Rorcal - Myrra, Mordvynn, Marayaa
Chronique
Rorcal Myrra, Mordvynn, Marayaa
Rorcal est depuis 2006, date de la naissance du groupe, l'un des plus prometteurs espoirs d'une scène post-hardcore helvétique en pleine ébullition. Après six mois d'écriture en commun, les membres du quintet enregistrent leur premier effort, un EP baptisé "The Way We Are, The Way We Were, The Way We Will Be". En Mai 2007 ils s'enferment en studio 4 jours durant avec leur compatriotes de Kehlvin afin de composer et enregistrer un seul et unique titre de trente minutes : "Ascension". Ils participeront peu de temps après au projet collaboratif "Monochrome" unissant différents musiciens et un réalisateur. Rorcal enregistre donc en 2008 ce premier album, "Myrra, Mrdvinn, Mrayaa" et figure sur la compilation "Falling Down" entre autres aux côtés de Pelican, Knut et Year Of No Light.
En signant chez Thundering Records, Rorcal jouit du professionalisme de ces derniers en bénéficiant d'une distribution mondiale. Revers de la médaille, ce label nageant dans des eaux infestées de Death/Thrash/Heavy metalleux de tout poil, la promotion est par conséquent soumise à des critiques parfois peu avertis du monde dans lequel évolue le cétacé. La découverte du monde des profondeurs abyssales est encore récente, la faune qui le peuple et ses moeurs échappent encore aux bipèdes de surface. C'est le propre de l'homme de rejeter ce qu'il ne connait/comprend pas. Pour le moment plus habitué à barboter dans le petit bain avec son canard en plastique jaune et vert, le critique de base à éducation mono sonore relira plus tard espérons-le, épaulé d'une culture musicale plus étendue, ses convictions pétries d'ignorance passées avec une petite pointe de honte et un brin de rouge sur les joues. Descendre un disque de Doom en prétextant que c'est lent et répétitif, ce qui est l'essence même du style, c'est quand même fortiche!
Car oui, Rorcal c'est lourd, lent, massif, écrasant... Les qualificatifs ne manquent pas. Allez donc écumer un dictionnaire des synonymes de ces quatre termes et vous commencerez à avoir un début d'idée de la musique des Suisses. Les adjectifs sont souvent de près suivis par les superlatifs et les formules élogieuses dès lors que les aficionados du style s'expriment, pour une musique pas belle, pas compliquée, pas technique, mais à la noirceur subtile, écorchée, et qui fait appel à tant de sentiments primaires et insondables que, quand ceux-ci explosent finalement à la surface, les tripes et le coeur du chroniqueur se répandent sur le clavier. Mais chez Thrashocore, on sait se contenir, c'est qu'on a de l'éducation nous... Et puis j'en ai marre d'éponger. Si le doom post hardcore ne vous évoque que "cékoiça?", Rorcal vous donnera un aperçu bien représentatif du style. Non mieux : une leçon magistrale. Les titres dépassent allègrement les 10 minutes, il faut bien ça pour développer l'aura glauque qui enveloppe les compositions des jeunes genevois. Si les vocaux, barrière difficilement pénétrable des musiques dites extrêmes, en rebuteront plus d'un par leur aspect lacéré, peut-être je dis bien peut-être (en fait le temps de l'écrire je n'y crois déjà plus) que l'amateur de prog en tout genre sera tout au moins séduit par les structures des titres qui n'obéissent à aucune règle, à la seule finalité que de porter les émotions à leur paroxysme. En gros, la forme, on s'en fout, seul le résultat compte, à partir de là, tout ou presque devient possible.
Les desseins de Rorcal sont particulièrement sombres et c'est avec une redoutable efficacité qu'ils parviennent subrepticement à leurs fins, assommant répétitivement l'auditeur, qui finira, c'est sur, par céder. Ne cherchez pas la moindre lueur, le soleil ne parvient en ces profondeurs où la pression est suffocante. S'il se nomme Aurore, c'est dans un crépuscule épais et inéluctablement vers le fond que le premier titre, dés ses premières secondes, attire l'auditeur. Tout au long de l'album, le groupe se délecte sadiquement d'ambiances suffocantes, à la recherche d'un souffle qui ne semble jamais venir (Aurore), de montées (ou descentes!) en puissance où le martèlement des tempes va crescendo et où l'organe cardiaque, incarné par une basse 'slappée', fini par s'emballer pour se perdre dans des abîmes envahissantes (Ataraxia). L'auditeur est pris à la gorge et devra tenir 70 minutes pour survivre à l'assaut passif de Rorcal qui ne sert pas assez son étreinte pour nous faire crever, mais suffisamment pour faire vaciller notre conscience. Le pire c'est qu'on en redemande, et chaque nouvelle audition est un boulet qu'on se fixe méthodiquement et bien solidement au pied avant de se lancer en bas. Masochisme?
Alors quoi. Que reprocher à cet album. Peut-être un manque de variété concernant les vocaux? Chose que l'on rencontre fréquemment chez leurs confrères usant plus des voix claires ou féminines, dictées voire chuchotées, je pense notamment à nos Lyonnais d'Overmars. Oui peut-être... Tout du moins c'est ce qu'on attendra sur les prochaines galettes des Suisses. Pour le reste, ne touchez à rien. Moi je vais me chercher une aspirine en attendant la suite avec impatience.
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