Tenhi - Saivo
Chronique
Tenhi Saivo
Oui, cette chronique aurait dû voir le jour en 2011. Elle était d'ailleurs prévue pour 2011. Je m'étais même préparé psychologiquement à son écriture en m'imprégnant avant la sortie des quelques extraits que proposait le groupe. Après un "Maaaët" frisant la perfection, je m'attendais comme beaucoup d'autres je pense, à l'aboutissement d'un long processus de maturation qui nous aura fait mariner pendant plus de 5 ans. "Saivo" aurait dû être l'album de l'année, la nouvelle référence en matière de folk, l'oeuvre incontournable d'une formation qui n'a cessé d'étonner et de faire frissonner depuis son premier album... Malheureusement il n'en fût rien, ceci expliquant en partie le retard de cette bafouille. J'ai énormément écouté, j'ai cherché à comprendre, cherché à ressentir ce que Tenhi avait voulu mettre dans ce nouvel opus. Mais toujours rien et je vous avoue peiner à trouver le bout par lequel prendre cette chronique. Alors commençons par le commencement.
Avant toute chose, je suis bien conscient que mon avis est influencé par l'admiration que j'ai pour leur oeuvre précédente et j'en suis certain, "Saivo" vaut probablement plus qu'une note en demi-teinte. Quinze ans maintenant que Tenhi traine ses guêtres dans le milieu du (néo)folk : cette solide réputation forgée à la sueur de leurs âmes de troubadour va de paire avec une intégrité artistique rare et un talent incontestable de composition. Que l'on aime ou pas, il faudrait vraiment être sourd pour ne pas admirer avec quelle précision les Finlandais sont capables de mettre des images sur leurs notes. A l'instar de leurs précédentes productions, leur folk minimaliste se base principalement sur les guitares, secondées par piano et violons sur lesquels vient se poser le chant monocorde de Tyko, toujours plus linéaire à chaque nouvelle sortie. Ce dernier est néanmoins relayé par quelques coeurs, superbes dans leur genre ("Sees" notamment), entre chant rituel, recueillement et désespoir. En quelques notes, le groupe parvient à créer une véritable atmosphère qui vous happe pour ne vous relâcher que lorsque les derniers instruments cessent de résonner. "Saivo" ne fera pas exception à cette règle, l'ambiance étant son principal point fort. Toutefois, comparée à un "Maaaët" sur lequel la lumière parvenait rarement à percer, on sent ici un duo plus apaisé, plus serein. "Saivo" se présente ainsi plus comme un voyage contemplatif qu'une complainte : l'air est moins lourd, le périple moins torturé bien que ce dernier réserve encore quelques opérations à coeur ouvert. Tenhi semble également changer de propos, en tous cas c'est ce qu'on ressent à travers leur musique. Les mélodies et l'atmosphère générale évoquent moins la nature, semblant se focaliser sur des sentiments plus humains.
Les morceaux qui composent ce nouvel album forment un tout d'une incroyable richesse et d'une grande beauté, sans doute leur oeuvre la plus aboutie en terme de recherche esthétique. Mais paradoxalement, "Saivo" est également celle qui compte le moins de temps forts, notamment comparé à son grand frère dont chaque composition faisait vibrer ses airs dans votre tête. Ici, ce bloc quasi-indissociable composé par ces 12 pièces constitue un ensemble de magnifiques mélodies qui portent plus qu'elles ne touchent, manquant d'un soupçon de mélancolie qui faisait leur force d'antan. On observe alors de temps en temps quelques longueurs auxquelles nous n'étions pas habitués allant du simple passage à des titres plus dispensables tels que "Sateen Soutu" et "Vuoksi". Dans ses errances plus légères, Tenhi manque même cruellement d'intérêt, à l'image de morceaux comme "Haaksi" ou le fadasse "Savoie".
Quoiqu'il en soit, il n'y a aucun doute à avoir quant au fait qu'il s'agisse de choix artistiques. Le final "Sees" / "Suniset Runot" témoigne de leur inépuisable capacité à bouleverser, comme si les Finlandais avaient éprouvé le besoin de nous le rappeler. Cela faisait longtemps que je n'avais pas été aussi ému qu'en écoutant la seconde partie du titre de conclusion (à 6'15"), l'accord parfait entre guitares, violons et piano, des mélodies d'une grande puissance et d'une rare tristesse. Même si ce final aurait eu forcément moins d'impact, j'aurais aimé que "Saivo" soit aussi blessant ses 70 minutes durant. Trop souvent, nos petits coeurs avides de souffrance restent dans l'attente d'une décharge de désespoir sans être satisfaits. L'album réserve néanmoins quelques autres bonnes surprises comme l'apaisant "Uloin", l'étonnamment entrainant "Pojan Kiiski" ou encore les délicieuses balades folk "Surunuotta" et "Paluu Joelle".
Tenhi m'aura finalement déçu. Pas autant que je le pressentais lors des premières écoutes mais assez pour être incapable d'occulter les quelques défauts évoqués plus haut. "Saivo" n'en demeure pas moins beau et attachant, une oeuvre assez différente des précédentes en fin de compte, dont l'atmosphère entre inquiétude et apaisement se révèle être son principal atout. Et qu'écouter de plus approprié en cette froide saison...
| Dead 22 Janvier 2012 - 7786 lectures |
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