Canker - Earthquake
Chronique
Canker Earthquake
C'est quand même cool les rééditions. Elles permettent notamment de découvrir des vieilleries méconnues parfois meilleures que des albums plus cultes. C'est ainsi à Xtreem Music, qui n'est pas le dernier à jouer les archéologues, surtout des scènes finlandaise et espagnole, que je dois la découverte de Canker. Le groupe ibérique m'était en effet inconnu jusqu'à l'exhumation de son premier album Physical en 2014. Une petite perle de death/thrash à la fois technique et groovy, produite par Colin Richardson et mixée par Tomas Skogsberg. Toute une époque! Pas de réédition cette fois ici. Il s'agit bien de neuf que nous proposent les vétérans, reformés en 2002 et muets jusqu'alors. Quoique "neuf" pas tout à fait puisque l'opus a en fait été enregistré fin 2005 début 2006 mais n'avait fait l'objet d'aucune publication. C'est désormais chose faite depuis quelques semaines.
Et si Earthquake ne vaut pas Physical, il eût été dommage qu'il reste moisir sur un disque dur. On reconnait le son Canker qui a fait la réussite de son premier opus tout en se permettant d'explorer d'autres horizons. Après tout, plus de dix ans séparent les deux albums, entrecoupés par un Exquisites Tenderness en 1997 sur lequel je n'ai jamais posé les oreilles. Seul le guitariste chanteur Miguel Hernández fait encore partie de l'aventure, accompagné d'un nouveau bassiste et d'un nouveau batteur (désormais chez les Français d'Abyssal Ascendant), depuis remplacés. En gros, c'est le bordel! Un peu comme la musique d'ailleurs, qui s'égare parfois, on le verra. Mais 80% du temps, on a affaire à du bon gros death/thrash ancré dans les années 1990, que ce soit dans la production (ce son de guitare, ça ne trompe pas!) ou le riffing mi-technique mi-groove typique de cette décennie où beaucoup de groupes modernisent leur son et compliquent un peu leur jeu. La plupart des neuf pistes auraient pu se trouver sur Physical, au-delà de la qualité moindre. Les morceaux s'avèrent assez courts, efficaces et avec un nombre plutôt élevé de riffs. Les rythmiques, majoritairement rapides, alternent entre tchouka-tchouka accéléré (c'est du thrash/death!) et mid-tempo, avec même quelques blastouilles sur "Whale Hunt" (plus Gojira dans la mentalité que Infernal Torment!), la fin de "Earthquake", le début de "Hand Of God" ou "Ravenous"). C'est énergique (miam ce son de caisse claire bien sec qui claque!), ça joue vite et bien et on croise même pas mal de solos bien foutus ("Whale Hunt" à 1'35, "Earthquake" à 3'52, "Leyla Island" à 5'00, "Bedout" à 2'51...). C'est que les mecs ne sont pas manchots et possèdent un feeling mélodique appréciable. On rajoute quelques arpèges ("Biosfear", "Bedout"), un peu de guitare sèche ("Leyla Island", "The Ghosts Of Past"), une basse pas timide qui se permet certaines aventures en solitaire (intro de "Biosfear", "Bedout", "Ravenous", "The Ghosts Of Past") et on se retrouve avec un disque varié qui a plein de bonnes choses à offrir pour contenter l'amateur de death/thrash qui aime quand ça cogne tout en n'excluant pas un peu de diversité.
Il vous faudra cela dit plus d'ouverture pour les autres 20% du temps (proportion non contractuelle) où Canker part un peu à la pêche sur des passages plus ou moins réussis. Ne souhaitant pas se limiter à du "simple" death/thrash 90s qui bourre et groove, le trio d'Andalousie a pris le parti d'inclure des sonorités d'autres horizons et d'élargir son registre à d'autres styles. On a par exemple ces quelques samples futuristes sur "Earthquake" et "Hand Of God" pour un petit côté cyber qui ne sert pas à grand chose. On fronce également les sourcils à l'apparition de ces claviers et samples symphoniques sur "Hand Of God" et son démarrage à blasts, "Bedout" et "Ravenous" qui sentent un peu le black metal kitschouille avec quelques riffs au même parfum pour aller avec. Un peu de black/thrash aussi sur "The Ghosts Of Past". Là, j'apprécie plus. "Black Star", le dernier et plus long morceau de Earthquake, présente un visage plus doom des Espagnols avec ce rythme lancinant et cette ambiance triste et morose avant de repartir sur un thrash/death plus classique. Une fin plutôt agréable quoiqu'un peu longuette. Et ce n'est pas fini puisque le combo de Grenade incorpore des samples Nature & Découvertes sur le début de "Biosfear" qui nous plonge en pleine jungle, et va jusqu'à se prendre pour des Brésiliens sur "Leyla Island" qui sort les percussions tribales et les gros riffs à deux notes pour ce qu'on pourrait croire un remake du "Roots Bloody Roots" de Sepultura. Il y a même du didgeridoo (idem sur "The Ghosts Of Past"). Chez moi, ça passe mais ce ne sera sans doute pas le cas pour tout le monde. Ce qui a du mal à passer par contre c'est ce "riff" enfantin nullissime à la deuxième minute de "Biosfear". Comment un groupe aussi affûté peut pondre un truc pareil?! Heureusement ce n'est qu'une fois et ça ne dure pas longtemps mais à chaque écoute ça me saigner des tympans!
Du coup, on ne comprend pas toujours où veut en venir le combo, certains passages sonnant assez déroutants et certaines transitions mal amenées. Le tout manque ainsi parfois de cohésion ce qui affaiblit l'ensemble pourtant de qualité. Car hormis ces écarts pas toujours de bon aloi mais qui partent d'une bonne intention, certaines séquences banales peu intéressantes, la pochette plus que bof et le logo pourri qui ne donnent vraiment pas envie d'aller plus loin, Earthquake reste un album costaud. Le death/thrash varié de Canker, à la fois bourrin, mélodique, technique et progressif, a de quoi satisfaire bon nombre d'entre-vous. Les riffs font leur petit effet, le feeling mélodique est là, ça arrache bien la gueule, le chant growlé de temps en temps arraché s'avère plutôt original et l'effort de variation dans le jeu est tout de même appréciable. Le trio, bien que très versé dans le son des années 1990, a le mérite d'offrir quelque chose de suffisamment personnel. Voilà donc une bonne occasion de découvrir un groupe talentueux méconnu qui signe là un retour très correct qui me satisfait. Je garde néanmoins une nette préférence pour Physical, plus marquant et homogène, et sans détour bancal vers une musique plus ouverte. Ça tombe bien, la formation a réenregistré le morceau d'ouverture "Inquisition" qui vous donnera une bonne idée du niveau de l'époque.
| Keyser 16 Novembre 2017 - 703 lectures |
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1 COMMENTAIRE(S)
citer | Je ne sais pas pourquoi, je trouve le nom particulièrement moisi. Mais c'est vrai que le groupe vaut quand même la peine que l'on s'y intéresse, surtout sur "Physical" en effet. |
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1 COMMENTAIRE(S)
16/11/2017 23:13