Si la musique adoucit les moeurs, elle aide aussi à rendre certaines périodes de la vie plus tolérables. Bien qu’à titre personnel je n’ai pas eu une adolescence particulièrement compliquée, pouvoir me plonger corps et âme dans la musique de tous ces groupes, ceux qui ont marqué mon adolescence, m’a sûrement permis d’oublier au moins momentanément mes petits soucis du quotidien de collégien / lycéen, mon manque de confiance et mes insécurités de grand dadais mal dans sa peau.
Naturellement, si je vous raconte tout cela, c’est parce qu’on se connait bien vous et moi mais aussi et surtout parce que Deftones est évidemment de ces groupes qui ont compté à un moment de ma vie. Et même si mon intérêt pour la formation s’est quelque peu estompé durant quelques années, notamment après la sortie de l’excellent
Saturday Night Wrist, j’ai fini par y revenir frappé comme bon nombre d’auditeurs vieillissants (mais pas vieux cons) par ces vagues de nostalgies qui, déclenchées par une discussion, un film, une chronique ou un élément du quotidien tout ce qu’il y a de plus anodin, vont et viennent et vous submergent sans trop prévenir. Sur les rails depuis maintenant presque quarante ans (formation en 1988 tout de même), les Californiens auraient pu comme bien d’autres groupes après autant d’années de services et quelques galères dont ils se seraient évidemment bien passées (à commencer par l’accident et le décès de Chi Cheng) commencer à perdre petit à petit en efficacité et plus généralement en pertinence (même si la chose se discute avec un album comme
Gore) mais il suffit de lire les avis concernant ce dixième album pour se rendre à l’évidence qu’il n’en est rien. Absolument rien.
Après le poney, la chouette et les flamands roses, Deftones a fait le choix d’illustrer son nouvel album avec cette fois-ci un hypnotique serpent albinos. Si celui-ci est dans la majorité des cas apposé sur un fond vert, certaines éditions plus rares le place également sur un fond bleu ou bien encore sur un fond violet ce qui devrait forcément susciter quelques envies pas toujours très rationnelles chez plus d’un collectionneur. Côté production,
Private Music de son petit nom marque le retour de Nick Raskulinecz (
Diamond Eyes,
Koi No Yokan) derrière les manettes pour un résultat qui évidemment, au-delà d’avoir suscité pas mal d’enthousiasme avant même la sortie du premier single, ne souffre d’aucun véritable défaut et offre à ces onze nouvelles compositions l’appui nécessaire pouvoir espérer convaincre.
Si
Ohms avait su plus ou moins remettre les pendules à l’heure après un
Gore assez plat (du moins de prime abord) et déroutant,
Private Music parvient d’emblée à séduire par ses nombreuses évocations du passé. Celles d’
Adrenaline,
Around The Fur et
White Pony auxquelles viennent s’ajouter quelques pointes de
Saturday Night Wrist et de
Koi No Yokan. Bref, tout ce que le groupe californien a fait de mieux tout au long d’une carrière pourtant essentiellement jalonnée de succès (d’ailleurs, soit dit en passant, l’éponyme mérite mieux que le manque de reconnaissance dont il est encore victime aujourd’hui mais ça, on y reviendra). Alors évidemment, renouer avec Deftones c’est savoir parfaitement où l’on met les pieds. Aussi n’attendez pas de ce nouvel album qu’il redéfinisse les limites et les codes de ce qui caractérise la musique de nos cinq Californiens (marquée ici par l’intronisation officielle de Fred Sablan (ex-Marilyn Manson) en tant que "nouveau" bassiste du groupe) mais plutôt qu’il vous offre l’opportunité de renouer avec des émotions que nous n’avions pas oubliées mais que l’on n’avait néanmoins plus vraiment ressenti à l’écoute d’un nouvel album de Deftones depuis la sortie du très bon
Koi No Yokan en 2012 (même si
Ohms s’en approchait tout de même grandement).
Soucieux de marquer les esprits sans attendre, les Américains vont avec "My Mind Is A Mountain" sortir le grand jeu dès les premières secondes et cela à coups de riffs étonnamment cadencés et lourds qui réjouiront probablement autant les auditeurs de longue date qu’un Stephen Carpenter qui à l’issu d’un
Gore sur lequel il ne voulait même pas jouer a effectivement retrouvé des couleurs. Alors n’ayez crainte, je ne vais pas vous faire l’article de chaque titre ici présent (exercice que je n’apprécie guère) mais plutôt confirmer à mon tour ce qui a déjà été dit un petit peu partout que ce soit dans la presse spécialisée, sur les réseaux sociaux, les forums ou d’autres webzines qui tous s’accordent à dire que
Private Music est effectivement un excellent cru sur lequel les Américains nous reviennent particulièrement revigorés. De "Locked Club" et sa dynamique chaloupée à "Ecdysis" et sa courte introduction synthétique des plus réussies en passant par quelques bribes de "Souvenir", "CXZ", "Infinite Source", "Milk Of The Madonna" très inspiré par le Deftones des années 90, "Cut Hands" ou "Metal Dream", les compositions plutôt pêchues mêlant sonorités Nu Metal (à la sauce deftonienne), Post-Hardcore à tendance Shoegaze et Shoegaze à tendance Post-Hardcore ne manquent pas et donnent le ton d’un album tout en énergie mais aussi en nuances. En effet, en plus d’être ponctué par quelques séquences et titres également plus calmes et introspectifs tels "Souvenir" (en partie), "I Think About You All The Time" ou "Departing The Body", on notera la manière plus subtile et moins encombrante dont Frank Delgado habille ces onze nouvelles compositions de ses sonorités synthétiques futuristes et éthérées mais aussi et surtout comment Chino, lui qui n’a pas toujours été très en voix ces dernières années (en tout cas sur les planches), réussi le tour de force de sonner comme le fougueux et versatile chanteur qu’il était en 1997. Un panel toujours aussi large d’intentions et d’émotions offrant une dose d’énergie et de hargne supplémentaire lors des moments les plus agressifs et dynamiques de l’album tout en étant toujours capable de changer aussi facilement de registre le temps de passages et autres refrains mélodiques toujours aussi envoûtants et imparables.
Sans être tout à fait inattendu dans la mesure où
Ohms était déjà sur la bonne voie à sa sortie,
Private Music constitue néanmoins une excellente surprise pour tous les fans du Deftones de la première heure qui retrouveront ici tout au long de ces quarante-deux minutes le charme des premiers albums du groupe californien. Bien sûr ce dixième longue-durée porte sur lui quelques traces de ces évolutions passées ayant conduit à des sorties parfois conspuées (
Gore et
Diamond Eyes en tête) mais c’est exact, les onze compositions de ce nouvel album sont franchement chouettes et attestent en effet qu’après toutes ces années de carrière Deftones en 2025 se porte toujours comme un charme.
Par Jean-Clint
Par Jean-Clint
Par Lestat
Par Jean-Clint
Par xworthlessx
Par Ikea
Par AxGxB
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par Lestat
Par Krokodil
Par Niktareum
Par Jean-Clint
Par Jean-Clint
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène