"En espérant que les Espagnols ne tardent pas trop à le sortir..."
Voilà ce que je disais à propos d'un prochain album de Wormed. C'était il y a trois ans à la sortie du single
Quasineutrality! Autant dire que j'étais carrément optimiste sur ce coup puisqu'il a donc fallu attendre plus de trois années pour voir enfin débarquer
Exodromos en mars 2013. Soit 10 ans après le premier full-length
Planisphærium! Dans le genre je prends mon temps, difficile de faire mieux que les Madrilènes! Là où je ne me trompais pas toutefois, c'est quand je voyais en
Quasineutrality les prémisses d'un redoutable opus. Coupons court à toute interrogation: oui, ça valait le coup d'attendre!
Après 7 ans de silence et un
Planisphærium élevé au rang de classique chez les amateurs de brutal slam death, le combo avait fait reparler de lui avec
Quasineutrality, un deux-titres prometteur sorti sur le label national Pathologically Explicit Recordings et qui montrait un Wormed plus carré et moins slammy. Tout à fait du goût de Willowtip Records qui va signer le groupe et lui offrir une promotion à la hauteur de ses ambitions et de son talent.
Un seul changement à noter concernant les parasites de l'espace, Phlegeton se consacre à nouveau uniquement au chant en laissant l'ex-Avulsed Riky s'asseoir derrière les fûts, pour un résultat détonnant. Sans surprise au vu de la pochette Matrix illustrant à merveille le contenu froid et mécanique, Wormed poursuit dans la direction entrevue sur
Quasineutrality. Mieux, il l'approfondit. Si les thèmes sur l'astrophysique et la science-fiction restent chers aux Espagnols, ils les mettent désormais en musique de façon quelque peu différente (et plus adéquate) que sur
Planisphærium. L'étiquette brutal slam death, déjà limitée pour un groupe très clairement au-dessus de la masse, n'est ici plus d'actualité. On est désormais dans le brutal death moderne technisant, pas très éloigné d'un Cryptopsy (quand c'était un bon groupe). Cela ne signifie toutefois pas que Wormed ait abandonné toute trace de groove ou de feeling slammy. Celui-ci est relégué au second plan mais est toujours présent sur quelques slam parts et autres riffs gras et huileux ("Nucleon" à 0'49, "Tautochrone" à 1'37, "Multivectorial Reionization" à 2'39, "Spacetime Ekleipsis Vorticity" à 0'39 et 5'08, "Stellar Depopulation" à 0'44, "Techkinox Wormhole" à 0'16...). Les fans de brutal death moderne et US apprécieront mais honnêtement, là n'est pas l'intérêt de
Exodromos. Il l'est encore moins où les riffs se font saccadés et bateaux, défaut récurrent du metal moderne, comme sur "Multivectorial Reionization" à 0'25, "Spacetime Ekleipsis Vorticity" à 1'16, "Stellar Depopulation" à 1'12 et 2' ou encore "Techkinox Wormhole" à 2'50. Ces passages ne choquent pas et vont bien avec la musique mais Wormed vaut bien mieux que cela.
Car ce qu'il y a de bien avec
Exodromos c'est que vu l'avalanche colossale de riffs et de changements de rythme qu'on se prend dans la tronche, il y a beau avoir pas mal de moments pas folichons, on trouvera tout de même suffisamment de bonnes choses pour prendre un sacré plaisir. Et le point le plus important du nouveau visage de Wormed, c'est l'utilisation prononcée de la dissonance. Voilà l'intérêt numéro 1 de
Exodromos. Quand celle-ci se retrouve mélangée à du blasts et d'excellents riffs en tremolo, l'orgasme auditif n'est pas loin ("The Nonlocality Trilemma" à 1'13 et 2'07, "Tautochrone" à 1'45, "Multivectorial Reionization" à 1'14, "Spacetime Ekleipsis Vorticity" à 2'05, etc.). Il sera même atteint sur le quasi-instrumental final "Xenoverse Discharger". Une tuerie monumentale de six minutes (deux fois plus que les autres morceaux qui eux ne s'attardent pas) qui vient clôturer l'œuvre de façon magistrale! Quand Wormed tourne à plein régime, entre la brutalité, le chaos et la maîtrise technique, on a vraiment l'impression d'être happé par un trou noir en train de dévorer la matière environnante. Une ambiance implacable, sombre et froide bien mise en valeur par une production synthétique claire et puissante, qui sied à merveille aux thèmes du groupe et à laquelle s'ajoutent en fin de morceau quelques brefs samples cyber/électroniques. Coup de chapeau donc aux deux compositeurs Migueloud et J.Oliver pour le travail accompli. Il faut également féliciter le batteur Riky dont le jeu varié, ultra dynamique et tout en cassures se révèle un des gros points forts de
Exodromos. L'ex-Avulsed est un des rares à pouvoir concurrencer Lille Gruber. Comme pour l'Allemand, il n'y a que les semi-blasts qui ont du mal à passer, notamment à cause du son triggé qui ressort davantage et n'est pas des plus agréables. Quant à la basse de Guillemoth, c'est un peu le parent pauvre de l'album. Elle peine à se faire entendre dans ce déluge de riffs et de blasts.
Le cas Phlegeton est à part. Responsable de tout le concept, des paroles à la pochette en passant par les effets sonores, le chant de l'Espagnol déterminera pour la plupart l'appréciation ou non de l'album. Si musicalement,
Exodromos a tout pour plaire, les vocaux restent le point le plus litigieux. Pas de growls ici, plutôt des inhales, des pig-squeals complètement incompréhensibles que beaucoup trouveront même ridicules. Pour ma part, je m'y suis habitué et les tolère désormais (ils m'avaient par contre gâché l'écoute de
Degradation Paradox de Human Mincer). Qui plus est, ils donnent de la personnalité au groupe, qu'on aime ou pas, et on reconnaît tout de suite le petit Ibérique aux très longs cheveux. Dommage toutefois qu'on ne puisse pas discerner les paroles pourtant bien plus intelligentes que de coutume dans le brutal death.
Quasineutrality l'avait annoncé, Wormed est de retour en très grande forme. Avec
Exodromos, le combo de Madrid se positionne même comme un des rares groupes à pouvoir rivaliser avec le
Passages Into Deformity de leurs camarades de label Defeated Sanity qui restent toutefois bien ancrés tout en haut du top brutal death 2013. La formation a évolué de son brutal death slammy foutraque vers un brutal death tout aussi chaotique mais davantage maîtrisé, moins groovy et plus moderne, et développant une nouvelle ambiance froide, mécanique et dissonante s'intégrant parfaitement au concept qui a toujours été celui de Wormed. Malgré son côté dense, intense et imprévisible,
Exodromos a en plus le bon goût d'avoir un effet immédiat sur l'auditeur même si sa pleine valeur ne se révèle qu'après un nombre conséquent d'écoutes attentives (un "grower" en somme). On ne pourra cependant que regretter l’abondance de riffs syncopés sans grand intérêt qui dénotent face à l’excellence de séquences blastées dissonantes absolument jouissives, avec un passage à vide dommageable composé de "Darkflow Quadrivium", interlude court mais très moyen, "Stellar Depopulation", morceau assez faible jusqu'à l'arrivée à 2'47 de blast-beats salvateurs et un "Techkinox Wormhole" trop inégal. Ce pourquoi la note ne s’élève pas au-delà de 8/10 même si dans l'esprit, l'opus mériterait mieux tant ils sont rares ces albums à faire bouger le brutal death. Malgré ces défauts,
Exodromos reste ainsi une des sorties majeures de l’année. You've been wormed!
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