Creeping Fear - Realm Of The Impaled

Alors qu’il fête en ce moment ces quinze années d’existence l’heure est venue pour le combo du Val-d’Oise d’offrir en cadeau à ses fans un nouvel album très attendu, car son prédécesseur « Hategod Triumph » avait confirmé qu’on était en présence d’un nom fait pour durer au sein de la pléthorique scène hexagonale. Ayant pris l’habitude de publier un long-format tous les quatre ans le quatuor revient donc ici avec le troisième volet de ses aventures, qui reprend les choses où elles en étaient restées précédemment... il n’y a qu’à voir la pochette de Paolo Girardi qui est presque un copier-coller de la précédente, mais en moins bon. Hormis la couleur qui change pour le reste on y retrouve la même représentation diabolique et sa vision toute personnelle des enfers, mais cela n’a aucune importance tant le contenu proposé en interne est du même acabit que d’habitude et fait toujours aussi mal aux cervicales. Ce qui ne change pas également c’est cette instabilité chronique autour du binôme originel Clément Ducouret/Gabriel Hammel qui voit encore une fois intégrer de nouveaux membres à la basse et batterie... bien que là encore l’impact de ces changements soit nul, tant le talent du duo n’est plus à démontrer et qu’il sait toujours bien s’entourer.

Et effectivement une fois la courte introduction terminée on va retrouver immédiatement tout ce qui fait le charme de CREEPING FEAR via le martial et écrasant « Dismembered And Thrown Into Black Flames » qui va proposer nombre de roulements et de cassures, sur fond de rythmique ultra lourde et de blasts débridés... créant ainsi un rendu suffocant qui fait très mal aux cervicales, tant c’est massif et porté par une exécution sans failles vu que le niveau technique est encore monté d’un cran. Car sans tomber dans la technicité outrancière les mecs ont encore élevé leur jeu tout en gardant leur fluidité permanente, la preuve avec l’équilibré « Demonic Ascent » qui démarre de façon très sombre avant de jouer sur l’alternance permanente où l’écriture fait mouche une fois encore, portée par une violence furieuse qui se greffe à des ralentissements imposants... un point qui explose de façon plus marquée sur le monstrueux « Realm Of The Impaled » (où les relents de MORBID ANGEL se font sentir une fois encore). Car proposant en prime un dynamisme impressionnant cette plage livre une profondeur plus marquée, via l’apport de passages rampants imposants et d’autres plus énervés qui donnent envie d’en découdre en jouant ainsi sur tous les tableaux, tant le sens du riff des deux fondateurs conjugués à leurs solos font merveille une fois de plus et offrent en rabe quelques ambiances aérées au milieu de ce chaos impénétrable et suffocant.

D’ailleurs on pourra dire la même chose de la seconde moitié de cette galette tout aussi impeccable que la première, il suffit d’écouter le court et rentre-dedans « Torture Wheel » pour en être convaincu (si l’on ne l’était pas encore) avec ses trois parties distinctes qui misent sur les extrémités. Tout cela sans oublier quelques parties tribales histoire de densifier encore un peu plus l’ensemble qui nous renvoie vers les débuts du groupe avec force et efficacité, un sentiment qui va d’ailleurs se retrouver plus loin via l’excellent « Feast Of Violence » à la construction assez similaire. Cependant cette fin de d’enregistrement va clairement miser sur un ralentissement généralisé qui va apparaître largement sur le monstrueux « Et ils se Couvrirent de Gloire », où le Doom comme le mid-tempo épique vont se retrouver à égalité avec les autres passages plus classiques où ça accélère fermement comme ralentir fortement. C’est fluide et sans fausses notes en jouant sur le parfait équilibre des forces en présence et ça donne un des meilleurs morceaux de ce cru 2025 qui pourtant n’en manque pas, à l’instar de « Obscene Sacrifice » où techniquement ça va encore monter d’un cran aidé notamment par un solo mélodique impeccable en guise d’ouverture avant que l’ensemble ne propose nombre de cassures récurrentes sans qu’on ne perde le fil, vu que tout reste cohérent de bout en bout prouvant que les Franciliens ont encore passé un cap musical. Du coup on ne sera pas surpris que la conclusion intitulée « Cursed Endeavor » soit plus ambitieuse, plus longue et aussi plus noire que tout le reste vu qu’on est pris dans un étau constant sans espoir de s’en sortir, tant le grand écart y est marqué de façon plus conséquente et clôt ainsi un enregistrement qui a tout pour figurer dans les bilans de fin d’année confirmant que ses auteurs sont dans le haut du panier du genre en France.

S’ils manquent encore de reconnaissance nul doute qu’avec cette réussite impressionnante ils vont convaincre les derniers indécis comme les puristes, tant il y a tout ici pour plaire à la majorité car s’ils continuent d’évoluer ils ne se renient jamais et proposent à chaque fois une réalisation supérieure aux précédentes et qui reste dans sa droite ligne. Sûre de sa force comme de sa maturité et possédant une confiance en soi inébranlable à l’heure où la concurrence est rude dans le Death national, l’entité prouve encore une fois qu’elle est désormais au sommet de la hiérarchie avec tout ce qu’il faut pour y rester. En effet on sent qu’elle en garde encore sous le coude et qu’elle n’a pas tout dit, vu qu’on est bluffé à chaque fois qu’elle revient par son appétit vorace et le fait qu’on soit directement happé dès les premières notes sans jamais s’ennuyer. Autant dire qu’il n’y a ici rien à envier aux ténors d’outre-Atlantique et que viser les frontières extérieures de notre pays est désormais permis pour la bande, et elle le mérite surtout avec ce line-up qui est sans doute le meilleur qu’elle ait eu depuis ses débuts qui malgré son aspect assez juvénile a suffisamment de vécu pour tenir tête aux cadors et faire du mal sur scène, où musicalement l’ensemble prendra encore une fois toute son ampleur pour un plaisir communicatif et partagé de bonne grâce.

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