Je suis franchement étonné que personne n'ai encore écrit à propos du Crepulsculo Negro sur Thrashocore. Ça fait quand même un petit bout de temps que l'entité Américaine a fait son trou dans le Black Metal avec des groupes comme Arizmenda, Odz Manouk, Kuuxan Sum, Axeman ou encore Volahn qui nous intéresse aujourd'hui. Le Crepulsculo Negro, aussi connu sous le nom de Black Twilight Circle, c'est plus que de la musique. S'il est régulièrement comparé à l'Inner Black Circle ou aux Légions Noires, je n'en ferais pas mon affaire, trouvant qu'excepté le principe de l'association de groupes, il n'y a pas grand chose en commun entre ces groupuscules disparus et le cas des Américains. Non, ce qui pré-occupe Eduardo Ramirez, c'est la réhabilitation de la culture pré-colombienne et également – un peu - l'anarchisme (ses accointances avec Mystifier, Amebix ou Doom ou ses sides-projects de Crust parlent pour lui). Et il a bien raison parce que Teotihuacan, Texcoco, Tikal, Palenque, Chichen Itza et Tenochtitlan, c'est quand même des villes qui pètent la classe. D'ailleurs, les anglicistes peuvent se renseigner sur les principes musicaux et intellectuels du monsieur en lisant
cette interview publiée dans Noisey. En plus, il n'aime pas du tout les groupes qui utilisent l'imagerie de la seconde guerre mondiale pour se revendiquer du Mexique, ce qui contribue clairement à me le rendre sympathique parce qu'il y en ras-la-casquette de cette occidentalisation à la con. C'est d'ailleurs un peu grâce à Noisey US et à Cvlt Nation que tout le monde a entendu parler de lui vers 2013.
Pour être franc avec vous, j'avais réservé « Aq'Ab'Al » début 2015, au moment de sa ré-édition CD par Iron Bonehead et puis je l'avais complètement oublié, perdu dans les méandres de mon ordinateur. Et puis, mon collègue Sagamore (HEY!) en a parlé sur le forum, ce qui a fait office de piqûre de rappel tardive, me donnant l'envie d'approfondir ce disque que j'avais trouvé très bien mais qui était mystérieusement passé à la trappe. Mieux vaut tard que jamais et il était bien temps que quelqu'un démarre le sujet Crepulsculo Negro ici-même. Au programme, une heure de Black Metal inspiré de la culture d'Amérique Centrale. Et franchement, si Volahn revendique ses inspirations dans le Black classique (pour ne pas dire « True »), il serait une erreur de croire que l'on va écouter et apprécier « Aq'Ab'Al » comme on se pencherait sur un disque de Sargeist. Si la production signée Arthur Rizk (il a travaillé avec Goat Semen ou encore avec Inquisition) oscille généreusement entre un rendu un peu crado et une qualité sonore qui reste puissante, c'est presque le seul ingrédient qui me permet de relier Volahn au Black traditionnel.
Le reste n'est que débauche de riffs parfois franchement tarabiscotés, parfois beaucoup plus émouvants, passages ambiants à base de claviers / guitares claires et flûte de pan et conceptualisation totale. Volahn est clairement un de ces groupes transpirant la sincérité et franchement, c'est très beau à certains instants, comme sur le passage central de « Bonampak » qui se targue d'une ligne mélodique à tomber par terre. Cette mélodie complètement folle s'emboîte d'ailleurs sur un passage à la guitare sèche, couplé à un sample ethnique du meilleur goût. On a souvent coutume de dire que le Black Metal est forestier et « Aq'Ab'Al » l'est à sa manière, la différence étant que nous ne somme plus dans la sempiternelle assemblée de sapins mais dans une jungle dense et étouffante.
Le plus fort dans ce disque effleurant le qualificatif de « pavé », c'est sa capacité à nous prendre à la gorge tout au long des six morceaux qui le compose. La cohérence du propos, l'enchaînement toujours excessivement bien réussi entre les pistes permet à l'auditeur de toujours rester à l'intérieur de la musique, ôtant par la même occasion ce sentiment pénible d'être parfois laissé au bord de la route. Les riffs tendus de « Quetzalcoalt », la mélodie simpliste en plein milieu de « Nawalik », les enchevêtrements harmonieux de « Koyopa », tout semble étudié pour nous surprendre à chaque instant. « Aq'Ab'Al » représente à la perfection sa pochette, il nous emmène de force dans un univers teinté d'ésotérisme, de chamanisme irradiant d'une beauté pure, loin de toute forme de clameurs occultes. La mystique méso-américaine aidant bien sûr dans l'illustration des images musicales fournie par Volahn.
« Aq'Ab'Al » enchaîne les riffs mémorables, soutenus par une basse prenant le rôle d'instrument à part entière, bien supérieur à celui qu'elle incarnait sur « Dimensiónes del trance kósmico ». Il est d'ailleurs également bon de tenir compte des progrès effectués sur la rythmique qui se révèle être un ingrédient majeur, complexifiant encore un peu plus les compositions. Je comparerais presque Volahn à un Krallice perdu dans la jungle, dans la mystique et dans le passé (une impression qui est encore plus forte sur
l'impressionnant dernier morceau de Volahn, intitulé « Chamalcan »). « Aq'Ab'Al » est probablement à hisser dans le top trois des disques de Black Metal qui m'ont le plus marqué ces trois dernières années. Il propose une vision fraîche, novatrice et des atmosphères jamais vues tout en s'appropriant sciemment les racines du Black Metal. Tout en sublimant un héritage musical vieux de vingt ans (la production donc, mais quelques passages font penser au Black Norvégien, ou à la scène grecque), il le déconstruit et y injecte des codes inédits (l'ambiance ethnique en tête), voire novateurs (je trouve des similitudes avec les musiques estampillés « Post-Black »).
« Aq'Ab'Al » est appelé à devenir un classique et précise une nouvelle fois le talent du collectif mexicano-américain. Ceux ayant apprécié le précédent seront un peu surpris mais adhéreront vite et ceux n'ayant pas aimé les débuts - parfois considérés comme trop abrupts - trouveront dans ce dernier full-lenght une raison suffisante de s'intéresser à Volahn. Subtil, surpuissant et aspergé d'une grandeur peu commune, le projet est finalement aussi puissant et mystérieux que les ruines ancestrales qu'il chérit tant...
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