Quand Rorcal décide de nous livrer sa version de la fin du monde, on ne bâille pas à l’annonce d’un concept éculé. Non, on reprend ses exercices de développé-couché et appelle son employeur pour poser ses jours de RTT car quand on voit le résultat qu’a entrainé une période décadente de l’Empire romain vue par les Genevois (la piste de plus d’une heure
Heliogabalus, qu’ils se sont sentis obligés de compléter par un prélude d’une demi-heure parce que c’était vraiment trop court), il y a tout à croire que va se subir une punition se quantifiant en tours de cadran !
Pourtant, les marathoniens seront déçus : la course ici chroniquée ne dure qu’une petite quarantaine de minutes, les Suisses ayant décidé de ne plus tabler sur l’endurance pour assommer. Au risque de passer pour un peine-à-jouir, je signale d’entrée que si le principal défaut de
Heliogabalus est de se perdre dans ses longueurs, celui de
Világvége est de laisser un goût d’inachevé à l’excursion des baleineaux sur les terres du schwarze metal, celle-ci étant si réussie qu’elle aurait gagné à être plus développée. Car le black metal pratiqué par Rorcal, c’est quelque chose ! Plutôt que de rester le cul coincé entre deux chaises, hardcore pour l’une, black pour l’autre, comme ses compères de Vuyvr, la formation a décidé de jouer son black comme du doom en utilisant l’intensité des tremolos pour un rendu terrassant : les guitares avancent à l’aveugle et jamais très loin du sol, tâtonnant éperdument le plancher à la recherche de leurs lunettes ; la batterie étourdit de blasts sans direction apparente ; la voix, se voulant reine de la montagne, ne parvient pas à dépasser le bas de porte qu’elle secoue de hurlements venteux… Le troisième album du quintet ne s’arrête pas à une introduction avec toms lentement matraqués puis morceau de post hardcore funéraire pour donner la sensation d’y avancer dévitalisé. Il est tout entier dédié à mériter sa (belle) pochette couleur deuil avec dessin de cendre où la musique infernale typique des pandas devient ici sèche, virevoltante et éteinte comme après la combustion.
Világvége ou le seul album méritant le qualificatif de « post-black metal » ? Au-delà de ce slogan publicitaire, il donne principalement l’impression d’être un disque de postcoreux loin de toute gentillesse (pensez à la production d’un Celeste ; pensez à la joie de vivre d’un This Gift Is A Curse) s’essayant au black metal avec ce que cela suppose d’attention davantage portée sur l’ambiance que la musicalité de l’ensemble, la cohérence de fond que la fluidité de forme : « D » pourra paraître à part avec la rudesse de ses coups d’autiste s’étalant sur une dizaine de minutes (à la manière d’Amenra, Rorcal n’est pas foutu de faire monter ses lignes – ce qui place paradoxalement les Suisses au dessus de concurrents de même nationalité), elle est en réalité une autre façon de faire blêmir l’auditeur, comme le démarrage de « VI » donne à espérer une lumière semblable à celle du Liturgy de
Renihilation pour finalement mettre d’humeur chagrine, ses phases élevées se défilant au moment où on croit les tenir.
Un véritable essai de salopards, traitreux comme j’aime, d’une haine maussade comme j’adore.
Világvége n’en reste pas moins difficilement pénétrable par ses quarante-trois minutes passant trop vite ainsi qu’une construction donnant parfois le sentiment d’écouter deux EPs distincts, la face B de son édition vinyle tranchant avec sa face A par des samples placés en ses début et milieu (des extraits des opéras « Kyrie » et « Dies Irae » composés par Alfred Schnittke). Même s’il semble parfois contraint dans son exercice, ce qu’il parvient à atteindre se retrouve difficilement ailleurs, est appliqué avec assez de précision pour dire qu’on en ressort, non pas simplement écaillé, mais sévèrement raclé. Ne vendez pas votre peau avant de l’avoir tuée :
écoutez !
Par Sosthène
Par Sosthène
Par gulo gulo
Par AxGxB
Par Jean-Clint
Par Raziel
Par Sosthène
Par Keyser
Par Keyser
Par Lestat
Par Lestat
Par Sosthène
Par Sosthène
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par AxGxB
Par Deathrash
Par Sikoo