Evergrey - The Dark Discovery
Chronique
Evergrey The Dark Discovery
Ici débute, l’histoire d’un groupe avec qui je vis une magnifique aventure !
Mais, autant le dire tout de suite, je ne prétends pas vous faire découvrir (ou non) une musique extraordinaire qui va révolutionner votre vie de mélomanes, ni vous dire que ce groupe est indispensable pour tout metalleux qui se respecte. Vous allez lire un ressenti entièrement personnel d’une musique que j’ai découverte seule, et si pour moi ce fut une véritable révélation, tant le son, l’ambiance et l’univers d’Evergrey me touchent, je ne prétends pas qu’il en sera de même pour vous. Que tout mal entendu soit écarté.
Bref, si vous le voulez bien, entrons sans plus tarder dans le vif du sujet.
Formé en 1995 ce quintet, dont le line-up n’est jamais identique d’un album à l’autre, repose principalement sur les épaules charismatiques d’un seul homme, le grand Tom S. Englund, au chant et à la guitare. Sa voix, si particulière –j’y reviendrai- ses paroles ainsi que son jeu de guitare forment les bases de leur univers, de leur son si particulier.
Le plus difficile quand on aborde la musique d’Evergrey, même après de nombreuses écoutes, est de pouvoir la ranger dans un style de metal précis. Ni heavy parce que c’est beaucoup plus sombre, ni doom parce que ce n’est pas aussi lent, ni black parce qu’il n’y a pas cette haine, ni thrash parce qu’il y a beaucoup de passages et d’instruments plus atmosphériques, Evergrey a souvent été placé dans le progressif, ou le power. Oui mais voilà, eux, ne considèrent pas leur son de cette façon et selon leurs propres mots, ils feraient du heavy/dark melodic. A vous de juger ! Toutefois, ce sont leurs multiples cassures de rythme qui ressortent de leur musique et il est convenable de présenter Evergrey comme un groupe de progressif si l’on ne considère que cet aspect de leur création musicale.
Bon après cette tentative de définition un peu ennuyeuse de leur style, passons maintenant aux choses sérieuses.
Nous sommes en 1996 lors de l’enregistrement de ce premier album et le son, bien qu’il soit bon, n’est pas à l’image du son qu’ils ont acquis aujourd'hui.
L’album commence par des guitares et une batterie qui déboulent en un riff saccadé, avec quelques notes de piano en fond ; formule qui s’avérera être la marque de fabrique du groupe. Et puis la voix arrive. Un timbre qui ne ressemblait (et ne ressemble toujours pas) à un autre timbre connu. Alors que dans le heavy depuis Helloween, toutes les voix se ressemblent, la voix d’Englund m’avait choquée à la première écoute. Un peu jazzy mais hargneuse, chaleureuse mais amère, langoureuse mais grésillante, la voix de Evergrey participe pour beaucoup à l’identité sonore du groupe et après une écoute plus attentive, on se rend compte à quel point elle est une valeur ajoutée sûre à la musique, qui aurait perdu de son charme avec une voix plus "classique". Cependant celle-ci est mixée avec pas mal de résonance, ce qui la rend plus distante, moins percutante que sur les albums suivants, bien qu’elle conserve quand même son caractère et son côté mordant, agressif.
Des chœurs se font entendre dès le premier titre, le clavier impose petit à petit sa présence qui restera tout de même assez discrète sur cet album. En quelques secondes, Evergrey nous plonge dans leur univers qu’ils développeront au cours des 5 albums qu’ils ont faits jusqu’à présent en s’améliorant toujours à chaque fois.
Les lignes des guitares et basse, sont simples, mais très saccadées ce qui assure le côté rentre dedans de la musique en ayant toujours cette dimension heavy car les riffs, après une intro souvent brutale, s’alourdissent sur les couplets et refrains. La batterie joue un rôle essentiel dans la composition des chansons du groupe. C’est elle qui introduit toutes les cassures de rythme qui se succèdent tout au long des titres, ou qui les soutient, qui les enrichit, qui les met particulièrement en valeur comme sur "December 26th", où le passage instrumental à 2 :40 est un concentré de variations rythmiques qui s’enchaînent avec une fluidité et une logique des plus jouissives, tout comme sur "Shadowed"et sur quasiment tous les titres !
