Phobocosm - Deprived
Chronique
Phobocosm Deprived
Parmi les quelques découvertes révélées cette année par le label Dark Descent, on trouve les Canadiens de Phobocosm. Originaire de Montréal, ville particulièrement sympathique rendue "célèbre" pour ses formations de Death Metal technique et/ou progressif (Beneath The Massacre, Neuraxis, Augury, Beyond Cration, Despised Icon), le groupe voit le jour en 2008 à l’initiative de quelques acteurs locaux (re)connus pour leur travail au sein de Vengeful, Towards Darkness et Atheretic. En 2012, Phobocosm est rejoint par Rob Milley, guitariste de Neuraxis et décide alors de passer à la vitesse supérieure. Ce n’est pourtant qu’en septembre 2014 sur le fameux label de Denver que Phobocosm sort son tout premier enregistrement officiel intitulé Deprived.
Le bon goût de Dark Descent faisant désormais foi dans tout l’underground Death Metal, c’est sans trop réfléchir et sur la base d’un court extrait que je me suis décidé à faire l’acquisition de ce premier album dont le travail d’illustration a été confié à Chimère Noire (Portal, Ghäst, Unearthly Trance, Monarque...). Et depuis, lors de chaque écoute, je me félicite de l’avoir fait, continuant ainsi de découvrir des artistes sur disque plutôt qu’en MP3.
Canada oblige, Phobocosm pratique un Death Metal finalement assez dense qui se rapproche beaucoup de ce que peut faire un Antediluvian ou un Portal, notamment en matière de riffing dans ce qu’il a d’écrasant et de dissonant à la fois (ces patterns entêtants qui semblent bourdonner au-dessus de nos têtes). La seule différence est la façon de rapporter le propos. Si dans le cas d'Antediluvian, celui-ci aime à jouer sur le caractère organique et monolithique de sa musique à travers une production moite et étouffante, il y a davantage de nuances apparentes dans les compositions de Deprived. En cela, le groupe se rapproche davantage d’un Incantation ou d’un Funebrarum avec qui il partage ce goût juteux pour les passages mid-tempo aussi écrasants que terrifiants. Un fait que l’on peut constater d’entrée de jeu en pressant la touche "play" grâce à "Sleep Deprivation", titre instrumental de plus de trois minutes en guise d’introduction durant lequel Phobocosm va mener l’auditeur dans son univers grisâtre en empruntant un chemin tortueux et pourtant mélodique. Inutile de préciser que l’on se laisse très vite attraper par cette longue entrée en matière qui appel évidement à en découvrir davantage avec dans son sillage l’excellent "Solipsist" qui finira par se durcir passé les deux minutes.
C’est d’ailleurs l’une des constantes de Phobocosm dont la musique se partage entre longues séquences "Doomy" à l’atmosphère oppressante et passages beaucoup plus francs et appuyés durant lesquels le groupe va laisser libre court à son énergie destructrice ("Solipsist" à 2:15, "Knives In The Senate House" à 0:37 et 2:26, la première partie très frontale de l’excellent "Solar Storm", "27 Days Of Darkness" à 2:43, "Drowned" à 2:15, "Awaken Unconscious" jusqu’à 1:19 puis de nouveau à partir de 3:05, "Forever In Doubt" à 0:47 et 3:31). Un chaos en apparence bordélique (beaucoup de blast, de riffs dissonants et de cymbales dans tous les sens) mais on ne peut plus maîtrisé (un bon niveau de jeu général et des instruments bien équilibrés). Ainsi, ceux pour qui la lisibilité d’un album d’Antediluvian ou Portal pouvait jusque-là poser problème ou ceux qui ont du mal à digérer les passages plus lents faute d’attention, pourraient être susceptibles de trouver en Phobocosm un bon compromis capable de vous briser les cervicales tout en vous enfonçant tant bien que mal le crâne six pieds sous terre. Le growl particulièrement profond et caverneux d’un Etienne Bayard pas spécialement pressé mais bien décidé à imposer sa marque sur l’atmosphère de ce disque vient renforcer l’aspect compact des huit compositions d’un Phobocosm décidément massif.
Nettement moins hermétique que les albums à qui il emprunte pourtant beaucoup, Deprived fait donc lui aussi parti des très bonnes surprises que livre cette fin d’année 2014, méritant ainsi très probablement sa place dans un top 10 ou 20. C’est ce qui me plaît chez Phobocosm, cette capacité à attirer le chaland sans pour autant sacrifier à la brutalité ou l’atmosphère. Car ne vous y trompez pas, si l’écoute de Deprived vous sera rendue plus aisée grâce à une production moins étouffante, à des riffs plus lisibles ou à un rythme moins intense, il n’en est pas pour autant un disque facile ou que l’on peut espérer apprivoiser à la légère. Phobocosm est lourdeur, noirceur, profondeur et dissonance. Le reste n’y changera rien.
| AxGxB 30 Décembre 2014 - 982 lectures |
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