« Monarch! est le meilleur groupe du monde. Et
Never Forever est son meilleur album. »
Voilà grosso modo ce que j'ai pu répéter autour de moi à tue-tête – au point d'en perdre quelques amis mais rien de grave : ils n'écoutaient pas Monarch! – et, honnêtement, je ne vois pas quoi dire d'autre. Car quoi ajouter à propos des Français ? Qu'ils sont si étranges qu'on se demande si Bayonne n'est pas en Finlande ou au Japon ? Que leur amour du metal est si pur derrière leur goût pour la pop – alors comme ça, il paraît qu'on adore Weezer ? Pas moi qui vais vous le reprocher... – qu'on en vient à les mettre en exemple de ce pour quoi on écoute et écoutera toujours des personnes qui braillent et qui jouent fort ? Ou alors le sempiternel concours de bite façon « ils ont été plus loin que tout le monde dans le doom et reviennent mettre une claque aux extrémistes comme quelqu'un n'ayant plus rien à prouver » ? Pensez-vous, les concours de bite, Monarch! n'en a cure, malgré qu'il aime répéter en concert qu'il a des érections à la Turbonegro !
Il n'y a rien d'autre à dire : Monarch! est le meilleur groupe du monde. Et
Never Forever est son meilleur album. Un album beau, évidemment, parfait, autant que possible dans cette réalité-ci, incroyable, puisqu'il n'y a rien à croire et tout à trouver dans ces soixante-sept minutes. Un album qui réalise toutes les promesses d'harmonie laissées par
Sabbracadaver. Un album qui est comme rencontrer une version magnifiée du
Gracefallen de Unholy en même temps qu'une allitération de Warning remplaçant la sensiblerie de l'homme qui se met à nu par la tranquillité altière de la femme qui, elle, tutoie le sentiment sans grandiloquence, avec une justesse intelligible, crue. Un album de doom dans ce qu'il peut avoir de plus punk, haillons et ailleurs, sans fard, la poésie naïve d'une enfant qui joue dans la boue habillée de sa plus éclatante robe blanche...
Et quoi ? Vous voulez que je m'invente le guide touristique de ces lieux en explicitant les raisons de ce génie ? Que je dise qu'ils sont allés voir du côté de Loss et Tyranny et en ont rapporté des hurlements délicieux d'outre-tombe ? Qu'ils n'ont jamais sonnés aussi pop, aussi shoegaze et cependant aussi doom ? Faire l'état du compteur EDF, appuyer que question amplification, il y a des secondes ayant de quoi alimenter une centrale pour l'année à venir ? Ou alors nommer une nouvelle fois l'ensemble des formations à écriture inclusive, celles qu'il est bon d'évoquer quand on cause émotions et voix aussi enjôleuses que maléfiques ? Et pourquoi pas des citations d'auteurs tiens, de belles phrases pour une belle musique, même si cette dernière s'en passe bien ? Mes excuses, voyez que je m'énerve tout seul alors que vous êtes sans doute venus par ici avec le seul but d'avoir un peu de lecture pour accompagner votre café. Mais Monarch! est le meilleur groupe du monde, et si peu s'en rendent compte... Bah !
Assez. En entendant ces morceaux qui mélangent de leur alchimie secrète des symboles contraires – loups, agneaux, bas, haut, lune, soleil, naissance, éternité... –, il n'y a décidément rien à dire. Rien, seulement quelques déclinaisons des émotions totales qui nous traversent, quelques leads de guitares à se remémorer – bon courage pour choisir lesquelles à ceux qui se lanceront dans le signalement de « moments forts » au sujet de
Never Forever ! – ou seulement à penser à ce longue-durée comme on rêvasse, absent au monde, enfermé dans son esprit mais libéré de tout ce qui nous entoure. Tout de même, il va falloir arrêter de s'extasier et oser une filiation, puisque Monarch! est en vérité ici semblable à une chose qu'on connaît bien : ce clair-obscur dans lequel on évolue à l'apparition des premiers éclats de lumière, rose et bleu-nuit effectuant leur quotidienne discussion dans le ciel, l'activité de la ville tremblotante, s'étirant, se dégourdissant les jambes, bienheureuse, offerte et chimérique à ses promeneurs qui, en retour, ont le pas lourd et lent ainsi qu'un sourire serein avant que commence la journée. Oui,
Never Forever, s'il doit ressembler à quelque chose, ne se rapproche pas d'un autre projet ou d'histoires de beau sabbat, de belle tristesse, de belle soirée... Mais d'un beau début de matin qui ne semble jamais finir, où les rêves trouvent une suite.
Enfin, que ça ne vous fasse pas oublier l'essentiel concernant ce disque simple et pourtant désarmant, qui me fait bafouiller et tortiller les mots là où j'aimerai être à sa mesure : Monarch! est le meilleur groupe du monde. Et
Never Forever est son meilleur album.
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