Ces passages structurés, complexes sont récurrents dans la musique d’Evergrey et montrent que ces musiciens ont une maîtrise déjà certaine de leur instrument et de la composition ce qui n’est pas toujours le cas lors des premiers albums de bien des groupes. Mesures impaires, alternance du binaire et du ternaire, syncopes et cassures de tempo sont des notions chères au groupe qui n’hésite pas à en user mais sans en abuser, comme par exemple sur la fin de "Beyond Salvation" …
Après "Blackened Dawn", "December 26th", et "The Dark Discovery", qui ouvrent cet album sur une note assez brutale, "As Light is Our Darkness", titre court entièrement joué à la guitare acoustique résonnante, nous offre une autre dimension de la musique du groupe. Une dimension beaucoup plus intime, solitaire et triste sans être dépressive. Ce titre que l’on croit d’abord être une courte chanson, n’est en fait que l’introduction du suivant qui en reprendra les paroles et les lignes de chant avec cette fois les autres musiciens derrière pour assurer le volume sonore. On retrouvera ce concept sur le troisième album du groupe, "In Search of Thruth", mon préféré…
La voix d’Englund offre ses multiples facettes durant la progression de "The Dark Discovery" même si la tendance est toujours à la colère, à l’amertume (j’aborde les thèmes des paroles un peu plus loin). Cependant ses lignes de chant ne sont pas toujours très faciles à cerner dès les premières écoutes, tout comme les couplets et les refrains. Mais par la suite, certaines phrases chantées avec émotions et authenticité vous restent dans la tête, tout comme les refrains de "Closed Eyes", "Shadowed", "To Hope is to Fear".
Pour son premier album, Evergrey est allé fouiller dans son potentiel pour en tirer toutes les nuances afin que chaque titre ait son petit son en plus, sa particularité. Une voix off qui parle, des chœurs masculins extrêmement graves et dramatiques sur la fin de "Trust and Betrayal" qui mettent en valeur la dimension religieuse, gothique de la musique, l’intro de "Shadowed" au violoncelle ou celle de "When the River Calls" très décousue, des solos et des ponts qui sont tous différents et tous recherchés, des phrases qui ressortent, entre le chant et le cri, des mélodies de clavier simplissimes mais si présentes, bref, tout titre est à retenir et à écouter attentivement tant on n’en fait pas le tour si rapidement. L’album se termine en un passage instrumental où cette fois c’est le piano qui a la vedette mais toujours appuyé par les guitares rythmiques et la batterie. Et puis le son meurt, résonne encore mais se disperse, une porte grince, claque et c’est la fin.
Mais je ne peux arrêter l’énumération de ces petits détails sans parler d’un crucial qui relève d’un cran encore le charme et la puissance de la musique. Il s’agit, lors de quelques apparitions furtives, comme sur "When the River Calls" d’une voix féminine. Mais quelle voix ! Avec chaleur, profondeur et intensité, la voix de la femme d’Englund, Carina, nous fait-elle frissonner. On en voudrait plus. Et Evergrey nous en redonne lors de leur magnifique et unique duo, qui demeure à ce jour l’une des plus belles chansons du groupe, "For Every Tear that Falls". Sur une introduction au piano, Tom chante presque avec spontanéité, en suivant une ligne de chant soumise à ses émotions. Carina chante deux phrases dont les échos nous parcourent encore le dos mais ce n’est rien….ce n’est rien comparé à la tension qu’elle va créer, à l’ambiance nouvelle qui va prendre place, au suspense qui va grandir pour ensuite exploser, amplifié par l’entrée de la batterie puis des guitares. La fin de la chanson est emphatique, tout simplement magnifique, leur deux voix mêlant leur rancune et leur tristesse plein d’amertume, à la perfection.
Les paroles sont de Tom pour la plupart sauf, pour "As Light is Our Darkness". Elles sont toutes à la première personne et on peut y lire les tourments d’un homme solitaire malgré lui, apeuré, souffrant d’un mal être intérieur qui est plus que palpable dans son chant. La mort, est la maîtresse, la mort est pour Englund, sa source d’inspiration, son icône qui le fascine autant qu’il la rejette et la déteste, qui la hurle autant qu’il la pleure. Tout leur artwork, même s’il n’est pas de très bonne qualité sur cet album, transpire de cet état d’esprit gothique et gris dont le nom du groupe est la parfaite traduction : (for)Ever-Grey.
Je sais que je pourrais en écrire encore beaucoup sur ce groupe, mais j’en garde pour les chroniques à venir dont celle de leur double DVD live, sorti en septembre 2005.
Pour conclure (oui cher lecteur c’est enfin la conclusion…), est Evergrey un groupe à part, qui, je pense, à souffert d’un manque de communication le concernant, dans la scène metal à sa sortie, ce qui peut justifier le nombre encore trop faible de personnes les connaissant. Cependant, je pense qu’il peut constituer le point de rencontre pour les amateurs de heavy, de doom et de démonstratif.
Keep up the dark side…
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