Sad Iron - Total Damnation
Chronique
Sad Iron Total Damnation
On ne rigole pas! Oui, le nom du groupe est douteux. Oui, le logo avec les larmes nous en fait tirer aussi. Et que dire de cette pochette invraisemblable, même pour moi qui a pourtant, en tant que fan inconditionnel des années 1980, une grande tolérance au ridicule. Mais sachez que cet album, sorti à l'origine en 1983 et réédité fin mars pour la première fois en CD grâce à Skol Records, s'avère un pur bijou méconnu de heavy metal des plus rock 'n roll.
Si Sad Iron vient des Pays-Bas, de Hoorn précisément (un nom pour le moins metal!), le groupe pourrait porter fièrement le Union Jack tant sa musique sonne comme de la NWOBHM. C'est peut-être son origine qui lui a valu un manque de reconnaissance ou le fait que ce Total Damnation ait débarqué peut-être deux ou trois ans trop tard par rapport aux premiers full-length de combos du même genre comme Tygers Of Pan Tang, Angel Witch, Diamond Head ou Holocaust. Quoiqu'il en soit, les Bataves n'ont pas à rougir en termes de qualité, Total Damnation pouvant prétendre sans soucis au titre de classique.
Très influencé par la scène anglaise du début des années 1980, Sad Iron pratique un heavy metal simple, efficace et diablement rock 'n roll. Vous l'écoutez une fois, vous en êtes déjà fou (foutre Satan l'ouverture batterie/basse de "Prisoners", si c'est pas la vie ça!?)! La faute à tout un tas d'ingrédients qui rendent l'opus incroyablement jouissif. En premier lieu des riffs excellents, très accrocheurs, qui invitent à se déhancher sur le dancefloor, à bouger la tête, taper du pied, ce que vous voulez pour vous éclater. Il n'y a pas beaucoup de riffs par morceau, c'est même souvent le même qui tourne en boucle mais alors putain que c'est bon! Des riffs qui sont l'essence même du vieux heavy metal, ancrés dans le rock 'n roll et le hard rock des années 1970, joués plus vite et plus fort. On pourrait citer tous les riffs principaux des morceaux tant ils se posent comme des hymnes NWOBHM ultra rock 'n roll mais j'ai tout de même mes petits chouchous comme ce riff bien vénère à 3'04 sur "Demon's Night" après le solo ou l'accélération à 4'45 de "We All Praise The Devil" qui me rend dingue. À noter aussi les plus hard rock 70s de "Rock 'N Roll Rendez-vous" à 1'02 ou à 2'16 sur le dernier titre "Three Crown Saws". Un bon album de heavy metal, c'est déjà de bons riffs. Ça, c'est fait. Pour continuer sur les guitares, il y aussi les solos, primordiaux dans le style. Là aussi, Sad Iron fait montre d'un talent insolent. Souvent longs et endiablés, dotés d'un feeling naturel et de mélodies qui font mouche, on en trouve à foison dans tous les morceaux. Les mots rock n' roll viennent encore une fois à l'esprit. D'autant qu'il n'y a qu'un guitariste à la barre, le phénoménal Bernard Rive, qui ne s'est pas emmerdé à enregistrer une piste pour la rythmique pendant ses envolées solitaires. Du coup, seul la basse ronde et la batterie lourde soutiennent les solos. Cela donne encore davantage de groove et un charme désuet irrésistible.
