Pour catégoriser
Nothingless than nothingless, cinquième album du groupe de Metal Extrême Nancéen MORTUARY, j'ai failli mettre : Metal Extrême Lorrain, tant ce disque me fait penser un autre très bon album de même origine géographique paru également en 2016 :
Scornful Of Icons de PHAZM. Outre leur terroir commun les groupes ont plusieurs points d'achoppement :
Gorgor, le batteur de PHAZM a produit les disques des deux groupes,
Dirk Verbeuren, l'ancien batteur de MORTUARY a aussi officié dans SCARVE avec
Pierrick Valence, fondateur de PHAZM...le monde est petit!
Mais surtout, ce qui rapproche les deux groupes c'est qu'ils y ont adopté la même démarche. Ils réunissent des musiciens plutôt blanchis sous les harnais dont les disques ont la même patine. On sent qu'ils ont étés composés par des artistes qui ont digéré leurs influences et sortent une création qui puise son inspiration dans le passé mais parvient à en livrer une interprétation personnelle et (un peu) neuve : PHAZM avec le Black Metal Scandinave comme MORTUARY avec le Death Metal réalisent une belle synthèse entre tradition et modernité.
Laissons PHAZM de côté pour le moment (j'en reparlerai un de ces quatre, c'est promis) pour nous intéresser à
Nothingless than Nothingless. Je viens de relire la chronique que Chris avait faite à propos du pénultième méfait du gang, l'excellent
G.O.D. Si j'étais feignant, je pourrais en faire un copier coller pour chroniquer le dernier né. En effet, les progrès réalisés par le groupe entre les deux galettes sont aussi impressionnants et remarquables que ceux qu'ils avaient déjà réalisés entre
G.O.D (2010) et
Agony In Red (2003). C'est une musique complexe qui reste accessible. Il y a l'urgence, la brutalité, la violence primale du chant et d'une rythmique qui vous assomme sous les coups de boutoir de ses riffs comme une marée d'équinoxe. Il y a la batterie qui vous pilonne comme un barrage d'artillerie. Et au milieu de ce chaos organisé, il y a un travail de composition et de construction intelligents et réfléchis, comme ce motif servant d'introduction à "Only Dead Witness" et d'épilogue à "Kingdom", ou la trilogie que constituent les morceaux "K-OS", "K" et "Kingdom" à propos d'un homme confronté à sa maladie. Une trilogie qui, d'après Patrick Germonville, est parfaitement illustrée par l'artwork de l'album :
"Le corps torturé avec la position de résignation et d'abandon illustre parfaitement les textes de ces titres. On ressent dans ce dessin toute la souffrance du personnage avec le rouge qui transparaît au travers de son corps. Le fond de la pochette me rappelle aussi les formes torturées que l'on retrouve chez Dan Seagrave, célèbre pour ses pochettes de vieux groupes de Death Metal des années 90. Clin d'oeil en quelque sorte.".
Longuement polie et travaillée, la dernière mouture de MORTUARY est d'une agréable complexité. Chaque titre dispose de suffisamment de tiroirs pour justifier de multiples écoutes, le tout étant mis en valeur par la prod de Gorgor dont le travail rappelle parfois l'opus de PHAZM sur lequel il a également oeuvré. Le batteur-producteur parvient à livrer un son à la fois heavy et bien détouré, à mille lieues de l'effet compressé et très fort qu'on entend souvent. Le temps ne semble pas avoir de prise sur le groupe qui soufflera bientôt ses trente bougies comme l'atteste le chant de Patrick Germonville, toujours aussi enragé. Il est bien sûr possible que le travail ne plaise pas aux afficonados de la brutalité primaire de
Agony In Red, le groupe s'éloignant de plus en plus de cette forme de violence, mais il y a dans la progression de MORTUARY entre ces deux albums quelque chose de revigorant : le Metal Extrême hexagonal a encore quelque chose à dire. Et ça fait du bien.
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04/12/2017 10:25