Après une demo prometteuse, parue en 2014, où le duo de Portland montrait son fort attachement à la scène death US fin 80/début 90 et notamment Autopsy, avec une reprise d' « Embalmed » clôturant
An Oath of Blood and Fire, le voici faire son grand retour l'année suivante. Revenant sous la forme d'un trio, Absque (Lung Molde,...) les ayant rejoint entre temps aux postes de guitariste et bassiste, les prolifiques Ad Infinitum et Cedentibus (respectivement R et M : Ash Borer, Uzreit,...) délivrent donc un premier album éponyme, afin de confirmer – ou non – les attentes portées sur leur formation. Et si vous retrouvez ce bon feeling old-school avec des riffs bien catchy, Triumvir Foul évolue ici, franchissant clairement un cap. En effet, à l'image du gloomy artwork réalisé par Timo Ketola (cf. Dead Congregation, Mortuus, Teintanblood,...) – seyant parfaitement avec le logo créé par Samu Salovaara (également membre de Swallowed) – les Américains déversent leur atrabile durant 40 minutes éprouvantes.
Car le noir prédomine ici, Triumvir Foul délivrant des ambiances toujours plus cryptiques et blasphématoires. Un fait qui vous frappe dès les premières minutes avec l'introduction incantatoire du long titre d'ouverture « Labyrinthine - The Blood Serpent Unwinds », ouvrant grand son vortex brumeux et électrique. Des ouvertures souvent glaciales vous happant sur de nombreux morceaux comme le monstrueux « Tower of Bašmu - The Corruption of Flesh and Spirit » avec ses riffs tortueux et sa conclusion bruitiste malsaine. Vous l'aurez donc compris les Américains souhaitent faire mal et ils y parviennent sans forcer, en affûtant les angles et déversant leur fiel. En résulte une musique beaucoup plus terne, sombre mais tranchante où les parties up tempo ainsi que les soli explosifs viennent souvent jouer des coudes avec les passages rampants propres au groupe. Que ce soit sur la grosse entrée en matière de « Endless Spiritual Violence » – captivant de bout en bout – et les moult montées en puissance (la massive « Hedonistic Prayrer - the Abhorrent Depths of Perversion » ou encore « Carnal Spectre »), impossible de se défaire de l'étreinte tant l'ensemble est prenant. Vous vous laissez embarquer docilement dans les abysses, mené par le growl profond réverbéré d'Ad Infinitum et obnubilé par les sonorités tant addictives que nocives.
Si le rapprochement avec – entre autres – Cruciamentum et son EP
Engulfed in Desolation paraissait évident lors de la sortie de la demo
An Oath of Blood and Fire, c'est plus du côté de formations telles que Grave Miasma (
Realm Of Evoked Doom) qu'il faut désormais aller voir. En effet, Triumvir Foul corse considérablement son jeu sur son premier album, accumulant les superlatifs à la manière de Vorum (cf.
Current Mouth) – plus profond, plus dynamique, plus corrosif, plus ! Plus ! Plus ! Le travail effectué sur les atmosphères est également conséquent, créant une parfaite alchimie avec les riffs entêtants délivrés par Ad Infinitum et Absque lors des passages low et mid tempo. Ces derniers sont d'ailleurs mis en relief ici par des accès de violence sortant de nulle part, donnant davantage de variation et évitant les longueurs. De même, la construction des morceaux est beaucoup plus ciselée comme vous pouvez l'entendre sur « Labyrinthine - The Blood Serpent Unwinds », avec le développement créé autour du riff en début de titre, ou encore sur la jouissive « The Vomit of the Three Serpents (Ušumgallu, Bašmu, Mušmaḫḫū) », vous faisant ployer à coup de soli et de lignes de guitares brise-nuques. Le groupe se drape de noir mais tout en gardant son essence avec cette production bien raw ainsi qu'un côté à la fois caverneux et sauvage, incorporant plus savamment les riffs catchy afin d'annihiler un peu plus vos cerveaux.
Triumvir Foul vous offre un aller simple dans les tréfonds insondables avec un premier long-format morbide et claustrophobique au possible. S'inscrivant dans la lignée des groupes de death metal bien dark, ce dernier arrive néanmoins à se démarquer par une personnalité propre. Ni trop bourrins, ni trop abscons ou encore techniques, les Américains ne cherchent qu'à fédérer avec des titres d'une efficacité redoutable. Le seul petit bémol viendra de la similitude de certaines introductions avec ces grésillements de guitares qui peuvent irriter à la longue. Rien de très gênant au final, tant cet album emporte tout sur son passage.
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