Psycroptic - Ob(Servant)
Chronique
Psycroptic Ob(Servant)
Il y a des jours où l'on se dit que les secrets que l'on garde enfouis depuis des années au fond de soi sont vraiment trop lourds à porter. Et quoi de mieux qu'un panel international de lecteurs divers et variés pour se confier ? Alors oui cher lecteur, je dois te l'avouer, outre le techno-death, j'ai une autre passion dans la vie : la botanique. Pas la botanique qui consiste à se demander quelle plante hors de prix, moche et malodorante on va bien pouvoir faire pousser entre le 15 mai et le 13 juin parce qu'après c'est plus la saison, mais simplement l'étude des plantes. Parce que vraiment, je les déteste ces foutues plantes.
Tenez, prenons le laurier. Le laurier est un arbuste aromatique de la région la plus moche de France : la méditerranée. Ses feuilles servent à un tas de trucs inutiles comme parfumer tout un tas d'objet qui coûtent les yeux de la tête, aromatiser des plats méditerranéens donc immangeables par le commun des mortels, ou – et c'est là leur plus grande utilité – tuer des gens si elles proviennent d'un laurier rose. Dans l'Antiquité, on se servait de ses rameaux pour fabriquer des couronnes (les fameuses couronnes de laurier) pour les gens intéressants et utiles à la société comme les poètes, les héros ou les criminels de guerre. De là naquit la fameuse expression « se reposer sur ses lauriers », qui signifie en gros « s'arrêter après avoir connu le succès », ou plus de façon plus contemporaine « faire exactement comme Psycroptic ».
Psycroptic naquit en 1999 quelque part au milieu des diables en Tasmanie. Après avoir émoustillé un très restreint public de connaisseurs avec The Isle of Disenchantment (et son titre phare « Carnival Of Vulgarity ») en 2001, le groupe sortit ni plus ni moins qu'une petite pépite avec The Scepter Of The Ancients en 2003. La communauté de fans qui venait à peine de prendre racine fût un peu refroidie par l'album un peu moins exceptionnel mais quand même excellent qu'est Symbols Of Failure sorti en 2006, le groupe ayant entre-temps changé de chanteur. Alors, ce nouvel album nommé Ob(Servant) allait-il relever la barre au niveau exceptionnel que Psycroptic a atteint il y a cinq ans ? Bah non évidemment ! Pourquoi s'embêter à refaire aussi bien alors que faire plus simple est moins fatiguant ?
Décrire Ob(Servant) aux gens ayant déjà jeté une oreille sur le groupe n'est pas bien compliqué. Prenez Symbols Of Failure, ses riffs épiques et survoltés à la fois, le jeu de cymbales étoffé et virevoltant d'un David Haley au sommet de sa forme, ses variations rythmiques et mélodiques dantesques… c'est environ la moitié de l'album. Le reste ? Du death metal classique, basique, sans réelle accroche, déjà entendu et que l'on réentendra encore mille fois, pas mauvais dans le fond, mais tout sauf intéressant. C'est-à-dire tout sauf ce que l'on attend de Psycroptic.
Et oui, cet album est trop lisse, trop plat, il lui manque les ramifications et le feuillage qui aurait pu le hisser au niveau des précédentes réalisations du groupe, ou en d'autres termes, il lui manque le grain de folie qui fait tout le charme de nos tasmaniens. Je pourrais pratiquement arrêter là cette chronique de Ob(Servant), tant cette évidence s'impose et nous frappe comme la branche négligemment relâchée par le camarade qui nous précède en randonnée. Mais il est un autre point que celui de la composition qui déçoit, c'est celui du chant. En effet, si je ne puis que saluer l'abandon des « gruiks » immondes (pléonasme) qui étaient le principal défaut de The Scepter Of The Ancient, il me faut déplorer leur remplacement par… un chant typé metalcore. Quitte à sauter de branche en branche, autant s'assurer qu'elles ne soient pas vermoulues l'une et l'autre… C'est d'autant plus dommage que le chant death metal qui constitue encore heureusement l'essentiel du propos, est d'aussi bonne facture que sur Symbols Of Failure, mais les écarts vocaux de Jason viennent simplement gâcher de très bons passages ou souligner la médiocrité de certains autres…
Quelques remontrances sont aussi à faire au niveau de la production, car Ob(Servant) souffre malheureusement d'un mixage assez déséquilibré : la batterie est vraiment trop en avant. Normalement ça ne m'aurait pas vraiment déplu avec Psycroptic, mais là ça ne permet que de se rendre que Haley somnole la moitié du temps sur son kit. Idem pour le chant, le fait qu'il soit trop en avant ne fait qu'irriter encore plus l'admirateur des précédents opus que je suis. Et qui pâtit de tout ça ? La guitare et la basse évidemment ! Dommage, car c'est au niveau des guitares que l'intérêt de l'album se joue, les seules réminiscences de génie en provenant… Quant à la basse ? On ne l'entend pas tout simplement.
Ce sont là de bêtes erreurs qui sont d'autant plus à déplorer que la production s'avère être espacée et claire, à ce niveau mieux réussie que celles des précédents opus, parfois grésillantes et compactées. Bon soyons clair, cette production n'est pas gênante en soi, c'est juste la cerise qui fait déborder le vase, car quand les compositions sont bonnes, on n'en retient guère que la qualité.
À partir de là un seul constat s'impose, ce nouvel opus du groupe des frères Haley est une déception, à mi-chemin entre l'album plaisant et l'impression aussi collante que la sève d'un gâchis qui n'est certes pas énorme mais indubitablement gênant. Heureusement qu'il reste des passages comme la partie en tapping centrale de « A Calculated Effort » et les riffs plus rapides pour relever le niveau. Il faut le dire, ce Ob(Servant) n'est définitivement pas du même bois que les précédents albums. C'est un choix vraiment étrange qu'a fait Psycroptic en prenant un tel tournant, car si les passages posés, subtils et mélodiques d'antan restent, les passages brutaux sont la plupart du temps troqués pour ces passages désespérément communs dénoncés plus haut. Oui vraiment je m'interroge, pourquoi un groupe qui a enfin atteint la notoriété en signant avec Nuclear Blast (qui décidément avec Arsis et Decrepit Birth enchaîne les signatures de death technique) et alors que le death technique est un genre gagnant en popularité, a décidé de scier la branche sur laquelle il est assis ? Je n'irai pas jusqu'à crier « Timber », parce je suis persuadé que le groupe n'est pas encore à bas, mais quand même, j'ai assez peur pour l'avenir. Et puis voyons au moins le bon côté des choses, voilà enfin un album de Psycroptic qui plaira à Chris.
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