Rappelez-vous, il y a deux ans je vous parlais de
« Privilege To Overcome », premier effort du jeune groupe Ultra-Violence (quatre ans d’existence tout juste). Un premier album de thrash dans le fil du temps, pétri de qualités et servi par quatre minots (la vingtaine à peine) faisant montre d’un talent évident et sacrément prometteurs, d’ailleurs l’écurie anglaise Candlelight ne s’y est pas trompé en signant immédiatement les Transalpins. Le 27 avril prochain, soit deux ans pile poil (à deux jours près) après son prédécesseur, sortira « Deflect The Flow », seconde fournée des Italiens. Une galette que j’attendais de pied ferme afin de vérifier si j’avais eu raison de placer tant d’espoir en eux et si malgré leur jeune âge les Turinois allaient parvenir à confirmer. Je vais être clair tout de suite cet album n’est pas une confirmation, c’est une consécration. Non content de surpasser
« Privilege To Overcome », ce nouvel opus d’Ultra-Violence se hisse tout simplement tout en haut du panier thrash actuel, pouvant revendiquer le titre de meilleur album de thrash sorti depuis des mois.
Une fois encore et pour être bref, je commencerai par les deux défauts de l’album. La pochette toujours signée Ed Repka est moche (malgré tout le respect que j'ai pour le bonhomme) et la reprise de Venom (« Don’t Burn The Witch ») quoique de qualité, rallonge un album déjà suffisamment long (plus de cinquante-deux minutes) et aurait suffi en bonus d’une édition limitée par exemple. Et pour les grincheux qui râleraient encore sur l’existence même de cette scène revival thrash ou son intérêt je leur dirai simplement que je les ennuie. Voilà, nous pouvons maintenant passer aux nombreux points forts.
Si Ultra-Violence partait d’emblée avec des bases très solides et fortement ancrées dans le thrash Bay Area essentiellement (avec une pointe de Kreator faut pas déconner), le style s’est ici passablement affiné, gommant notamment certains travers qui grevaient un peu un « Privilge To Overcome » déjà tellement prometteur. Oubliés les passages saccadés aux accents
core inutiles (tout juste un petit au début de « Fractal Dimension » mais rien de bien méchant), ici tout est façonné au service d’un thrash le plus efficace possible. Mis de côté les leads timides frustrant, le duo Vacchiotti/Castiglia a décidé de voir bien plus grand ici, n’hésitant pas à se lancer dans de longs leads à tiroir bourrés de feeling, contrepoints et autres joyeusetés (« In The Name Of Your God », « The Checkered Sun » à 3’06 ou encore celui de « Fractal Dimension » à 2’31). S’il persiste encore une marge de progression à ce niveau, force est de reconnaitre que les gars ont progressé et qu’un effort particulier a été donné à cet aspect de la musique du quatuor toujours emmené par son frontman dont le timbre semble s’être ici affirmé et recentré (présentant parfois des allures Zetro-esques), laissant de côté les accents criards que l’on retrouvait régulièrement sur « Privilge To Overcome ». Soutenues par le jeu de Simone Verre qui n’hésite pas à tartiner de la double en bonne épaisseur quand ce ne sont pas des bons gros blasts des familles (encore une fois très bien intégrés aux compos) ainsi qu’une basse omniprésente (miam l’intro de « The Checkered Sun », le début de « Why So Serious ? » et « Fractal Dimension » ou le brek mélodique de « In The Name Of Your God » !) les six cordes sont bien évidemment l’ossature de ce « Deflect the Flow » qui s’apparente à une orgie de riffs tous plus excellents les uns que les autres. Toute la palette y passera durant ces cinquante-deux minutes, du bon vieux power chord en palm mute au legatos plus techniques en passant par ces tremolos cinglants (ce passage presque black sur « In The Name Of Your God » sur fond de blast). La science du riff dont font preuve Vacchiotti et Castiglia laisse admiratif, c’est bien simple il n’y a rien à jeter ! Si je devais n’en citer qu’un, je citerais volontiers « Why So Serious ? » et son gros feeling heavy-thrash tellement bonnard avec sa basse espiègle, mais je pourrai aisément en citer un pour chaque titre.
Même si les influences des Transalpins restent évidemment palpables (de bons gros relents de Kreator sur beaucoup de titres à commencer par l’opening track, « Why So Serious ? » sonnant comme un Megadeth qui aurait retrouvé sa superbe, le côté rampant d’un OverKill sur « Gavel’s Bang » et son intro excellente ou encore Exodus sur « The Way I’ll Stay »), jamais « Deflect The Flow » ne donne l’impression d’une simple resucée des groupes précités. Ultra-Violence ne révolutionnera bien sûr pas le style mais le groupe parvient à imposer sa patte, noyant ces influences (inévitables de toute façon pour n’importe quel groupe de thrash actuel) dans des compos chiadées, solides, variées et extrêmement bien construites n’hésitant pas à taper dans les six minutes pour la plupart. Malgré ses cinquante-deux minutes bien frappées, « Deflect The Flow » n’ennuie jamais, ne baisse pas une seconde en régime et jamais ne donne l’impression de trainer inutilement. Tout est à sa place et pas un seul instant vous ne regarderez votre montre. Ayant balayé les rares défauts de son prédécesseur avec notamment des leads très bonnes et bien plus travaillées ici, des blasts totalement bien intégrés et apportant réellement une plus-value brutale à des titres extrêmement riches sinon tout dévoués à l’amour du thrash dans ce qu’il a de meilleur. La marge de progression est désormais minime (des leads encore meilleurs peut-être – pour être vraiment très exigeant - ?) et tout l’enjeu sera maintenant de savoir si Ultra-Violence parviendra à se maintenir à un tel niveau de qualité et pendant combien d’albums. Mais quand bien même le futur serait moins brillant, nos Italiens pourraient se targuer d’avoir accouché ici de l’un des piliers du revival thrash, un album dont ils peuvent être fiers et que je ne peux que recommander à quiconque aime le thrash. Il faudrait être sacrément gonflé pour faire la fine bouche.
2 COMMENTAIRE(S)
07/05/2015 06:57
- notamment vis à vis du fait que les influences sont parfois trop criantes (Beaucoup d'emprunts à Metallica, à la limite du rip off par moments)
- qu'il existe pour moi un point noir sur cet album: "Gavel's Bang", retors, sombre et tue-l'amour, comme un Testament période "Souls of Black"
En dehors de ça, en effet, c'est de la super came !
06/04/2015 21:27
1- les 2 extraits disponibles à l'heure actuelle, aussi bons soient-ils, ne sont pas les meilleurs titres de l'album. J'espère que de nouveaux extraits paraitront bientôt.
2- la note parfaite aurait été 8.75/10 mais ce n'est pas possible, j'ai longtemps hésité à lui mettre un 9.
J'espère que vous l'apprécierez autant que moi.