J’avais peut-être besoin d’un coup de pied au cul pour chroniquer ce nouveau Pulling Teeth mais celui-là, je m’en serais bien passé. Hé oui, le quintet de Baltimore a annoncé que
Funerary était son dernier album, ayant jugé avoir accompli tout ce qu’il voulait faire en tant que groupe ! Un concert d’adieu le 21 janvier lors du A389 Records Anniversary Show et pouf, envolée la formation dont on pensait voir prendre la route en solitaire tant l’œuvre qui nous intéresse ici s’affranchit des codes dans lesquels on l’avait enfermé depuis
Vicious Skin. Du coup, le titre et le superbe artwork de cet essai prennent un tout autre sens, testamentaire.
En y réfléchissant, on ne pouvait imaginer meilleure façon de terminer cette histoire. A Converge qui avec
Axe To Fall mélange différents genres quitte à perdre sa noirceur au profit du fun, les Ricains répondent par
Funerary, œuvre exigeante poursuivant le virage entamé par
Paranoid Delusions / Paradise Illusions tout en renouant avec le véloce de leurs premiers morcifs. Un condensé ambitieux qui chamboule les repères à chaque instant car même dans son entame en forme de pistolet à six coups (« Bitter Harvest » ne s’occupant que d’enlever le cran de sureté en douceur), le name-dropping d’Integrity qui se profilait déjà dans notre cerveau est effacé par des influences Death metal (pour le son et l’abrasivité des riffs, comme les tremolos de « Extinction » et « The New Dark Ages ») et Thrash (pour la vigueur de l’exécution et les soli Slayer-esques) servies par une production qui à elle seule donne envie d’écraser des chatons contre un mur. Dite de cette façon, la forme peut rappeler les créateurs de
Seasons In The Size Of The Days mais la violence est utilisée différemment, de manière à torturer, rendre halluciné et malade comme dans du Damad, portée par un Mike Riley à la dégueulasserie urbaine contraignant à s’entrer dans la tête que Pulling Teeth fait… du Pulling Teeth, et rien d’autre.
Et ce n’est que le commencement ! Le titre-éponyme s’embraye et on est alors pris dans une atmosphère poisseuse rendant aussi claustrophobe et peu rassuré qu’une messe dans une cage d’escalier de banlieue. Pulling Teeth balaye puis lave par des chœurs déviants afin d’accueillir des compositions devenant de véritables délivrances, pour lui comme pour nous : libérée des carcans stylistiques, l’émo-tion est appelée par des refrains marshmallows aux paroles battant Ghost sur le terrain du catchy satanique (« Whispers », « Waiting » : s’il y a des douches en Géhenne, entraine-toi déjà à les chanter !). Il fallait oser intégrer de tels chants clairs au milieu de riffs mélodiques bien que conservant une amertume résolument hardcore (le rôdeur ne nous lâche jamais, affutant ses lames sur le démarrage intimidant d’« At Peace » par exemple) et la troupe s’en arrange avec tellement de talent que cette fin de disque entraine toujours deux réactions : l’incrédulité suivie d’un bonheur indescriptible, un brin coupable donc forcément délicieux.
Comme esquissé plus haut (si si, cherche bien),
Funerary est exigeant. Pas parce qu'il se perd dans les dédales du multi-style (il reste au contraire constamment jouissif), mais le décalage entre ses deux parties et des titres bourrés de changements d’ambiances obligent à le prendre plusieurs fois de front avant de profiter pleinement de sa totalité. En effet, l’album pourra paraître au départ trop fourre-tout, donnant l’impression d’avoir deux gros EP plutôt qu’un seul ensemble. Cependant, une cohérence finit par ressortir malgré la coupure que l’éponyme effectue entre les débuts sauvages et leur suite jouant le contraste. La classe intégrale en somme, puisque même lorsque Pulling Teeth invite les copains (guests trop nombreux pour tous les citer, dont Dwid Hellion d’Integrity, les vilains Mike Apocalypse de Gehenna et Justice Tripp de Trapped Under Ice ou encore des membres de Piano Become The Teeth, Skin Like Iron, Ruiner…), il leur prépare des moments de choix à l’image du breakdown de « Brain Drain » sur lequel s’égosille Jeff Beckman (Haymaker) !
Holy Terror, vous dites ? C’est tout un pan de la musique moderne que Pulling Teeth regarde de ses yeux moqueurs, son hardcore carnivore arrivant à lier religion et vendetta, rendre constamment menaçant et accrocheur ces lieux où dans le désert des rues bétonnés gronde le sang de leurs habitants prêts à répandre leur prêche maison. Ce qui montre que si
Funerary cherche au-delà de la sainte terreur, il en est sans doute une de ses plus belles définitions.
Par gulo gulo
Par AxGxB
Par Jean-Clint
Par Raziel
Par Sosthène
Par Keyser
Par Keyser
Par Lestat
Par Lestat
Par Sosthène
Par Sosthène
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par AxGxB
Par Deathrash
Par Sikoo