ATTENTION : Avant toute première écoute de cet album, veillez vous munir d'un caisson de boîtes d'aspirines et d'un casque audio.
Dense. Ambitieux. Ce sont les mots que l'on pourrait utiliser pour qualifier ce « A Night At The Opera ». Un album qui a la lourde tâche de succéder à « Nightfal In Middle Earth », considéré par beaucoup de fans de la formation allemande comme l'opus le plus abouti de la discographie de Blind Guardian. Une nouvelle fois, la gestation fut lente... En effet les Teutons ont pris leur temps – pas moins de quatre années- pour accoucher de « A Night at The Opera », dont l'objectif est double : proposer quelque chose de nouveau (Blind Guardian a toujours voulu éviter les redites), et dépasser « Nightfall In Middle Earth ». Mais « A Night At The Opera » divisa le public du Guardien Aveugle. En effet, certains lui reprochèrent d'être trop chargé et compliqué. Or, ANATO est l'un de ces albums qu'il faut apprivoiser et qui dévoile ses richesses au fur et à mesure des écoutes.
ANATO est pourtant la suite logique de NIME, qui montrait la volonté de Blind Guardian de s'engager dans un style plus raffiné que le heavy speed aux accents thrash de la trilogie « Tales Of The Twillight World » « Somewhere Far Beyond » et
« Imaginations From The Other Side ». Mais le concept, effleuré sur NIME est ici poussé à son paroxysme. L'accent est très clairement mis sur le chant. Les chœurs sont omniprésents conférant une lourdeur pachydermique à l'ensemble, sur les refrains comme sur les couplets et la voix de Hansi est souvent doublée dans les aigus ou les graves, si bien que celui chante réellement seul très rarement. C'est tout à fait flagrant sur le début de the "Soulforged", où Hansi a à peine fini une ligne de chant, qu'une autre reprend! Des orchestrations, réalisées avec un soin particulier, viennent appuyer cette orgie vocale. Par contre, les guitares semblent laissées pour compte dans le mix. Exit les rythmiques saturées et musclées, sauf sur l'intro de "Punishment Divine", auxquelles le groupes nous avait habitués sur les trois albums précédement cités! Leur son est ici clair et très travaillé, plus synthétique.
Toujours dans cette optique d'innovation, le groupe a également momentanément délaissé dragons, princesses donjons et hobbits pour arpenter les territoires ardus de la mythologie grecque avec « Under the Ice » et le monumental « And Then There Was Silence » basées respectivement sur la tragédie de Cassandra -cette jeune femme troyenne avait repoussé les avances du dieu Apollon; celui ci pour se venger la condamna à prévoir l'avenir sans que jamais personne ne la croie- [C'était la minute culturelle offerte par l'équipe de Thrashocore] et la chute de Troie. La religion, sujet plus traditionnel pour Blind Guardian est également abordée, puisque « Age of False Innocence » traite des démêlés de Galilée et de l'Eglise. Au niveau musical, les nouveautés ne sont pas en reste. Outre l'utilisation presque constante des choeurs, qui bénéficient ici pour une fois d'une production à la hauteur, bien éloignée du kitsch des premiers albums, le groupe a intégré des influences orientalisantes sur « Precious Jerusalem » et « Under The Ice » et débute « Sadly Sings Destiny » par un riff aux sonorités rock'n roll. Les orchestrations sont également beaucoup plus présentes que le passé, comme en témoigne le titre « And Then There Was Silence ».
DENSE. La première écoute de ANATO s'avère éprouvante, voire « prise de tête » et laisse un arrière goût de marasme musical. Pendant plus d'une heure, ce n'est que chœurs à foison, voix flirtant avec le suraigu posés sur des compositions difficiles d'accès aux breaks et changements d'ambiances multiples. Aucun répis n'est accordé à l'auditeur, si ce n'est quelques secondes entre chaque piste. Comme si cela ne suffisait pas, les compositions sont longues, dépassant les cinq minutes, et ponctuées de refrains frisant parfois le pompeux. Les pistes de guitares sont nombreuses et les lead sont parfois superposés au chant : la mélodie est omniprésente, mais bien dure à digérer au premier abord.
AMBITIEUX. S'il existe un morceau qui mériterai une chronique à lui tout seul, c'est bien « And Then There Was Silence », majestueuse pièce de près d'un quart d'heure. Ce titre, dont la sortie en single avait précédé l'album (oui vous avez bien lu, un single de quinze minutes!) est la meilleure illustration du « nouveau » Blind Guardian au sommet de son art. Variée à l'extrême, ATTWS alterne les passages rapides heavy avec des moments plus calmes et émouvant, où à la inverse totalement dansant comme celui qui intervient à 10:15 quand la population troyenne laisse éclater sa joie. Les chœurs et la batterie revêtent parfois une coloration militaire, ce qui est plutôt logique pour un sujet aussi guerrier et la présence du synthé renforce la progression dramatique qui conduit vers un final inéluctable entièrement symphonique. Fermez les yeux et laissez vous emporter par cette fresque épique...
Cependant, que les fans se rassurent, le Gardien Aveugle n'a pas renié ses racines. Les éléments constitutifs du folklore de Blind Guardian sont encore présents. Les sonorités médiévales sont encore de la partie comme le prouve le début de « Battlefield » ainsi que les solos véloces et toujours ultra mélodiques de André. Jetez une oreille sur ceux de « Age of False Innocence » et de « Punishement Divine » pour vous en assurer. La prestation de Hansi, dont la voix reconnaissable entre mille a largement contribué à façonner la personnalité du groupe, est sur ANATO flamboyante. Si son omniprésence peut fatiguer, on ne peut pas lui reprocher de se reposer sur ses lauriers... Ses lignes de chant sont d'une grande beauté, utilisant pleinement toute sa tessiture, du plus aigu au plus grave, du plus doux au plus écorché. L'album est également bardé de ces riffs, dont les Allemands ont le secret, aux mélodies envoûtantes qui s'immisceront dans votre crâne pour ne plus vous quitter.
Mais ANATO n'est pas exempt de défauts. Il comporte des titres dont la qualité est moindre, comme « The Maiden And The Minstrel Knight », semi ballade médiévale aux paroles un peu trop mielleuses et « Under The Ice » qui malgré un bon début, s'essoufle rapidement. A vrai dire, les meilleurs morceaux sont surtout concentrés sur la seconde moitié de l'album à partir de « Wait For an Answer ». « The Soulforged », qui dispose d'un refrain fédérateur, a la carrure d'un tube, « Age Of False Innocence » joue des contrastes après une douce introduction au clavier, et « Punishment Divine » bénéficie d'une puissance bienvenue.
Si cet opus est souvent décrié à cause de sa densité, il mérite vraiment que l'on s'y attarde. A force de persévérer, l'oreille finit par s'habituer à l'omniprésence des chœurs et devient apte à déceler toutes les subtilités –et il y en a beaucoup- d'ANATO. Tout devient alors évident et l'on se rend compte du travail titanesque effectué au niveau des arrangements qu'a dû demander la conception de cet album. ANATO reste à part dans la discographie de Blind Guardian puisque
« A Twist In The Myth » voit le groupe revenir à un style plus accessible et moins .... intéressant. Alors, munissez vous d'un casque audio pour ne pas perdre une miette du spectacle, prenez votre temps et plongez vous dans l'exubérante richesse de cette nuit à l'opéra.
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