Une fois n'est pas coutume, je rattrape le retard conséquent de chroniques du Crepulsculo Negro sur Thrashocore. Et au programme du jour : le quadruple-Split intitulé « Desert Dances & Serpent Sermons », regroupant quatre pistes pour approximativement quarante minutes de Black Metal. L'amateur avisé ne s'y trompera pas : quarante minutes du B.T.C., c'est bien souvent synonyme de qualité. Une impression qui se confirme assez vite, rien qu'à l'observation des versions physiques encore une fois parmi les plus soignées. On rajoutera en bonus une pochette visuellement réussie et qui a le mérite d'illustrer avec classe l'univers si particulier de l'anarcho-indigénisme si cher au collectif.
Volahn
La charge d'ouvrir les hostilités incombe à Volahn, formation d'Eduardo Ramirez et fer-de-lance de tout le mouvement, plus particulièrement depuis le succès critique de ses deux premiers full-lenghts. Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'avec « Chamalcan », le projet solo n'est clairement pas là pour faire de la figuration. On va faire simple : ce titre est mon préféré de Volahn – suivi de très près par l'impressionnant « Bonampak » sur
« Aq'Ab'Al ». Il est très facile de constater avec quelle maîtrise Eduardo « Volahn » passe des caps à chacune de ses nouvelles sorties. Et le travail effectué sur l'ambiance de ce morceau est ahurissant.
Le nombre d'émotions parcourant ce titre est fabuleux et l'on se retrouve dès les premières notes plongés dans un désert façon Western, avec cette introduction d'abord énigmatique qui finit par se muer en chevauchée solitaire galopante. Comme si ça ne suffisait pas, Volahn nous assène derrière une kyrielle de riffs, parfois simples et efficaces (7.42 min.), parfois hymniques (4.04 min. et ses « Chamalcan ! » scandés en forme de prières) et parfois simplement monstrueux. On citera en exemple le riffing prodigieux qui déboule à 3.30 min. et qui a franchement de quoi faire de l'ombre au « Years Past Matters » de Krallice en terme d'envolées célestes. Il sera d'ailleurs repris vers la fin de morceau, ce qui aura pour effet de nous faire monter les larmes aux yeux. A la première écoute, j'en ai carrément eu des frissons ce qui reste un fait rarissime pour ma part. Carton plein pour Volahn avec ce titre qui se hisse facilement dans le top dix des plus beaux morceaux de Black Metal.
Shataan
Difficile de passer après un tel monument. Et pourtant Shataan (projet de Ramirez et de Murdunbad d'Arizmenda) réussi le pari. En offrant un long morceau – qui est en fait une grande pièce composée de trois petites – résolument porté sur une forme de crypto-paganisme chère au BTC, Shataan parvient à ne pas nous faire perdre le rythme et propose une grande variété musicale. L'introduction de la piste est d'ailleurs une grande réussite, mystérieuse, emplie d'une atmosphère de ritualisme ancestral. On notera également une très belle construction musicale et un grand soin apporté aux petits détails.
Tout ça évolue gentiment en un Black Metal relativement posé, surplombé de chants clairs lointains qui servent à appuyer l'ambiance. On remarque une fois de plus le talent de Ramirez pour nous pondre des riffs alambiqués mais attractifs. Cela dit, Shataan développe un style à part, moins frontal et plus « lointain » que celui de ses collègues. Sans négliger le riffing qui décrasse les oreilles (le milieu de la piste nous le prouve avec ce duo guitare / flûte aussi déstabilisant que superbe), on ne peut pas s'empêcher de voir Shataan comme une entité plus distante, plus portée sur le mysticisme, le religieux et l'imagination floue d'une cérémonie ancestrale. Plus rituel que ses compagnons de route et un poil plus solennel également, dans sa façon d'aborder la musique, « Caminando Del Destino / Desert Smokes / Wells Run Dry » aborde la thématique habituelle du Crepusculo Negro avec une dimension chamanique, pour ne pas dire adepte des écrits de Carlos Castaneda. Une belle réussite, en tout cas.
Arizmenda
Arizmenda est à mon sens un des projets les plus intéressants de la clique. Et pour cause, c'est un peu le tonton halluciné de la famille, avec ces riffs qu'on pourrait rapprocher d'un Aluk Todolo. Il me tardait donc d'entendre ce morceau qui est le plus court de la galette, avec tout de même plus de neuf minutes au compteur, faut pas déconner. Dès le début de la piste, on se retrouve face à un sample d'une étrangeté remarquable, avec des gamines qui font « nanana » sur un vieil orgue souffletant. De quoi entamer l'écouter sous les meilleures auspices, vous en conviendrez. Arizmenda balance un morceau dans la plus pure tradition du projet, cris décharnés et riffs distordus à leur maximum inclus.
La formation a toujours été la plus opaque du groupuscule, celle dont la musique n'est qu'une décharge de notes grouillantes, tournoyantes et agressives. Et ce n'est pas ce « Ropeburn Mutilation on the Outskirts of Life » qui va changer la donne. Une fois de plus, Murdunbad – seul maître à bord – plonge dans son subconscient entre ralentissements d'une noirceur sans nom et accélération faussement foutraques où les riffs s'entrechoquent pour ne former qu'une énorme magma dégoulinant. Le mid-tempo central est d'ailleurs remarquable de noirceur, la putrescence en étant la maîtresse incontestable. Nous ne sommes pas à l'aise en écoutant ce titre et c'est bel et bien ce que l'on recherche en écoutant un morceau d'Arizmenda. Bien joué.
Kallathon
Fin de l'histoire avec Kallathon et son titre « Falling Into The Horizon, Buring Into The Black Twilight » à l’atmosphère plutôt calme et posée, comme pour mieux instaurer une dualité avec le morceau d'Arizmenda qui le précédait. Tout ceci débute donc tranquillement avec quelques guitares au grain saturé, jouant en arpèges et saupoudrées de quelques notes de claviers. Les guitares se mueront par la suite en un trio basse / batterie / chant clair qui n'est pas sans apporter quelques similitudes avec Shataan. Les deux formations partagent ce goût du ritualisme illustré en musique et sont nettement moins abruptes, chacun de leurs titres faisant un peu office de « pause fraîcheur ».
Cependant, n'oublions pas que même si elle est plutôt tranquille, Kallathon reste une formation de Black Metal qui enverra la sauce vers le milieu de la piste avec une riffing plutôt mélodique qui n'est pas sans rappeler les morceaux les plus pépères d'Acherontas. Vu que je dois être franc avec vous, je vous avouerais sans problèmes que cette longue pièce de treize minutes est pour ma part, la moins intéressante de ce disque. Même si le morceau reste efficace et plutôt accrocheur, on ne le repasse pas avec autant de plaisir que les précédents. Une semi-réussite qui fait – tout de même – office de bonne conclusion.
Varié tout en étant fidèle à ses principes, « Desert Dances And Serpent Sermons » est une très bonne manière de découvrir l’œuvre du B.T.C. On profite en plus d'un morceau de Volahn qui justifie à lui seul l'achat de ce Split, clairement au dessus de la masse Black Metal. Un titre exceptionnel, deux titres d'un très bon niveau et un final un poil moins fou mais qui reste tout de même plus que correct. Pari relevé, la tête haute et les yeux tournés vers Tenochtitlan...
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