Une œuvre culte, à la fois définitive et définissant une certaine scène. Mais
Pure donne une autre sensation, dès sa pochette où l’on pourra voir une main calcinée, reste d’une explosion atomique, mais où je perçois la naissance d’un homme-nouveau. Un exemple de plus de mon incompréhension envers ce qu’on attache généralement aux musiques industrielles, celles souvent décrites comme lourdes et noires, violentes d’une domination visant l’extinction, alors qu’elles transpirent une certaine forme de vie. Une vie mécanique et organique à la fois, appuyant une volonté d’existence jusqu’à la hurler avec toute sa force disponible, jusqu’à divaguer dans des nappes spirituelles étrangement atmosphériques.
Il y a de cela dans
Pure, délaissant en partie le patronage de Michael Gira ou encore Throbbing Gristle pour embrasser celui de la scène Hip Hop de son époque. « Spite » et « Mothra » mettent directement dans le bain de cette nouvelle direction, les machines et guitares s’habillant d’un groove autoritaire. Pour autant, Godflesh ne s’arrête pas ici à une réinterprétation d’influences : il devient ce qu’il montrera pleinement être par la suite, à savoir un monstre d’émotions, emporté par un souffle le guidant même au sein des ruines créées par
Streetcleaner. « I Wasn’t Born to Follow », « Monotremata » ou « Baby Blue Eyes » possèdent cette lumière particulière, fragile, se terrant derrière un son strident, un psychédélisme qui donne une texture presque aérienne à des compositions pourtant bétonnées (la guitare bourdonnante de Robert Hampson sur « Predominance » par exemple, répétant inlassablement les mêmes notes). Pour qui résume Godflesh à ses débuts, ce disque s’apparente à un croc-en-jambe où les quelques rappels d’autrefois (« Love, Hate (Slugbaiting) » prenant pour base un titre de Fall of Because) s’avèrent encore plus expérimentaux que le reste.
Oui,
Pure est bien différent de
Streetcleaner, raison pour laquelle beaucoup ne dépassent pas l’écoute du premier album de Godflesh. Il y a de quoi être désorienté au sein de cette musique pleine de détours, commençant à regarder vers des années 90 encore jeunes tout en développant son ailleurs à elle avec ferveur, quitte à laisser sur le bord de la route (le final « Pure II » et ses vingt minutes issues d’une improvisation d’une heure entre Justin et Robert, clairement un test de patience si on ne se laisse pas prendre par sa transe). Godflesh y casse alors cette image que l’on peut avoir de lui de loin, celle d’une arme de destruction massive froide et impassible. À partir de « Monotremata », on peut entendre les Anglais jalonner ce qui sera leur champs d’exploration pour les prochaines années, entre écrasement doom, stridences noise-rock, écorchage grunge et mysticisme ambiant. Tout cela afin d’atteindre une vitalité brisée, engourdie, d’une personnalité riche de son temps (une chose que développera davantage
Selfless).
Il y a malgré tout des titres implacables sur
Pure, notamment au sein de sa première partie. Mais là n’est qu’une part du talent de Godflesh, qui entête, questionne parfois, fait toujours voir un univers mental tel qu’on n’en rencontre pas autre-part. Ce qui fait de cette grosse heure une des plus difficiles d’accès de la bande, aussi fondatrice que fuyante, l’esprit s’écrasant et s’envolant, s’enfermant dans ses obsessions et respirant à trop grande bouffée, une douleur existentielle devenant douleur corporelle. L’histoire veut que Justin ait trouvé le patronyme de la formation dans l’idée que la musique est la voix de Dieu donnant accès à l’élévation spirituelle, l’ajout de la notion de chair étant là pour signaler l’intention d’obtenir cet effet à un niveau physique. Cela en tête, on peut dire que
Pure est l’œuvre où Godflesh a mérité son nom.
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