Thou / The Body - Released from Love
Chronique
Thou / The Body Released from Love (Coll.)
Ceux qui ont lu ma chronique de
Heathen ne seront pas étonnés de me voir une nouvelle fois virer ma cuti concernant Thou. Certes, la troupe menée par Bryan Funck continue de me déplaire sur ses albums antérieurs mais son sludge magnifié, improbable, est tellement maîtrisé sur ce dernier longue-durée que je me devais de voir si cela tenait du coup d'un soir ou de la révélation durable.
Et après écoute de
Released from Love, la balance commence à pencher sévèrement vers la deuxième option. Plus surprenant, elle me fait m'intéresser de nouveau à une formation dont je pensais ne plus avoir quelque chose à attendre : les autistes de The Body et leur jusqu’au-boutisme industriel me laissant globalement froid jusqu'à présent. Mariée au sludge particulier des résidents de Baton Rouge, la musique du duo Chip King/Lee Buford devient toute autre, attrapant cette beauté létale qu'elle a pu avoir sur le troublant
Nothing Passes, collaboration avec Braveyoung.
Quatre morceaux pour vingt-et-une minutes d'une parfaite alchimie, Thou se chargeant de peindre l'air par des guitares et un chant balafrant la nuit de leurs éruptions de couleurs fanées et The Body d'attaquer de leurs rythmiques totalitaires les personnes prises par le spectacle. Une emprise complète, à la fois méthodique et paraissant enregistrée dans l'instant (la production brute donnant un aspect immédiat aux morceaux coulant les uns sur les autres) sans général ni soldat, simplement une volonté commune d'empoisonner un monde imaginaire où tous se trouvent contaminés par les mélodies toxiques de « The Wheel Weaves as the Wheel Wills » et les leads stridentes de « In Meeting Hearts Beat Closer ». Clairement, ce travail d'apprenti-chimiste est d'une violence rare, les deux entités matraquant de concert avec un naturel confondant étant donné l'originalité de leurs musiques respectives. Mais deux groupes aussi adeptes des mutations en tous genres ne pouvaient s'arrêter à une « simple » envie d'acculer :
Released from Love est aussi étrangement beau, d'une atmosphère merveilleuse où l'acide et la rouille sont les matières premières. Un tableau trouvant sa touche finale dans la reprise de « Coward » (initialement de Vic Chesnutt), titre country et noise à rapprocher de « The Vision » sur
Nothing Passes dans son ambiance apocalyptique, tragique.
Impossible de faire le compte par tête sur
Released from Love. Sa magie est si personnelle et prenante qu'elle paraît l’œuvre d'un seul monstre. Si « Manifest Alchemy » est moins intéressante que ses sœurs, les compositions qu'ont créées ou réinterprétées ici Thou et The Body sont si bestiales et poétiques à la fois qu'elles donnent envie de garder le mystère intact. Je ne peux m'empêcher de conseiller tout de même l'écoute à ceux pensant, comme moi il y a peu, que The Body était trop « à-part » pour leur plaire, les deux mongoliens étant apparemment bien plus doués que j'ai pu le croire. Mais pas de « mea culpa », cette fois-ci : après l'écoute d'un tel disque, j'estime avoir eu ma dose de flagellations !
| lkea 12 Octobre 2014 - 1005 lectures |
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