Ce dernier se révèle un facteur important de ce Total Damnation à prendre en compte lorsque l'on écoute le disque aujourd'hui. Bien sûr, à l'époque, il était à peu près dans l'air du temps malgré quelques années de retard sur le UK. Aujourd'hui, il faut aimer les productions très old-school, un peu vieillottes même, qui pourraient passer comme complètement datées, ringardes, pour un auditeur actuel. Si la musique en elle-même pour qui aime le style devrait faire consensus, le chanteur Herke van der Poel se révèle un cas plus épineux. Il en ressort un côté garage, à l'arrache qui me fait penser à Holocaust et son The Nightcomers. Le frontman propose un chant bancal, très limité techniquement. Mais il le fait avec le cœur, les tripes et une attitude bad-ass à la cool qui lui donne un putain de charisme. Personnellement, je suis fan! Le bonhomme a en plus une facilité déconcertante pour trouver des rythmiques et des mélodies vocales accrocheuses. Il en résulte des couplets dansants et des refrains catchy fédérateurs. Ah ce "Demon's Night" d'ouverture! On pourrait citer aussi "Rock 'N Roll Rendez-Vous" ou "Hellfighter" dans la même veine. Le vocaliste s'essaye aussi à du chant plus doucereux sur "Total Damnation" dont la première partie s'apparente à une ballade. À première écoute, ça fait saigner les tympans et on se dit que le mec aurait pu prendre des cours de chant. Mais l'intérêt n'est pas là. Le fond plutôt que la forme. Et moi j'adore ce morceau! Ce côté immature, innocent, naïf, à l'arrache qui représente toute une époque, tout un âge. C'est pour ça que j'avais été un peu déçu du concert du groupe au Very' Eavy. Seul un petit con insouciant peut chanter ces morceaux! Et que dire des paroles. Très adolescentes. Le must étant celles de "We All Praise The Devil", long morceau tout aussi énorme que les autres plus courts qui montre que même quand Sad Iron pousse la durée sans ajouter beaucoup de riffs (le cas aussi sur "Total Damnation" et ses presque sept minutes), il n'ennuie même pas. Vous savez ce que dit le refrain sur ce fameux "We All Praise The Devil"? We all praise the Devil, he's so fine, we all praise the Devil, 'til the day we'll die! Absolument génial n'est-ce pas?!
Tout l'album est comme ça de toute façon! Sept morceaux, sept tubes, trente-huit minutes de pur bonheur décérébré. Pour la réédition, Skol Record a bien sûr prévu de rallonger ce bonheur avec cinq titres bonus. D'abord deux lives, "Thunder And Lightning" et "School Girls" tirés du split de 1982 Holland Heavy Metal Vol.1 Live in Brouwershoeck avec Seducer. Des compositions dans la même veine burnée NWOBHM rock 'n roll simple et efficace que les originaux de Total Damnation. Puis trois extraits dans des versions démos du deuxième album The Antichrist de 1985 jamais sorti. Là, les choses changent. À tel point que l'on ne dirait pas le même groupe! Sad Iron a en effet entamé une évolution speed/thrash liée à l'époque, plus rapide et teigneuse. Ça ne s'entend pas sur l'intro de "Powerthrash" sur laquelle la Castafiore est en guest mais une fois que ça crache, ça ne fait pas semblant, entre Exciter, Whiplash et Razor! "Living Like A Rat" va un peu moins vite mais reste dans la même veine, après une ouverture où ça shredde de façon bien virile. Et puis il y a des "oh oh oh" et des chœurs sur le refrain. La pure éclate quoi! "We Play To Kill" ne dévie pas mais démontre qu'en fait, Sad Iron joue toujours le même type de riff mais de façon plus rapide, plus agressive et avec moins de groove. Ça me va aussi même si je garde une préférence pour les titres heavy de Total Damnation.
Ces bonus portent la durée de l'album à plus d'une heure. Un peu long en ce qui me concerne car, même s'ils s'avèrent de grande qualité, l'opus perd forcément en efficacité. Il aurait été plus judicieux de faire une réédition sur un double CD avec sur un premier support Total Damnation dans sa version remasterisée d'après les tapes d'origine (ça ils pouvaient s'en passer, je ne comprends pas l'idée de retoucher à une œuvre) et sur un deuxième les bonus en poussant à The Antichrist en entier si cela était possible. Loin de moi toutefois l'idée de me plaindre de cette réédition, une véritable bénédiction pour les amateurs de heavy metal qui n'ont pas de platine vinyles ou n'en veulent pas. On dit donc un grand merci à Skol Records qui nous fait redécouvrir une pépite oubliée, certes un peu en retard sur les leaders de la NWOBHM, mais tellement charmant. Si vous aimez le heavy metal bien rock 'n roll du début des années 1980, super efficace, pas prise de tête, à l'arrache et qui transpire l'immaturité, foncez sur ce Total Damnation complètement génial.
| Keyser 14 Juin 2015 - 797 lectures |
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