Veštac - Ključ Na Nebu, Katanac U Moru
Chronique
Veštac Ključ Na Nebu, Katanac U Moru
Sombre entité dont on ne sait rien si ce ne sont les pseudonymes des deux protagonistes embarqués derrière cette mystérieuse affaire (à savoir Svarog et Drekavac), Veštac est l’auteur de quelques sorties particulièrement dignes d’intérêt pour quiconque prête attention à ce genre d’étranges parutions aussi malfaisantes que mal produites. La première d’entre elles est cet album paru en août 2020 sur le sulfureux label italien Asrar Productions (Black Imperial Blood, Ceremonial Crypt Desecration, Enshroud, Forbidden Tomb, Ifernach, Mäleficentt...). Intitulé Ključ Na Nebu, Katanac U Moru que l’on pourrait traduire en français par : « La clé dans le ciel, la serrure dans la mer », celui-ci réussit à attirer l’oeil dès le premier regard grâce à son artwork particulièrement engageant évoquant encore une fois de sombres histoires de vampires et autres créatures de la nuit.
D’allure modeste, ce premier album offre à l’auditeur curieux quatre compositions dont la durée totale n’excède pas les trente-cinq minutes. Aussi, comme évoqué un petit peu plus haut et suggéré par tout un tas d’autres marqueurs plus ou moins capables de vous mettre sur la piste (le label derrière cette sortie, l’artwork en noir et blanc, ce logo particulièrement affûté, la langue évoquant les origines géographiques de la formation...), Veštac verse dans un Black Metal à la production pour le moins rudimentaire et famélique. Une musique décharnée et volontairement produite avec les pieds pour des atmosphères tout simplement plus justes et plus authentiques. Comme toujours, cela ne conviendra pas à toutes les oreilles mais il faut bien avouer qu’il y a pourtant quelque chose de fascinant derrière cette abrasivité et le pseudo-amateurisme de ces productions faussement bancales.
Comme toujours avec ce genre de groupe particulièrement rétrograde dont la démarche s’inscrit dans un respect sans faille de traditions ancestrales, Veštac n’invente rien et se contente de reprendre à son compte une formule vieille comme le monde, puisant notamment son inspiration du côté des scènes norvégiennes et américaines des années 90. De fait, le duo s’engouffre dans un Black Metal particulièrement sec et abrasif mené pied au plancher à coup de longues séquences haletantes ("Hrana Za Mrtve", "Izvor Moci") pour ne pas dire hypnotiques ("Crevne Lobanje", "Nepoznati Grob"). La voix, arrachée et meurtrie, hurle et grogne ses complaintes et autres vindictes qui très vite semblent se perdre dans le lointain alors qu’aux avant-postes les guitares grattent leurs riffs rudimentaires et décharnés au rythme d’une batterie dépouillée et volontaire dont les variations sont rares. Pourtant, malgré effectivement un caractère parfois répétitif (mais non rébarbatif), Veštac n’est pas sans apporter un soupçon de relief à sa musique. Aussi, par un travail de transitions ou tout simplement de changement de rythmes ("Crevne Lobanje" à 0:59 et 3:06, "Nepoznati Grob" à 3:27, "Hrana Za Mrtve" à 3:32, 4:47 et 5:58, "Izvor Moci" à 1:47...), le duo apporte ce qu’il faut de variations à des morceaux relativement longs (entre six et dix minutes) pour ne pas donner à l’auditeur le sentiment de subir encore et encore les mêmes interminables patterns...
Si sa formule ne transcendera pas les frontières du genre, le Black Metal de Veštac n’en est pas moins empreint d’une certaine personnalité qui fait ici tout le charme de ce premier album. En effet, on retrouve sur Ključ Na Nebu, Katanac U Moru quelques passages purement ambiants. De "longues" séquences de plusieurs minutes (de 6:40 jusqu’à 10:07 sur "Nepoznati Grob", dès l’entame de "Hrana Za Mrtve" et ce jusqu’à 2:37 ou encore plus loin à compter de 5:58, les premières secondes de "Izvor Moci") où les instruments s’effacent au profit d’étranges atmosphères où se mêlent murmures fantomatiques, samples indescriptibles, voix inquiétantes ainsi que des hululements, croassements et autres bêlements… Plus subtiles, ce violon dispensé plus ou moins généreusement et discrètement sur "Crevne Lobanje", "Hrana Za Mrtve" et "Izvor Moci" et dont les mélodies grises et mélancoliques évoquent cette région des Balkans dont semble issue la formation et renforcent ainsi grandement l’identité de Veštac tout au long de ces trente-quatre minutes. Certes, cela peut sembler bien maigre mais c’est néanmoins suffisant pour que ce premier album réussisse à se distinguer du reste.
S’il s’inscrit dans le registre d’un Black Metal cru et décharné avec en effet tout ce qui qualifie un album de ce genre (production famélique, rythmiques entêtantes et répétitives, riffs dépouillés, atmosphères abrasives et malfaisantes...), Ključ Na Nebu, Katanac U Moru réussi pourtant à entretenir un semblant de personnalité que le duo continuera d’ailleurs de cultiver par la suite (mais ça, c’est une autre histoire que l’on verra un petit peu plus tard). Alors c’est certain, pour apprécier ce premier album il faudra comme tous les autres disques estampillés "Raw Black Metal" être en mesure de s’acoquiner avec ce que beaucoup considèrent comme des défauts rédhibitoires (notamment cette production bancale) mais si vous en êtes capables, Ključ Na Nebu, Katanac U Moru devrait à n’en point douter réussir à vous séduire par son côté franc et direct mais également par ses prises de positions qui en font une sortie un poil plus originale et étrange que d’habitude.
| AxGxB 28 Septembre 2022 - 960 lectures |
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