Tabahi - Thrash For Justice
Chronique
Tabahi Thrash For Justice
Si régulièrement à Thrashocore nous recevons des demandes de chroniques venant de contrées exotiques où l’on a peu l’habitude d’entendre du Metal (Inde, Thaïlande, Costa-Rica...), on n’avait en revanche jamais eu jusqu’à présent dans notre base de données de groupes basés au Pakistan. Il est vrai que le pays n’est pas franchement réputé pour son ouverture d’esprit en matière de culture occidentale, et il faut donc reconnaître un certain courage au guitariste Faiq Ahmed et à ses acolytes de jouer un style si rugueux que le Thrash dans cet endroit où la charia et l’intolérance font parler d’eux tous les jours. Il serait effectivement facile pour eux d’être la cible de prêcheurs radicaux et/ou du peuple fanatisé qui les ferait rapidement passer pour des hérétiques et blasphémateurs tout juste bons à être lapidés en public et exécutés sans sommation, comme cela est déjà hélas arrivé là-bas. Pourtant malgré ses contraintes récurrentes et la pauvreté endémique TABAHI continue à vivre de façon plus ou moins régulière mais sans jamais baisser les bras ni les armes, car s’il a vu le jour en 2008 (et délivré jusqu’en 2014 un Ep puis un album) il a fallu attendre l’an dernier pour que les choses repartent avec la publication d’une multitude de titres inédits. Tout cela réuni ensemble a fini par aboutir à la réalisation d’un second long-format impeccable et balisé, et à l’influence américaine plus que visible et en particulier vers celle d’EXODUS.
Car tout ici nous renvoie du côté de Gary Holt et ses sbires et ce de façon très marquée, vu que les parties de batterie s’inspirent furieusement de celles de Tom Hunting et le timbre du chant lorgne fortement vers celui si reconnaissable de Steve Souza, tout ça sans compter les riffs et solos aux ressemblances frappantes sur certains passages. Si évidemment le trio de Karachi est encore loin d’être au niveau des Californiens il n’a cependant pas à rougir, tant ce qu’il délivre durant les dix morceaux est de très bonne tenue et s’écoute très facilement. En effet si chacun des membres possède un solide bagage technique il n’en fait jamais des caisses et de fait cela va permettre à l’ensemble du disque d’être particulièrement remuant et entraînant, tout ça en ne s’éternisant jamais sur la durée (vu qu’aucune des compositions ne va au-delà des quatre minutes). Et cela va être mis directement en avant dès l’ouverture impeccable de cet opus (ainsi que sur sa conclusion intitulée « F.U.N. ») via le très bon « Breaking News » porté par une rythmique majoritairement rapide, mais qui sait montrer toutes ses variations de façon régulière via du mid-tempo imparable et rythmé et quelques passages lents pour mieux redémarrer ensuite. Si tout ça sonne comme du déjà entendu des paquets de fois l’exécution y est impeccable et d’une totale efficacité vu que l’envie de secouer la nuque se fait instantanément sentir, et ce que les plages soient dépouillées au maximum comme plus travaillées. En effet le débridé et simplissime « Run For Your Life » (aux accents légèrement Punk) va confirmer cela, à l’instar du très court et primitif « Obsidian » qui ne s’encombre pas de futilités et joue à fond sans jamais lever le pied tout en conservant cette ambiance typiquement d’outre-Atlantique à l’attractivité sans failles. D’ailleurs que ce soit via les équilibrés et agréables « Kingpin », « Fatal Torture » et « Outcast » ce groove et cette envie d’en découdre vont rester en permanence et offrir un moment d’écoute très agréable qui file à toute allure, avec aucune autre prétention que celle de vider la tête... et à ce jeu les trois compères y parviennent aisément tant leur écriture est affûtée, agressive mais sans jamais en faire des caisses.
Et même si l’on pourra leur reprocher aux mitigés « Politricks » et « Survive Or Die » d’être un peu en roue-libre et moins inspirés (sans pour autant être ratés), et au folklorique « Lal Shahbaz Qalandar » de se louper en voulant mélanger musique traditionnelle et électrique (SEPULTURA y étant bien mieux parvenu), pour le reste il n’y a que du positif à tirer de cette galette facilement assimilée et digérée - et qui montre que le Metal est décidemment présent partout sur la planète et ce même dans les coins les plus hostiles et auquel on ne penserait pas forcément de prime abord. Bonne petite réalisation de deuxième division il est évident qu’elle ne changera absolument rien au genre mais elle a tout pour offrir un plaisir constant, tant elle est suffisamment fluide et instinctive pour qu’on s’y laisse prendre avec facilité vu que c’est mené avec conviction, sincérité et authenticité. Bref tout à fait ce qu’on demande à ce genre de galette, et quand on imagine les difficultés qu’il y a dû avoir pour qu’elle voit le jour on ne peut que s’incliner et applaudir des deux mains pour la motivation et la prise de risques fournie, dont beaucoup chez nous feraient bien de prendre de la graine au lieu de passer leur temps à geindre et se plaindre inutilement de manière permanente et juste insupportable.
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