Sad - Devouring the Divine
Chronique
Sad Devouring the Divine
Depuis 2005, les Grecs de SAD font leur petit bonhomme de chemin, bien cachés dans les miasmes du Black Metal Underground sans jamais briller outre mesure. Toujours plus ou moins considérés comme faisant partie de la longue liste des éternels seconds couteaux, au gré d'albums plus ou moins bons, les méditerranéens pourtant mené par l'émérite Ungod, aux projets de qualité (NARGOTHROND, NECROHELL...) peinaient clairement à m'intéresser : trop de facilités mélodiques dans leurs riffs, trop de mièvrerie dans certains morceaux et une audace soit complètement atrophiée, ne sortant presque jamais des bornes propres au style, soit complètement exagérée... pensons à l'échec lamentable qu'était la reprise de RADIOHEAD, « Street Spirit » ! Du coup, vous devez déjà vous demander ce qui me pousse aujourd'hui à m'intéresser de plus près à ce Devouring the Divine, au point de se l'infliger plusieurs fois en vue d'une chronique ? Je ne vais pas vous le cacher, c'est d'abord son artwork tout bonnement somptueux qui m'a instantanément pris l’œil en otage pour ne le relâcher qu'une fois l'acquisition du vinyl chez l'excellent Hass Weg Productions accomplie. Exit les sempiternels clichés, place à une illustration personnelle et accrocheuse, exposant une sinistre chimère qui affirme à merveille les progrès évidents effectués par SAD qui allait, au travers des extraits qu'on pouvait entendre sur le net avant sa sortie en février, déverser dans cette cuvée 2013 son lot de surprises.
Et pour ce qui est de la surprise, elle est bien présente ! Qui attendait SAD à ce niveau ? Sûrement pas moi. Je n'étais vraiment pas de ceux qui pensaient taper du pied en rythme tout en secouant inconsciemment la caboche et me remplir de frissons à l'écoute de ce Devouring the Divine. « Cursed By The Light » introduite par ses cinglants coups de caisse claire, plante la bannière d'un duo revigoré, à l'atmosphère revancharde. « Vous nous avez pris pour des buses ? Tant pis pour vous ! », semblent-ils rugir au travers de textes certes clichés mais toujours fielleux et désespérés. Les progrès accomplis sur les riffs sont criants, à l'image de l'énorme « Grim Reflexion » et de ses lignes mélodiques déchirantes, à mille lieux des tremolos vaguement mélancoliques qu'on pouvait entendre sur certains morceaux clairement dispensables des précédentes sorties. Ici, les ralentissements (« Grim Reflexion », « Messenger of Corrosion ») sont parfaitement exécutés et ne coupent la dynamique que pour mieux poignarder le cœur de l'auditeur livré en pâture à la beauté et à la grâce évidente de ces riffs, ascenseurs express vers la transe. S'il pourra rester sceptique au début (« non mais calme toi Michel, c'est SAD quoi... ») le fanatique de Black Metal classique à la Finlandaise par exemple ne manquera pas de pousser des cris transcendés (« quand même ! Merde ! ») à l'écoute des rythmes endiablés sur lequel jongle cet album. On reconnaîtra évidemment les influences de combos emblématiques comme SARGEIST ou HORNA dans ces hymnes pleins de profondeur proposés par SAD.
Le point fort de ces Grecs a toujours été la voix ultra criarde de Nadir, contribuant bon-grès mal-grès à leur façonner une identité par le passé. Ici, cette voix trouve enfin des riffs auxquels répondre, et ce sans aucune fioriture malvenue. La douleur de ce vocaliste qui habite avec panache les hymnes Black Metal qui composent ce Devouring the Divine n'en est que plus crédible ! Ses cris sont amples et sa voix reste très sèche, très naturelle : aucun effet ne semble être utilisé pour lui donner un supplément de puissance, qui se suffit à elle-même. Son agonie sur les fins de cris lui octroie une vraie intensité dramatique, maintenue durant tout l'album. Au milieu de ce son fort équilibré et juste, elle n'est que plus marquante et assommante ! Si elle reste toujours assez aiguë, elle explore aussi d'autres registres, lançant notamment avec un dégoût salvateur la sublime dernière piste « I Bleed A Lake ». Même si les textes restent très classiques et assez peu inventifs, jonglant sur les thématiques blasphématoires et guerrières habituelles pour le style, la fougue homogène inhérente à ces sept cantiques les compense assez largement.
La morsure d'énergie créée par l'enchaînement « Unholy Crusade » / « Messenger Of Corrosion » est mortelle. Voilà deux morceaux qui brillent par leur efficacité extrême, véritable maître-mot d'un album qui sait varier les plaisirs sans jamais tomber dans la lassitude. Morceaux plus courts, plus concentrés... même sur « I Bleed a Lake », dernier morceau de l'album caractérisé par sa longueur, SAD ne retombe pas dans ses travers, sachant varier l'assaut tout en restant à la fois binaire notamment au niveau de la batterie et subtil au niveau des riffs. On pourrait croire que l'intensité redescend sur « The Fossilisation Process » ? Pas un brin les gars, l'introduction un peu bateau et en dessous du reste s'efface rapidement au profit d'une déferlante de riffs alternant entre un « poum tchac » salement bonnard et un blast beat surplombé par une mélodie obsédante qui restera durablement en tête. T-E-R-R-I-B-L-E. En plein milieu du morceau, le pont continue l'agression et maintient l'auditeur dans une dynamique constante. Les méditerranéens développent sur cet album une science du riff efficace qui séduira à n'en pas douter les amateurs de ce genre de Black Metal crû et direct tout comme les énergumènes moins rompus à l'exercice qui prendront le temps de poser l'oreille dessus.
« Arrêtes de t'enflammer, Arsène ! », me dit-on dans l'oreillette... Bon sang, mais puisque je vous dis que ce très bon Devouring the Divine relègue les précédentes sorties au rang d'anecdotiques ! À l'évidence, SAD passe de « groupe pas-dégueu-mais-trop-générique » à « groupe sous-estimé » en 2/2. Passement de jambes, dépôt de carte de visite et passe décisive, le tour est joué : leur Black Metal ira dans la lucarne sans se perdre dans des dribbles inutiles ou des combinaisons foireuses. Sans nul doute, ils passeront au travers de n'importe quelle défense préparée à ce genre d'assaut délicieusement régressif. Défauts et clichés mis à part, les Grecs affirment avec leur fière nouvelle offrande qu'on peut encore sortir un très bon disque de ce registre en 2013. En espérant qu'ils parviennent à retrouver la même inspiration brûlante pour un successeur digne de ce nom, pour dépasser ce statut nouvellement acquis et débroussailler davantage les branches envahissante de l'Underground qui les condamnait jadis à stagner.
| Voay 21 Juillet 2013 - 3339 lectures |
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