Les résolutions de Dead pour l'année 2013.
Résolution #5 : boucler des discographies (de groupes dont tout le monde se fout).
A l'instar de nombreux webzines, Thrashocore n'a pas échappé au ras-le-bol des promos. La disparition de la promotion physique au profit du numérique, le manque de confiance/considération des labels vis-à-vis des webzines, la déferlante de productions et peut-être aussi la baisse générale de sa qualité, tout ceci a eu raison d'une partie de notre enthousiasme à l'égard de la nouveauté. Cela pourrait paraître hautain de notre part mais croyez-moi, être chroniqueur n'est pas toujours une partie de plaisir car plus le temps passe, plus on amasse de connaissance, plus notre temps pour la musique se réduit et plus on a envie d'écouter des choses qui nous font plaisir. Un peu comme toi cher lecteur qui choisit scrupuleusement ce que tu veux mettre dans tes oreilles. Il y a quelques années, notre taux de nouvelles sorties chroniquées dépassait 60% ; il est aujourd'hui en dessous de 45% et la tendance ne devrait plus s'inverser car nous tous préférons te faire découvrir les albums et les groupes qui comptent pour nous, et non un nième clone de je ne sais quelle formation très influente. Tout ça pour dire que 2013 risque d'être une année qui bouche des trous, même ceux dont vous ne soupçonniez pas l'existence.
Et en parlant de trou insignifiant, je suis bien conscient que la discographie non bouclée de The Chant ne vous empêchait pas de dormir. Je suis également conscient qu'une fois bouclée, cela n'améliorera pas votre sommeil. Et je suis aussi conscient que la plupart d'entre vous n'en a strictement rien à faire, surtout vu le nombre de chroniques publiées en ce moment. Mais un jour, quand vous serez au coin du feu avec votre moitié pour passer une soirée tranquille et que vous n'aurez sous la main que du Dying Fetus ou du Cannibal Corpse, vous le regretterez. Enfin je dis ça, vous vous en foutez peut-être de baiser après tout.
Trêve d'enfantillages, ce second essai des Finlandais est bien plus qu'un ticket pour le septième ciel. Après s'être cherché pendant près de 10 ans pour aboutir à un
"Ghostlines" juste correct, le groupe, en seulement deux petites années, prend le virage qu'il fallait en laissant de côté le gothique pour embrasser l'atmosphérique, ne conservant que la mélancolie qui faisait la profondeur du premier album. Désormais leur style oscille entre Anathema, ShamRain et Katatonia (période "Last Fair Deal Gone Down"), avec un petit côté progressif rappelant Wolverine ou Riverside. Toutefois, si l'orientation est résolument rock, leur musique profite largement de leur passé metal et joue sur les contrastes entre d'une part les guitares hurlantes et les quelques interventions musclées de Ilpo ("Reflected", "Will You Follow?", "Safe World"), et d'autre part le chant clair, le piano et une base rythmique très ronde. De plus, Ilpo a arrêté de surjouer son rôle de frontman et fait des merveilles de sa voix : tout en simplicité et en subtilité, elle devient un élément central de l'identité du groupe. Comme son grand frère, "This Is The World We Know" brille par le travail effectué sur ses arrangements et par une production exemplaire signée Ville Sorvali (encore) qui donnent à chaque composition, une ambiance d'une grande profondeur, très prenante.
Ne cherchez pas ici l'originalité. Je ne saurais d'ailleurs vous dire si The Chant en avait la prétention. Ce second essai est simplement à prendre comme une parenthèse dans votre existence et mise tout sur les émotions qu'il vous procurera, à coups de refrains entêtants, de mélodies assassines et d'atmosphères intimistes. On retrouve la même tristesse, le même mal-être que sur
"Ghostlines" mais exprimés avec plus de retenue, de pudeur, une maitrise de l'impact émotionnel qui va de paire avec une maitrise de leur style en général. Les quelques débordements que comptent l'album restent sous contrôle et observent ce recul que l'on ressent en permanence, comme si les Finlandais avaient enfermé toute leur rage dans une boîte ne laissant échapper que quelques bruits fugaces. "This Is The World We Know" revêt alors plusieurs visages, incitant à la rêverie ("Relativity", "November 1987", "New Reality"), à la réflexion ("The Black Ascension", "Reflected") ou à l'extériorisation ("Will You Follow?", "Safe World") ; quelque soit le propos, le groupe se montre irréprochable et nous balade sans cesse selon ses humeurs. Sans être mauvais, seul "Armored Man" m'a semblé en dessous du lot et en décalage avec le reste.
Avec un peu d'audace, "This Is The World We Know" aurait vraiment pu être excellent au lieu de n'être que très bon. Il faudra donc faire avec. Cela n'enlève rien à sa classe, à sa beauté et à son feeling, un album qui tourne sans accrocher et qui aurait mérité une distribution moins confidentielle. Ce n'est pas le seul me direz-vous.
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