Malokarpatan m'avait fait une forte impression lors de la sortie de son premier album
Stridžie dni (2015). Du black metal old school avec des grosses touches heavy/thrash et surtout une véritable plongée dans le folklore slovaque. Les musiciens ont le sens du rythme, du riff, accrochant avec des leads de tueurs, mais aussi un amour de la « mise en scène » assez prononcé par ce chant grandiloquent de Temnohor et de nombreux samples des plus évocateurs. Une belle surprise qui a mis du temps avant de trouver un véritable écho auprès du public, le succès underground grandissant surtout suite à l'édition vinyle de ce long format via Invictus Productions un an plus tard. En 2017, le groupe revient avec un line up plus étoffé – arrivées, en 2016, de Peter à la basse et de Miroslav derrière les fûts (tous deux membres de Krolok avec HV) –, ainsi qu'un second essai paru une nouvelle fois sur le label irlandais.
Et, à l'écoute de ce dernier-né, la formation ne fait finalement que prolonger le voyage déjà entamé avec
Stridžie dni. Les musiciens déploient sur
Nordkarpatenland, vieux nom désignant la Slovaquie, une longue fresque faite de traditions, de grotesque, de vieilles croyances et de peurs primitives. Vous retrouvez tout le sel faisant la beauté du premier album. Les nombreux samples parfaitement intégrés (sur certaines introductions et outro de titres) apportent davantage d'accroche et renforcent le propos de Malokarpatan. Temnohor en impose toujours autant comme conteur ténébreux de par ses vocaux graves et habités mis en relief par la réverbération. Il sait varier son jeu selon les changements de rythmes et/ou de teintes, tonnant et semblant lancer des éclairs sur les morceaux agressifs – tel le massif « Ked starého Bartolína ze šenku na táčkach zvážali » – ou encore déclamant de sombres histoires de sa voix aussi caverneuse que menaçante (l'horrifique et aguicheuse « V rujnovej samote pocichu dumá lovecký zámek zvlčilého grófa »). Forêts peuplées de créatures maléfiques, villageois apeurés par l'inconnu, Belzebub, sorcière ou bien château hanté, le décor prend forme au fil des minutes et vous êtes rapidement happés par les ambiances développées par le quatuor. Tout est fluide et cohérent, de la production organique (mais plus lisible) aux influences old school nettement marquées pour rendre vivace et éclatant l'aspect médiéval. La bande son se déroule tel un parchemin avec son gros lot de riffs percutants, de leads des plus jouissifs mais également de quelques compositions brutales, incisives et rugueuses à souhait (« Na horárni ve folvarku šafári rohatý jáger » en est l'exemple le plus probant), renvoyant à la scène des années 80 (Tormentor, Bathory, etc.) et rappelant aux bons souvenirs de la première réalisation parue il y a deux ans.
Versez le vin funèbre aux verres par longs flots,
Et buvons à la Mort dans leurs crânes, poètes,
Pour étouffer en nous la rage des sanglots !
Nordkarpatenland est telle une vieille bâtisse en bois : authentique, rustre, obscur et poussiéreux mais recelant de trésors. Les parties rageuses et brutes de décoffrage s'entremêlent en effet avec naturel aux divers arrangements et à des passages plus affinés, comme cela été le cas précédemment. Un véritable sceau reconnaissable entre mille qui vient rehausser l'ensemble et mettre en exergue l'amour de Malokarpatan pour ses racines (cf. le choix de la langue, les nombreux samples de vieux films ou encore les références parsemées dans les textes). Seulement ces éléments sont davantage surlignés et le sens du détail très affûté propre au groupe fait des étincelles. La musique des Slovaques prend un ton plus théâtral et grandiloquent, renvoyant à la scène italienne pour ce qu'elle a d'excessif, le heavy tenant le premier rôle – qui pourra rebuter quelques fans de la première heure. Les synthétiseurs – tenus par les invités de marque que sont Annick Giroux (Cauchemar) et Zdeněk Šikýř – font également leur apparition afin d'enluminer les compositions et leur conférer une aura aussi occulte que singulière, fleurant bon les vieux films d'horreur des 70's (rhaaa les claviers sur « Ked gazdovi upeleší sa v chyži nezdoba zmok » à partir de 2 :50 !). Plus dense et flamboyant, ce long format fascine autant qu'il ensorcelle avec des lignes de guitares tantôt épiques (sur le long et très accrocheur « V okresném rybníku hastrman už po stáročá vyčína ») tantôt chargé de testostérones (« Ked starého Bartolína ze šenku na táčkach zvážali »). Plus « accessible » et addictif, vous êtes frappés par la puissance suggestive des sonorités ainsi que l'aspect très charnel que revêtent certains passages – apporté par les guests de qualité cités plus haut (notamment Annick Giroux sur le court morceau titre ou bien « Ked svetlonosi započnú v močariskách nazeleno svícit »).
Les musiciens vous immergent aisément dans leur univers fabuleux et folklorique aidés en cela par des extraits d’œuvres de musique classique (cf. « The Night of the Witches » de Eugen Suchoň, introduisant merveilleusement la sixième piste), qui renforcent le propos et accroissent le pouvoir de séduction. Malokarpatan use donc toujours des mêmes ficelles mais de manière plus réfléchie (production organique mais moins cradingue, arrivée d'un batteur, ajout d'instruments tels le synthétiseur, le carillon, guimbarde,...) afin d'offrir un rendu encore plus riche et personnel. Un fait allant de pair avec la gestion de ses influences. Certes vous restez en terrain connu avec ces sonorités old school. Mais il faut davantage voir du côté de Master's Hammer (déjà énoncé dans la chronique de leur première réalisation), Mercyful Fate et autres groupes canal historique. Les saveurs parfois kitsch et désuètes passent bien, les ambiances dressées sur « V okresném rybníku hastrman už po stáročá vyčína » n'auraient pas dépareillé sur
Seventh Son of a Seventh Son (3:17), le titre « Nedlho po púlnoci opacha sa doplazila z dzíry » – qui donne envie de bouger son boule et dont les riffs sont gravés dans le crâne – est un tube en puissance et Tom Necrocock (la classe !) vient également donner de la voix sur le prenant « V hustej hore na stračích nohách striga chalupu svoju ukrýva ». Ajoutez un artwork magistral, signé Dávid Glomba, et vous tenez là un album d’exception !
Par gulo gulo
Par AxGxB
Par Jean-Clint
Par Raziel
Par Sosthène
Par Keyser
Par Keyser
Par Lestat
Par Lestat
Par Sosthène
Par Sosthène
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par AxGxB
Par Deathrash
Par Sikoo