Considéré par beaucoup comme l’un des fers de lance de la scène Brutal Death européenne, Wormed est très certainement l’un des groupes les plus intéressants qu’il m’ait été donné d’écouter dans le genre. Et cela pour une simple et bonne raison, les Espagnols ont toujours réussi à éviter les clichés qui continuent de niveler par le bas un style aujourd’hui en manque flagrant de reconnaissance. Une personnalité affirmée qui fait écho à un concept relativement peu abordé dans le Brutal Death : l’espace et la science-fiction. De fait, ce nouvel album reprend la trame historique développée par Wormed depuis
Planisphaerium et la disparition des Terrax en l’an 8000, reprenant au passage ce vocabulaire, ces concepts et ces idées empruntés au magazine Ciel & Espace et aux frères Bogdanofs. Vers l’infini et au-delà !
Presque trois ans jour pour jour après la sortie d’
Exodromos, Wormed signe aujourd’hui son retour avec l’arrivée d’un troisième album intitulé
Krighsu. On note à cette occasion quelques changements avec pour commencer l’arrivée au sein de la formation espagnole d’un nouveau batteur en la personne du jeune Guillermo Calero (venu remplacer Riky, ex-Avulsed). Le groupe a également quitté Willowtip Records pour rejoindre les rangs du label français Season Of Mist qui, décidemment, enchaine les sorties de qualité en ce début d’année particulièrement chargé (Ritual Chamber, Deströyer 666, Rotten Sound, Skuggsjá...).
Avec un total de dix titres pour trente-quatre minutes, Wormed semble vouloir continuer à appliquer le même schéma de composition que sur ses deux précédents albums et notamment
Exodromos. Soit des titres relativement courts (un peu plus de trois minutes en moyenne) marqués par un riffing dissonant et chaotique, une batterie tentaculaire et survoltée ainsi que des breaks toujours aussi vicieux. Le tout est une fois de plus associé à une production moderne mais agréable mettant ainsi en avant l’aspect technique de ces compositions tout en y insufflant ce côté synthétique et presque mécanique en adéquation avec les thèmes abordés par Wormed. De fait, les Espagnols ne cherchent donc pas à surprendre leur auditoire (quelle idée saugrenue) mais plutôt à assoir leur supériorité sur le reste de la scène Brutal Death internationale. Et c’est plutôt réussi tant
Krighsu se révèle un album incroyablement efficace.
Et cela grâce à un rythme complètement fou que l’on doit en premier lieu à un riffing moderne et particulièrement nerveux frisant l’épilepsie à chaque instant. J.Oliver et Migueloud enchainent les riffs dans une espèce de chaos indescriptible. Une succession quasi ininterrompue de notes décousues faite de séquences fulguro-poing musclées (évidemment beaucoup trop nombreuses pour être citées), de transitions tout à fait improbables ("Pseudo-Horizon" à 0:43, "Neomorph Mindkind" à 0:53, "Computronium Pulsar Nanarchy" à 0:38...), de breaks tout aussi inattendus ("Neomorph Mindkind" à 1:54, "Agliptian Codex Cyborgization" à 1:06, "The Singularitariasnim" à 0:35, "Computronium Pulsar Nanarchy" à 0:42 et 1:28...), de passages plein de dissonances ("Neomorph Mindkind" à 1:32, "Agliptian Codex Cyborgization" à 1:36, "Computronium Pulsar Nanarchy" à 1:59...), de moments d’accalmie bienvenues (ces nombreux samples faisant office de conclusion et même de transition)… Une diversité toujours aussi bénéfique puisqu’elle insuffle une réelle intensité au Brutal Death de Wormed. Et tant pis pour ceux qui trouveront que tout cela n’a ni queue ni tête. Ils passeront assurément à côté de l’un des meilleurs albums de Brutal Death (Technique) de l’année. Enfin, si
Exodromos et
Krighsu sont donc construits sur le même modèle, on note néanmoins une légère différence. En effet, les riffs du premier se montraient dans l’ensemble plus directs là où ceux du second se font plus torturés et moins immédiats. Rien d’insurmontable mais ne vous étonnez pas si dans un premier temps vous avez le sentiment de ne pas tout comprendre à ce troisième album et que celui-ci vous apparait comme hermétique. Quelques écoutes suffisent alors pour se laisser attraper par ces riffs alambiqués et complètement déjantés.
Mais les riffs du duo Oliver/Migueloud ne sont pas les seuls responsables de cette intensité. Celle-ci est également mise en avant par le jeu exemplaire d’un jeune batteur qui n’a pas grand-chose à envier à son prédécesseur. Du haut de ses vingt-cinq printemps, Guillermo Calero donne ou suit la mesure, c’est selon, le temps de séquences hallucinantes de rapidité, de complexité, de dextérité. Aux blasts punitifs que le jeune homme dispense avec décontraction se succède divers passages tout aussi jouissifs comme ces séquences plus riches mais également plus groovy empruntant à l’univers décomplexé et déstructuré du Jazz, d’autres plus modernes aux rythmes saccadés ou bien encore ces mouvements survoltés faits de cassures et d’accélérations à vous casser le crâne. Un jeu tout ce qu’il y a de plus maitrisé et dynamique à l’image de Wormed et de son Brutal Death schizophrène.
De ses débuts largement inspirés par la scène Slam il ne reste donc aujourd’hui plus grand-chose si ce n’est la voix toujours aussi gutturale et monocorde de Phlegeton. Un point souvent sujet de discorde mais qui, me concernant, ne m’a jamais gêné outre mesure. Je ne serais pas contre davantage de variété et de subtilités dans le chant de l’Espagnol mais néanmoins je ne peux pas lui reprocher quoi que ce soit. On est ici dans les limites de ce que j’estime acceptable en matière de chant finalement ces lignes de chant viennent trancher avec l’aspect ultra technique et moderne (voir même parfois mélodique) de son Brutal Death. Bref, Wormed continue de cultiver sa différence à travers une personnalité toujours aussi forte et surtout inimitable.
Trois ans (seulement) après l’excellent
Exodromos, les Espagnols de Wormed signent avec
Krighsu un retour fracassant confirmant les bons souvenirs laissés depuis la sortie de son prédécesseur. Si le groupe a dû faire face à quelques changements, on ne peut pas dire que ces deux albums soient foncièrement différents l’un de l’autre. Seuls les riffs tendent aujourd’hui vers quelque chose de plus compliqué et de moins immédiat, demandant à l’auditeur probablement un peu plus d’engagement pour en apprécier la substantifique moelle. Pour le reste, Wormed nous offre encore une fois ce qu’il y a de mieux en matière de Brutal Death alliant ainsi avec équilibre et panache modernité, personnalité et efficacité. Le groupe aurait-il déjà enterré toute concurrence avec ce nouvel album ? On verra à l’heure des bilans de fin d’année mais pour le moment on n’a toujours pas fait mieux.
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