Craft - Fuck The Universe
Chronique
Craft Fuck The Universe
Aujourd'hui, pour espérer percer dans le black metal, il faut avoir un groupe dont le nom comprenne au moins les mots « goat », « blood », « cunt » ou « christ », une imagerie "evil" de bas étage (du genre « nous, satan, c'est pour de bon, on est pas des fake »), ainsi que des paroles contenant des versets de la bible qui ne puissent être compris qu'à condition d'avoir un bac+10 en théologie. Face à cette attitude, Craft a une réponse toute prête : fuck that, fuck the universe ! La couleur est annoncée d'office, à l'image de l'artwork : noir, simple ,efficace, mais surtout sans concessions. Pas de révolte prépubère ici, juste l'envie de faire un vieux requiem purulent, à l'image de notre condition de merde, pour ce monde pourri. Pour ce faire, Craft a décidé de sortir le grand art, l'old school de haute qualité, et de ne surtout pas faire dans la dentelle.
Pourtant, mes premières impressions furent assez mitigées : vocaux très bons, mais morceaux pas toujours très accrocheurs, ambiance longue à se mettre en place. Bref, bien, mais sans plus. Encore un album destiné à prendre la poussière sur l'étagère. Et puis, le hasard du “mode aléatoire” de mon baladeur faisant bien les choses, il se trouva que “Fuck The Universe” me revint souvent dans les oreilles, et qu'à force d'écoutes inattentives, il se produisit quelque chose d'étrangement inattendu : je m'imprégnais de l'album. A partir de là, un constat s'imposa à moi : ces riffs, cette atmosphère, ce son, cette musique : tout ça, ça tuait !
En vérité, le terme plus approprié serait « roxait». Pas de mièvreries à la « Now Diabolical » ici, juste des gros relents de rocknroll bien raw à la Darkthrone période post- « Total Death». Car même si le titre est digne des réflexions d'un crust à chien anarcho-communiste, Craft n'est pas là pour rigoler : son style, c'est les mid-tempos crades aux riffs assassins (aussi bien pour les cervicales que pour le moral), les guitares aiguisées comme des rasoirs, et l'annihilation de toute forme de vie terrestre. Toutes les dernières lueurs d'espoir qui étaient alors encore allumées dans votre cœur chétif, vous pouvez êtes sûr que cet album va vous les éteindre à grand coup de nihilisme destructeur. « Voyage à l'intérieur d'un Trou Noir », ou le sous-titre parfait de cet album. Je pense particulièrement à « Assassin 333 » en écrivant ces lignes. La noirceur, qui ne devrait pourtant pas nous émoustiller en tant qu'amateur de black metal, revêt ici une saveur toute particulière. Elle est crue et glaciale, mortellement douloureuse et abjecte, parce qu'on la connaît tous trop bien, cette misanthropie maladive qui ronge les esprit à coups de scalpel. Pas d'horizon, pas de futur, rien, le néant ; la musique de Craft sur Fuck The Universe évoque furieusement la froideur inhospitalière d'un Blut Aus Nord couplée à l'atmosphère doom d'un Panzerfaust (de vous-savez-qui).
Pourtant d'apparence assez simple et familière, le black metal distillé par les suédois se révèle en fin de compte diaboliquement efficace, et plus norvégien qu'autre chose, ce qui n'est pas pour jouer en sa défaveur, loin de là. On pourrait reprocher peut être la légère inégalité de l'ensemble, à cause de titres comme "Terni Exustæ: Queen Reaper", "According To Him" ou "Principium Anguis" un peu en dessous du reste et qui n'apportent pas grand-chose à l'album, ainsi que le repompage partiel du riff de "Under A Funeral Moon" sur "Fuck The Universe", mais ce serait vraiment pour chipoter. Et comme j'aime radoter, je finirai par ceci :
Fuck the universe
Its drowning in it's own blood
Leave it here to die
Hail key misanthropy !
| ChoKos 2 Août 2008 - 4256 lectures |
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