Disfuneral - Blood Red Tentacle
Chronique
Disfuneral Blood Red Tentacle
A l’instar du reste du monde la France n’échappe pas au phénomène de retour à un Death-Metal originel, direct et sans concessions tel qu’on pouvait l’entendre dans les années 80 et 90, et de ce côté-là Nancy et ses environs font presque office de bastion pour une nuée de jeunes formations pressées d’en découdre. Car après avoir vu l’arrivée récente de l’excellent DEATH BLOOD c’est au tour de DISFUNERAL de débouler en force avec un premier album particulièrement attendu, et dont on finissait par se demander s’il verrait le jour tant il s’est fait désirer. En effet si le quatuor s’était fait remarquer en 2017 avec un très bon Ep éponyme il n’avait plus rien ressorti depuis cette date, mais le moins que l’on puisse dire c’est que cette longue attente en valait largement la peine tant celui-ci va marquer l’année de son empreinte avec un disque impressionnant et violent, qui rend un hommage appuyé à AUTOPSY, DISMEMBER et surtout au ENTOMBED période « Left Hand Path » et « Clandestine ». S’étant donné les moyens de ses ambitions le combo s’est payé le luxe d’une pochette magnifique signée de l’inévitable Jon Whiplash et surtout d’une signature sur le qualitatif label de Cleveland, preuve du niveau proposé par les Lorrains qui ne sont d’ailleurs que le deuxième groupe de l’hexagone (après IN SHADOWS AND DUST) à avoir leur place sur son catalogue.
D’ailleurs il ne va pas falloir longtemps pour s’apercevoir du super boulot fourni par les mecs tant « Feastering The Undead » va nous emmener en plein Stockholm d’il y’a plus de trente ans de par un son grassouillet et dégoulinant au possible, et une écriture sobre et sans compromis qui ne va nullement s’embarrasser de futilités. Car cette plage (à l’instar des suivantes) ne va jamais s’éterniser en longueur tout comme l’exécution qui ne fait pas dans la dentelle et où l’alternance rythmique est de mise, tant ça varie ici entre passages rampants à la noirceur totale et autres plus explosifs et primitifs où la vitesse est primordiale. Porté par des riffs implacables, une basse étouffante et un frappeur qui ne s’encombre pas d’excès techniques ce titre voit également une voix puissante amener encore de la densité supplémentaire au milieu des variations nombreuses et qui vont être régulières sur le disque, que ce soit via l’opaque et équilibré « Eternal » ou la conclusion intitulée « Funeral Maze » qui met en valeur toute la palette de jeu des gars. Mais entre tout cela ceux-ci ont la brillante idée de proposer d’autres morceaux à la base certes semblable, mais légèrement différents dans la façon d’être joués histoire de densifier l’ensemble et d’éviter de se répéter trop vite (piège dans lequel il est facile de tomber dans ce style si dépouillé). Point de cela sur les expéditifs et débridés « Dissolved »et « Maim, Kill, Burn » qui outre être ultra-courts misent ici majoritairement sur la vitesse, sans pour autant être répétitifs tant les accents Crust et Punk du premier cité se montrent impériaux pour un bon pogo dans la fosse et dont le rendu lorgne largement vers l’œuvre de Chris Reifert et ses sbires. Si cette compo ne baisse jamais l’allure et sert de gros défouloir bien rentre-dedans on peut presque en dire autant de la seconde, vu que ça reste quasiment en continu sur l’accélérateur et que ça voit même l’ajout de blasts afin d’agrémenter la violence déjà intense aidés par des riffs semblant être tirés de l’entité de Fred Estby et Matti Kärki.
Effectivement on sent en permanence que la bande prend son pied en jouant son répertoire, et ce même quand elle densifie sa musique en y ajoutant des passages au groove contagieux et propices au headbanging dont le rendu est tout aussi attrayant et cohérent comme via la redoutable doublette « Devourer Of Light » / « Blood Red Tentacle » (à la construction assez identique). Laissant ici plus de place aux ralentissements et à la lenteur via une facette Doom poisseuse plus présente, l’ensemble prouve que ses créateurs maîtrisent facilement leur sujet tant ils restent aussi accrocheurs en mode bridage que quand ça s’excite au maximum. On y voit en effet un sentiment d’étouffement et d’obscurité intégrale pointer le bout de son nez et être totalement jouissif, malgré la pression ambiante (comme cela se verra encore sur l’inquiétant et massif « Dead » à la vitesse absente). D’ailleurs ces accents groovesques vont trouver leur paroxysme sur le remuant et mid-tempo « Lord Of Discord » qui donne une furieuse envie de se dandiner et de secouer la tête, de par son entrain contagieux et ses accents Punk forts sympathiques qui finissent d’achever les corps les plus résistants au milieu de cette crasse et d’humidité maximum. Si tout cela pue la mort, la sueur et l’authenticité c’est aussi grâce à cette production à l’ancienne, puissante et qui sonne live… d’ailleurs tout ici est taillé pour la scène où il est certain que ça va faire un carton tant le rendu est imparable de bout en bout et ne baisse jamais en attractivité.
Simple mais redoutablement efficace et bourré d’énergie sans être linéaire (malgré sa sobriété dans tous les domaines) ce long-format frappe très fort en ce début d’année et a déjà de solides arguments pour figurer dans les bilans annuels, et nul doute qu’il sera en très bonne place. Autant dire qu’avec tout ça on est déjà en présence d’un futur grand de la scène nationale, et qu’il y’a tout à parier qu’il va gagner en ampleur dans les années à venir même si déjà pour le moment il fait déjà très mal et écrase tout sur son passage, confirmant que notre beau pays a de la ressource et qu’en matière d’extrême il est des plus intéressants au niveau international, mais ça on le savait déjà et on ne s’en lasse décidemment pas.
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