Beneath - Enslaved By Fear
Chronique
Beneath Enslaved By Fear
On vous a déjà parlé de Severed Crotch et de Ophidian I. On a même évoqué Sororicide pour les prix délirants pratiqués sur e-Bay. Ce n'est pas grand chose mais en matière de death metal, on aurait pu s'attendre à ce qu'un coin paumé comme l'Islande n'accueille aucun groupe. Hé bien non! Certains font même pas mal parler d'eux. C'est notamment le cas de Beneath qui a sorti son premier full-length Enslaved By Fear cet été chez Unique Leader. Le groupe avait profité du bon accueil reçu par son EP Hollow Empty Void en 2010 pour gagner en notoriété et avait même participé au Neurotic Deathfest l'année suivante pour une prestation convaincante qui laissait entrevoir de belles promesses pour l'avenir. L'avenir, c'est maintenant et ce qu'on peut dire, c'est que les Islandais les ont tenues, ces promesses.
Comme on peut s'en douter à la vue de cette belle pochette fourmillant de détails (ça commence toutefois à devenir un peu lassant ces tours qui montent au ciel...), Beneath propose un brutal death moderne touffu et intense un peu à la Nile et Behemoth pour le mitraillage en règle et Suffocation pour l'aspect plus gras de certains riffs. La musique des Scandinaves dégage également le même sentiment de puissance (mon Satan ce "As Gods Walk The Earth" en ouverture!) que Hour Of Penance et Hideous Divinity, en moins surproduit (grosse production au mix signé Daniel Bergstrand mais sans extravagance) et surtout en bien plus intéressant. Beneath est en effet l'un des rares groupes actuels de brutal death à sortir du lot, ce grâce à un sens poussé de la composition et une maîtrise déjà impressionnante de l'art du riff pour des musiciens si jeunes. Ça bourre souvent, le batteur Ragnar Sverrisson ne lésinant pas sur les blast-beats, mais derrière, ça suit aussi. Les compositions de Enslaved By Fear, regorgent ainsi de bonnes idées, que ce soit des changements de rythme fréquents ne laissant jamais l'auditeur s'ennuyer ou des riffs travaillés prouvant que le quintette est bien plus qu'un énième groupe de bourrins de base.
C'est d'ailleurs ce qui m'a le plus conquis chez Beneath. À côté de ce brutal death puissant déjà convaincant, la formation sort régulièrement du carcan dans lequel les autres s'enferment souvent. Pas que Beneath révolutionne le genre non plus mais le combo s'autorise des passages rafraîchissants pour le style qui apportent énormément d'intérêt à l'opus. Le morceau-titre "Enslaved By Fear" en est un bon exemple avec son début lent et dissonant ou ses arpèges à 2'23 accompagnés d'un groove et d'un toucher inhabituels pour du brutal death. Le groupe renoue avec les dissonances à la quatrième minute avant d'enchaîner sur un riff mid-tempo froid blackisant. Terrible! Et encore, c'est sans parler du génial tremolo mélodique à 1'03 ou de l'accélération thrashy jouissive à 3'35 soutenant un très bon solo. "Heretics" possède les même vertus avec son intro calme et son jeu de batterie groovy. Dommage qu'il ne s'agisse que d'un instrumental de moins de deux minutes. On se rattrapera sur le gros pavé de l'album qui porte bien son nom, "Monolith", et qui fait presque dans le post-metal avec sa lead mélodique planante et son riff aérien. Le morceau se fait par la suite plus dissonant. Un vrai régal de près de dix minutes dont peu de groupes de brutal death sont capables. Seul reproche, il aurait été plus judicieux de le placer tout à la fin au lieu de l'avant-dernière piste tant il sonne comme une outro parfaite. Cela dit, le titre de clôture "Sacrificial Ritual" est aussi une bonne petite tuerie et l'un des meilleurs morceaux, mais dans une veine plus "classique" avec batterie mitraillette à la Krisiun et autres joyeusetés poétiques.
Tout ceci fait de Enslaved By Fear l'une des sorties d'Unique Leader les plus intéressantes de cette année, relevant le niveau d'un label ayant du mal à retrouver sa gloire passée (c'est ça de signer des groupes de deathcore trendy!). Si je ne vais pas plus haut dans la note, c'est que je suis persuadé que Beneath a une marge de progression énorme et peut faire encore mieux. Et aussi à cause de "Lies Of The Dead" et "No One Above" (ouais bah ça se voit qu'ils vivent pas au 1er étage d'un immeuble eux!), que je trouve un peu en dessous malgré une qualité correcte, de deux-trois passages trop modernes pour moi ou du growl de Gísli Sigmundsson pas mauvais mais monotone et faiblard qui rappelle celui de Bill Robinson de Decrepit Birth. Pour le reste, c'est-à-dire la brutalité, la maîtrise technique, les riffs, les mélodies, l'ambiance et les séquences plus posées, Beneath tape dans le mille. C'est tellement rare de croiser un groupe moderne qui ne sonne pas plastique et ne se limite pas à bourriner dans le vent! Autant dire qu'il faudra surveiller attentivement la prochaine sortie des Islandais car leur potentiel pourrait bien les emmener haut. Très haut.
| Keyser 25 Décembre 2012 - 3506 lectures |
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